Vu
la demande d'asile déposée en Suisse le 24 avril 2012 par A._______, ressortissante
érythréenne née le (...),
la décision du 27 juin 2014 par laquelle l'Office fédéral des migrations (ODM ;
le Secrétariat d'Etat aux migrations [SEM] depuis le 1er
janvier 2015) a rejeté cette demande en application de l'art. 54 LAsi (RS 142.31), mais a
reconnu la qualité de réfugiée de l'intéressée en raison de l'illicéité
de son renvoi en Erythrée et l'a mise pour cette raison au bénéfice de l'admission
provisoire,
l'arrêt rendu par le Tribunal administratif fédéral (ci-après : le
Tribunal) le 27 octobre 2014 rejetant le recours formé contre la décision précitée,
en tant que la conclusion portait sur l'octroi de l'asile en Suisse,
la demande déposée par A._______ auprès de l'ODM par écrit daté du 29 avril
2015, mais posté le 1er mai 2015, visant
à autoriser sa fille, B._______, ressortissante érythréenne née le (...), à
la rejoindre en Suisse au titre du regroupement familial,
la prise de position adressée au SEM le 10 août 2015, dans laquelle le Service de la population
du canton de Vaud a constaté que les conditions légales requises par l'art. 85 al. 7
LEtr (RS 142.20), relatives au délai de carence de trois ans et à l'autonomie financière
de la requérante, n'étaient pas respectées,
le courrier du 13 octobre 2015 par lequel le SEM a avisé A._______ qu'il envisageait de
rejeter sa demande fondée sur la disposition légale précitée, tout en lui donnant
l'occasion de faire part de ses éventuelles observations dans le cadre du droit d'être
entendu,
la décision du SEM du 18 novembre 2015 rejetant la demande de regroupement familial et d'inclusion
déposée le 1er mai 2015, motif
pris que les conditions fixées par l'art. 85 al. 7 LEtr n'étaient pas remplies,
le recours formé contre la décision précitée par A._______, le 17 décembre
2015, auprès du Tribunal,
les divers motifs invoqués dans ce pourvoi, à savoir pour l'essentiel
- que
la recourante a été reconnue comme « réfugiée »
en Suisse et qu'elle dispose de ce fait d'un statut de séjour stable dans ce pays,
- qu'elle
peut, dans ces circonstances, se prévaloir utilement de l'art. 8 CEDH pour que sa fille B._______
soit autorisée à la rejoindre en Suisse,
- qu'elle
ne comprend pas pour quelles raisons les autorités suisses font une distinction entre les titulaires
d'une autorisation de séjour annuelle (permis B « réfugiés »)
et ceux au bénéfice d'une admission provisoire (livret F « réfugiés »),
- qu'elle
estime qu'une telle distinction n'est pas prévue par la Convention du 28 juillet 1951
relative au statut des réfugiés (ci-après : la Convention sur les réfugiés,
RS 0.142.30),
- que
la recourante conclut donc à ce que sa fille B._______ soit incluse dans son admission provisoire,
la décision incidente du Tribunal du 19 janvier 2016 admettant la requête d'assistance
judiciaire partielle sollicitée préalablement par la recourante,
le courrier du 10 juin 2016 dans lequel A._______ a fait état de la vulnérabilité
de sa fille et de la souffrance vécue par les intéressées en raison de leur séparation,
la réponse du SEM du 23 août 2016 proposant le rejet du recours,
l'ordonnance du Tribunal du 3 novembre 2016 invitant la recourante à transmettre des informations
complémentaires au sujet de la situation personnelle et familiale de sa fille résidant en Erythrée,
le courrier du 2 décembre 2016 aux termes duquel l'intéressée a fait savoir
au Tribunal
- que
le seul membre de la famille restée en Erythrée est la grand-mère paternelle de B._______,
- que
cette personne souffre de sérieux problèmes cardiaques et vit avec la prénommée dans
un village situé aux environs d'Asmara,
- que
B._______ suit régulièrement sa scolarité dans un établissement (...) sis en
cette ville,
les autres pièces versées au dossier,
et
considérant
qu'en vertu de l'art. 31 LTAF, le Tribunal connaît des recours contre les décisions
au sens de l'art. 5 PA,
qu'en particulier, les décisions en matière de regroupement familial avec une personne
admise provisoirement en Suisse prononcées par le SEM - lequel constitue une unité de
l'administration fédérale telle que définie à l'art. 33 let. d LTAF -
peuvent être contestées devant le Tribunal, lequel statue définitivement, sauf demande
d'extradition déposée par l'Etat dont le requérant cherche à se protéger
(cf. art. 83 let. d ch. 1 LTF), exception non réalisée en l'espèce,
que le Tribunal est donc compétent pour connaître du présent litige,
que A._______, agissant également au nom de sa fille mineure B._______, a qualité pour
recourir (cf. art. 48 al. 1 PA),
que le recours, interjeté dans la forme (cf. art. 52 PA) et le délai (cf. art. 50
PA) prescrits par la loi, est recevable,
que, selon l'art. 24 de l'ordonnance du 11 août 1999 sur l'exécution du renvoi et de l'expulsion
d'étrangers (OERE, RS 142.281), la procédure à suivre pour regrouper les membres d'une
famille de personnes admises à titre provisoire en Suisse est régie par l'art. 74 de l'ordonnance
du 24 octobre 2007 relative à l'admission, au séjour et à l'exercice d'une activité
lucrative (OASA, RS 142.201),
que si les délais relatifs au regroupement prévus
à l'art. 85 al. 7 LEtr sont respectés, la demande visant à inclure des membres de
la famille dans l'admission provisoire doit être déposée dans les cinq ans (cf. art. 74
al. 3 1ère phrase OASA),
qu'en vertu de l'art. 85 al. 7 LEtr, le conjoint et les enfants célibataires de moins de 18
ans des personnes admises provisoirement peuvent bénéficier du regroupement familial et du
même statut, au plus tôt trois ans après le prononcé de l'admission provisoire, pour
autant qu'ils vivent en ménage commun (let. a), qu'ils disposent d'un logement approprié (let.
b), et que la famille ne dépende pas de l'aide sociale (let. c), les trois dernières conditions
citées étant cumulatives,
que la disposition légale précitée s'applique aussi aux réfugiés admis
provisoirement en Suisse (cf. Martina Caroni et Livia Meisser, Les nouvelles
réalités familiales - Un défi aussi pour le droit des migrations,
in : Actualités du droit des étrangers 2016 [numéro spécial], 2016 Stämpfli
Editions, Berne, p. 30),
qu'en l'occurrence, il appert que A._______a a été mise au bénéfice d'une
admission provisoire en Suisse par décision de l'ODM du 27 juin 2014, de sorte que le délai
d'attente de trois ans exigé par l'art. 85 al. 7 LEtr n'était pas encore échu lorsque
la prénommée a sollicité le regroupement familial avec sa fille le 1er
mai 2015, et qu'il ne l'est toujours pas à ce jour,
que dans la mesure où la condition requise liée audit délai d'attente n'est
pas remplie, il n'est point nécessaire d'examiner, dans le cadre de la présente
procédure, si les conditions d'application matérielles et cumulatives de l'art. 85 al. 7 let.
a à c LEtr sont remplies in casu,
qu'à l'appui de son pourvoi, la recourante se prévaut d'abord de la Convention
sur les réfugiés, en particulier de son art. 13 qui interdit, selon elle, toute discrimination
entre « réfugiés »,
qu'elle soutient que ladite Convention ne fait aucune distinction entre les différentes
catégories de réfugiés, en exposant sur ce point que toutes les personnes reconnues réfugié(e)s
devraient se voir accorder le même traitement, ce dernier ne devant pas être moins favorable
que celui qui est accordé dans les mêmes circonstances aux étrangers établis régulièrement
en Suisse,
que toutefois, le Tribunal observe que la recourante ne saurait tirer un quelconque
avantage de l'art.
13 de la Convention sur les réfugiés, étant donné que cette disposition conventionnelle
ne se rapporte aucunement aux conditions de séjour des réfugiés dans un Etat déterminé,
mais uniquement à la faculté qui est accordée à ceux-ci d'y acquérir de
la propriété mobilière et immobilière de manière non discriminatoire,
qu'il est vrai, par contre, que l'Acte final de la Conférence des Nations Unies
sur le statut des réfugiés et des apatrides consacre le principe de l'unité de la
famille qui constitue un droit essentiel du réfugié, en ce sens que ce texte recommande aux
gouvernements de prendre les mesures nécessaires pour la protection de la famille du réfugié
(cf. Guide des procédures et critères à appliquer pour déterminer le statut de réfugié
au regard de la Convention de 1951 et du Protocole de 1967 relatifs au statut des réfugiés,
1er septembre 1979, Annexe I),
que dans la mesure où il ne s'agit là que d'une recommandation ne revêtant
aucun caractère contraignant à l'égard des gouvernements concernés, il n'existe
pas en faveur du réfugié un droit absolu à l'octroi d'une autorisation d'entrée
dans un pays déterminé,
que selon la jurisprudence du Tribunal, le droit à l'unité de la famille n'est
pas touché lorsque l'entrée de membres de la famille de réfugiés admis provisoirement
ou de réfugiés est soumise à certaines conditions (cf. arrêt du Tribunal administratif
fédéral F-2186/2015 du 6 décembre 2016 consid. 6.1 et réf. cit.),
que les réfugiés admis provisoirement en Suisse ne peuvent prétendre qu'aux
droits que leur confère la Convention sur les réfugiés,
que dite Convention ne leur accorde ainsi aucun privilège en matière de séjour, « ce
qui fait que, sur ce point, les réfugiés admis provisoirement
sont sur un pied d'égalité avec les autres étrangers admis provisoirement »
(cf. ch. 6.3.7 de la Directive du SEM du 1er
janvier 2008 [état au 24 octobre 2016], document publié sur le site internet www.sem.admin.ch
Accueil SEM Publications & service Directives et circulaires III. Loi sur l'asile
6. Situation juridique ; site consulté en février 2017),
qu'à ce stade, il y a donc lieu de constater que la recourante ne peut pas se prévaloir
d'un droit absolu ou inconditionnel à l'entrée en Suisse de sa fille B._______,
au titre du regroupement familial (cf. également, sur cette question, l'arrêt du Tribunal
administratif fédéral D-8553/2010 du 20 février 2013 consid. 4.3.3),
que A._______ fait valoir, ensuite, disposer « d'un
statut de séjour stable » en Suisse en tant que réfugiée admise provisoirement,
si bien qu'elle peut se réclamer de l'art. 8 par. 1 CEDH pour demander à ce que
sa fille soit incluse dans son admission provisoire,
qu'elle laisse ainsi entendre, du moins implicitement, que le délai de carence de trois
ans prévu à l'art. 85 al. 7 LEtr porte atteinte à la protection de la vie familiale
garantie par la disposition conventionnelle précitée,
qu'à ce propos, il sied d'observer qu'il est licite, selon la jurisprudence
du Tribunal fédéral, de subordonner l'entrée en Suisse de membres de la famille
à la réalisation de certaines conditions temporelles (« Gemäss
bisheriger Praxis ist es [...] zulässig, die Einreise von Angehörigen an gewisse zeitliche
Bedingugen zu knüpfen » [cf. ATF 130 II 281 consid. 3.1, 126 II 335 consid. 3c
et réf. cit.],
que selon la jurisprudence cependant, le droit national doit être appliqué de manière
à ce qu'il soit conforme aux normes découlant du droit international public (cf. ATF
125 II 417 consid. 4c),
que cela signifie que l'autorité décisionnelle est chaque fois tenue d'examiner,
sur la base des circonstances concrètes entourant le cas d'espèce, « ob
sich die in Art. 85 Abs. 7 AuG vorgesehene dreijährige Wartefrist völkerrechtskonform auslegen
lässt » (cf. arrêt du Tribunal administratif fédéral F-2186/2015
précité consid. 6.2),
que dans ce contexte, il paraît utile de rappeler que l'admission provisoire est un statut
précaire, qui règle la présence en Suisse de l'étranger aussi longtemps que l'exécution
de son renvoi n'est pas licite, n'est pas raisonnablement exigible ou n'est pas possible (cf. art. 83
al. 1 LEtr),
que la jurisprudence exige, pour que le respect de la vie familiale garanti
par l'art. 8 par.
1 CEDH puisse être invoqué, que le membre de la famille qui séjourne en Suisse jouisse
lui-même d'un droit de résidence durable,
que s'agissant d'une personne admise provisoirement en Suisse, le Tribunal fédéral
a jugé que l'on se trouvait en présence d'une telle situation lorsque cette personne
avait résidé sur le territoire helvétique pendant une durée relativement longue (« über
viele Jahre hinweg »), soit au moins huit ans dans les cités, de sorte qu'elle
disposait de facto un droit de présence assurée (« ein
faktisch gefestigtes Anwesenheitsrecht » [cf. la jurisprudence citée dans l'arrêt
du Tribunal administratif fédéral F-2186/2015 précité, consid. 6.3.2]),
que, dans le cas particulier, il appert que la recourante ne peut pas se prévaloir d'un
droit de présence assuré en ce pays au sens indiqué plus haut, étant donné qu'elle
se trouve sur le territoire helvétique depuis moins de cinq ans et qu'elle a été
mise au bénéfice de l'admission provisoire en ce pays il y a deux ans et demi environ,
que dans ces circonstances, force est d'admettre que l'art. 8 par. 1 CEDH n'entre
pas en collision avec l'art. 85 al. 7 LEtr, si bien que rien ne s'oppose à faire application,
in casu, du délai de carence de trois ans prévu par
la législation nationale, sous réserve d'une pondération générale des
intérêts en présence,
que cela étant, il ressort des dernières pièces versées au dossier que B._______
ne se trouve présentement pas dans une situation précaire sur les plans personnel et familial
en Erythrée, dans la mesure où elle y suit régulièrement sa scolarité et où
elle peut encore compter sur le soutien de sa grand-mère résidant dans la région d'Asmara
(cf. renseignements communiqués le 2 décembre 2016),
que le Tribunal est d'avis que la vulnérabilité évoquée par la recourante
dans son courrier du 10 juin 2016 doit être passablement relativisée, dès lors que la
présence de B._______ dans son pays d'origine n'implique pas en l'état l'existence
d'un risque concret vital immédiat, ou du moins particulièrement grave, pour son intégrité
physique et psychique,
que sans vouloir mettre en doute « la souffrance »
forcément vécue par la recourante et sa fille du fait de leur séparation, le Tribunal
se doit néanmoins de relever que cette dernière ne se trouve pas dans une situation si exceptionnelle
qu'elle justifierait immédiatement la délivrance de l'autorisation d'entrée
et de séjour sollicitée, au titre du regroupement familial,
que, considérée sous cet angle, la décision querellée ne contrevient pas non
plus au principe de la proportionnalité, cela d'autant moins que A._______ garde la faculté
de déposer une nouvelle demande auprès de l'autorité compétence à l'échéance
du délai de carence de trois ans prévu à l'art. 85 al. 7 LEtr,
que par surabondance, il appert que la recourante est totalement assistée financièrement
dans le canton de Vaud depuis le mois de juin 2014 (cf. dossier SEM),
qu'elle ne remplirait ainsi de toute manière pas, à l'heure actuelle, la condition
posée par l'art. 85 al. 7 let. c LEtr (ne pas dépendre de l'aide sociale), si bien
que l'intérêt public visant à respecter le délai de carence de trois ans apparaît
également important sous cet angle,
qu'en définitive, c'est à juste titre que le SEM a rejeté le 18 novembre 2015
la demande de regroupement familial et d'inclusion (dans l'admission provisoire) déposée
par A._______ le 1er mai 2015,
que le recours formé le 17 décembre 2015 contre cette décision doit donc être
rejeté,
que la demande d'assistance judiciaire partielle ayant été admise par le Tribunal
(cf. décision incidente du 19 janvier 2016), il n'y a pas lieu de mettre les frais de procédure
à la charge de la recourante, conformément à l'art. 65 al. 1 PA,
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