D.
Par
décision incidente du 8 juin 2011, le juge instructeur a renoncé à la perception de l'avance
des frais de procédure tout en avisant l'intéressée qu'il serait statué dans la décision
au fond sur l'assistance judiciaire partielle.
E.
Le
(...) 2011, A._______ a produit un courrier, daté du (...) 2009 (avec sa traduction en français),
par lequel des Talibans ont annoncé détenir son mari en otage et ont exigé, en échange
de sa libération, que leur soit livré son fils C._______ afin de pouvoir le "conduire
sur le chemin de l'Islam".
F.
Le
30 juin 2011, A._______ a déposé un rapport établi, le 27 juin 2011, par son psychiatre,
dont il ressort qu'elle souffre d'un état de stress post-traumatique (post traumatic stress disorder
; ci-après, PTSD) du type F 43.1 (selon la classification internationale des troubles
mentaux et du comportement de l'OMS ; ci-après CIM) avec trouble dépressif récurrent moyen
(CIM - F 33.1).
G.
Dans
sa réponse du 5 septembre 2011, communiquée à l'intéressée avec droit de réplique,
l'ODM a préconisé le rejet du recours. Il a affirmé
qu'à Kaboul, les habitants pouvaient bénéficier de la protection des forces de sécurité
afghanes et des troupes internationales stationnées dans cette ville. Il a, pour le reste, confirmé
ses précédents considérants.
H.
Par détermination du 3 octobre 2011, A._______ a souligné
la nette détérioration de la situation sécuritaire intervenue à Kaboul, plus particulièrement
à partir du premier semestre de l'année 2011. Elle a également rappelé les graves
dangers guettant les femmes en Afghanistan, illustrés, selon elle, par l'enlèvement de son
époux et les autres persécutions subies par sa famille avant son départ.
I.
Par
ordonnance du 11 janvier 2012, le Tribunal administratif fédéral (ci après : le
Tribunal), se référant à son arrêt de principe D-4935/2007 du 21 décembre 2011,
a convié les parties à un nouvel échange d'écritures.
J.
Dans sa réponse du 31 janvier 2012, également transmise à
la recourante avec droit de réplique, l'ODM, revenant sur l'argumentation développée dans
la décision querellée, a déclaré raisonnablement exigible l'exécution du renvoi
des intéressés en Afghanistan. Il a relevé que la mère, la soeur, et le beau-frère
de A._______ habitaient à Kaboul où cette dernière et ses enfants avaient de surcroît
vécu. Il a ajouté que le métier d'enseignante exercé par la recourante en Afghanistan
représentait un facteur supplémentaire plaidant pour le retour de sa famille dans cet Etat.
L'autorité inférieure a, d'autre part, expliqué que sa décision de refus d'asile
et de la qualité de réfugié du 25 mai 2010, alors justifiée par l'existence d'une
alternative de protection interne à Kaboul, avait été prise "par économie de
procédure" (sic). Elle a estimé que les déclarations des intéressés présentaient
de "nombreuses invrai-semblances" en citant à titre d'exemples le caractère vague
des indications données par C._______ concernant le décès de sa soeur ainsi que le
désintérêt manifesté par A._______ au sujet des démarches entreprises par son
beau-frère pour retrouver son époux. Il a à nouveau préconisé le rejet du recours.
K.
La recourante s'est déterminée, par acte du 17 février
2012. Elle a répété que les autorités afghanes n'étaient pas en mesure de protéger
sa famille à Kaboul et a en particulier mis en exergue les centaines d'assassinats de collaborateurs
d'organisations non gouvernementales mais aussi d'enseignants, commis par les mouvements hostiles au
gouvernement afghan. L'intéressée a jugé infondés les éléments d'invraisemblance
retenus par l'ODM à l'appui de sa réponse du 31 janvier 2012. Elle a expliqué qu'après
l'enlèvement de son époux, son objectif principal avait été de tout faire pour quitter
son pays le plus rapidement possible pour éviter à son fils C._______ d'être à son
tour enlevé puis recruté de force par les Talibans comme combattant kamikaze. A._______ a soutenu
que C._______ avait répondu correctement aux questions posées lors des auditions et a reproché
à l'ODM de ne pas avoir tenu compte, dans son appréciation, du jeune âge de son fils ainsi
que des événements traumatisants vécus par celui-ci avant son départ d'Afghanistan.
L.
Le 7 mars 2012, le Tribunal a reçu un rapport délivré,
le 3 mars 2012, par le psychiatre de la recourante, qui confirme en substance les
affections diagnostiquées dans son premier rapport du 27 juin 2011.
M.
Par courrier du 20 mars 2012, A._______ a déclaré que son
époux s'était réfugié au Pakistan après avoir finalement été libéré
par les Talibans, moyennant le versement d'une rançon. Elle a ajouté que ses autres proches
avaient fui Kaboul.
N.
Par pli du 20 avril 2012, l'intéressée a déposé
un deuxième rapport de son psychiatre, daté du 20 avril 2012, et de contenu similaire à
celui du 3 mars précédent.
O.
Les
autres faits et arguments de la cause seront évoqués, si nécessaire, dans les considérants
en droit qui suivent.
Droit :
1.
1.1.
En
vertu de l'art. 31 de la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal administratif fédéral
(LTAF, RS 173.32), le Tribunal connaît des recours contre les décisions au sens de l'art. 5
de la loi fédérale du 20 décembre 1968 sur la procédure administrative (PA,
RS 172.021), dont celles rendues par l'ODM en matière d'asile (art. 33 let. d LTAF et 105 LAsi),
qui n'entrent pas dans le champ d'exclusion de l'art. 32 LTAF.
Le Tribunal est ainsi compétent pour se prononcer
sur le présent recours. Il statue de manière définitive, sauf demande d'extradition déposée
par l'Etat dont le requérant cherche à se protéger (art. 83 let. d ch. 1 de la loi du
17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral [LTF, RS 173.110]), exception non donnée in casu.
1.2.
La procédure est régie par la PA, sous réserve de dispositions particulières de la
LTAF ou de la LAsi (art. 37 LTAF, resp. 6 LAsi).
1.3. L'intéressée
a qualité pour recourir. Présenté dans la forme et dans le délai prescrits par la
loi, le recours est recevable (art. 48 et 52 PA et 108 al. 1 LAsi).
2.
2.1. La
Suisse accorde l'asile aux réfugiés sur demande, conformément aux dispositions de la présente
loi (art. 2 al. 1 LAsi). Sont des réfugiés les personnes qui, dans leur Etat d'origine
ou dans le pays de leur dernière résidence, sont exposées à de sérieux préjudices
ou craignent à juste titre de l'être en raison de leur race, de leur religion, de leur
nationalité, de leur appartenance à un groupe social déterminé ou de leurs opinions
politiques. Sont notamment considérées comme de sérieux préjudices la mise en danger
de la vie, de l'intégrité corporelle ou de la liberté, de même que les mesures
qui entraînent une pression psychique insupportable. Il y a lieu de tenir compte des motifs de fuite
spécifiques aux femmes (art. 3 al. 1 et 2 LAsi).
2.2. La
crainte face à des persécutions à venir, telle que comprise à
l'art. 3 LAsi, contient un élément objectif, au regard d'une situation ancrée dans les
faits, et intègre également dans sa définition un élément subjectif. Sera reconnu
comme réfugié, celui qui a de bonnes raisons, c'est-à-dire des raisons objectivement reconnaissables
pour un tiers (élément objectif), de craindre (élément subjectif) d'avoir à
subir selon toute vraisemblance et dans un avenir prochain une persécution (cf. ATAF 2011/50 consid.
3.1.1 p. 996 et réf. cit.).
Sur le plan subjectif, il doit être tenu
compte des antécédents de l'intéressé, notamment de l'existence de persécutions
antérieures, et de son appartenance à un groupe ethnique, religieux, social ou politique l'exposant
plus particulièrement à de telles mesures. En particulier, celui qui a déjà été
victime de persécutions antérieures a des raisons d'avoir une crainte subjective plus prononcée
que celui qui n'y a jamais été confronté. Sur le plan objectif, cette crainte doit être
fondée sur des indices concrets qui peuvent laisser présager l'avènement, dans un avenir
peu éloigné et selon une haute probabilité, de mesures déterminantes selon l'art.
3 LAsi. Il ne suffit pas, dans cette optique, de se référer à des menaces hypothétiques,
qui pourraient se produire dans un avenir plus ou moins lointain (ibid. p. 996 s.).
2.3. Quiconque
demande l'asile (recourant) doit prouver ou du moins rendre vraisemblable qu'il est un réfugié.
La qualité de réfugié est vraisemblable lorsque l'autorité estime que celle-ci
est hautement probable. Ne sont pas vraisemblables notamment les allégations qui, sur des points
essentiels, ne sont pas suffisamment fondées, qui sont contradictoires, qui ne correspondent pas
aux faits ou qui reposent de manière déterminante sur des moyens de preuve faux ou falsifiés
(art. 7 LAsi).
Si l'autorité doit être convaincue que
les faits allégués ont pu se produire, elle ne doit pas être absolument persuadée
de leur véracité, une certitude totale excluant tout doute n'étant logiquement pas possible
; il faut que le requérant d'asile parvienne à convaincre le juge que les choses se sont vraisemblablement
passées comme prétendu, sans avoir à démontrer qu'elles doivent vraiment s'être
passées ainsi parce que toute hypothèse contraire est raisonnablement à exclure. Quand
bien même la vraisemblance autorise l'objection et le doute, ceux-ci doivent toutefois paraître
d'un point de vue objectif moins important que les éléments parlant en faveur de la probabilité
des allégations. Lors de l'examen de la vraisemblance des allégations de fait d'un requérant
d'asile, il s'agit ainsi pour l'autorité de pondérer les signes d'invraisemblance en dégageant
une impression d'ensemble et en déterminant, parmi les éléments militant en faveur ou
en défaveur de cette vraisemblance, ceux qui l'emportent (cf. ATAF 2010/57 consid. 2.2 et 2.3 et
réf. cit.). La personne ayant vécu une situation particulière doit en outre pouvoir la
décrire de manière détaillée, précise et concrète, la vraisemblance de
propos trop généraux, voire stéréotypés étant généralement écartée
(voir notamment à ce sujet Jurisprudence et informations de l'ancienne Commission suisse de
recours [ci-après, la Commission] en matière d'asile [JICRA] 1996 n° 28 consid. 3a
p. 270, qui est toujours d'actualité).
3.
3.1. A
l'appui de sa demande d'asile, A._______ a en substance invoqué les risques de persécutions
de la part des Talibans qui s'en étaient pris violemment à sa famille à cause de ses activités
de femme enseignante exercées après son arrivée à Kunduz.
3.2. En
l'occurrence, le Tribunal juge le récit de A._______ et de C._______ crédible, cohérent,
et suffisamment détaillé. L'intéressée a ainsi décrit de manière convaincante
ses activités de femme enseignante à l'origine des menaces puis de l'agression des Talibans
contre sa famille et son mari en particulier. Compte tenu du contexte afghan et notamment de l'idéologie
islamique intégriste des membres de la mouvance talibane, le Tribunal estime en outre vraisemblable
que ceux-ci aient tenté d'obliger A._______ à cesser son enseignement donné au lycée
de M._______ de Kunduz. La narration précise et concrète par A._______ et C._______
de l'agression du (...) 2009 autorise par ailleurs à conclure que cet événement a réellement
été vécu par les intéressés. Les deux éléments d'invraisemblance retenus
par l'ODM dans sa réponse du 31 janvier 2012 (cf. let. J supra) ont, quant à eux, été
réfutés de manière convaincante par la recourante dans sa détermination du 17 février
2012 (cf. let. K supra) et ne sont donc pas de nature à porter atteinte à la crédibilité
des motifs d'asile invoqués sous l'angle de l'art. 7 LAsi (cf. consid. 2.3 supra). Au demeurant,
si la narration de A._______ et de C._______ avait contenu de "nombreuses invraisemblances",
comme dit par l'ODM (cf. réponse susvisée), celui-ci
aurait pu et dû les signaler dans la décision querellée déjà. Le Tribunal ne
saurait à cet égard admettre l'explication donnée par dit office, selon laquelle celui-ci
s'est initialement abstenu de remettre en cause la haute probabilité des motifs d'asile allégués
par A._______ et C._______ sous prétexte "d'économie de procédure" (cf. let.
J supra). Au demeurant, l'on notera qu'en dépit du caractère raisonnablement exigible de l'exécution
du renvoi et des éléments d'invraisemblance de la narration de A._______ et de C._______, tels
que retenus par l'ODM (cf. ibidem), ce dernier n'a pas révoqué son prononcé d'admission
provisoire du 25 mai 2010. Pareille incohérence ne peut qu'affaiblir encore l'argumentation développée
par l'autorité intimée dans sa réponse du 31 janvier 2012.
3.3. Vu
ce qui précède, c'est donc à bon droit que A._______ peut nourrir une crainte objective
et subjective (cf. consid. 2.2 supra) fondée de persécutions par les Talibans en cas de retour
à Kunduz. A l'appui de sa décision du 25 mai 2010, l'ODM a néanmoins refusé la qualité
de réfugié et l'asile à la recourante au motif que celle-ci disposait d'une alternative
de refuge interne à Kaboul lui permettant d'échapper aux persécutions encourues à
Kunduz. Aussi convient-il maintenant de vérifier si l'intéressée bénéficie ou
non d'une telle alternative de refuge interne, comme le soutient l'ODM.
4.
4.1. La
question du refuge interne n'est expressément réglée, ni par la LAsi, ni par la Convention
du 28 juillet 1951, relative au statut des réfugiés (ci-après : Convention de
1951). Il a toutefois été déduit de l'article 1er,
lettre A, chiffre 2 de ce dernier acte que le terme de réfugié
s'applique à des personnes persécutées ou menacées de persécutions qui ne peuvent
ou, du fait d'une crainte fondée, ne veulent pas se réclamer de protection de leur pays. (cf.
notamment : Organisation suisse d'aide aux réfugiés [éd.], Manuel de la procédure
d'asile et de renvoi, Berne/Stuttgart/Vienne 2009, ch. 4.6, p. 189 ss). Ainsi, en accord avec le principe
de subsidiarité de la protection internationale par rapport à la protection interne, la personne
exposée à des persécutions dans une région de son pays d'origine n'a pas la qualité
de réfugié si elle peut s'y soustraire en s'établissant dans une autre région de
ce même pays (cf. Francesco Maiani, La définition
de réfugié entre Genève, Bruxelles et Berne - différences, tensions, ressemblances,
in : Schweizer Asylrecht, EU-Standards une internationales Flüchtlingshilfe, Eine Vergleichsstudie,
2009, p. 50).
4.2. Sur
le plan international, les conditions d'existence d'une alternative de protection interne excluant la
reconnaissance de la qualité de réfugié sont recensées principalement par les Principes
directeurs du HCR (précités, point C) ainsi que par le Protocole de 1967, relatif au statut
des réfugiés (HCR/GIP/03/04, Genève, juillet 2003). Il en ressort princi-palement que
la zone de réinstallation interne doit être accessible au requérant d'asile (3.2.1) et
lui garantir la sécurité (3.2.2). La situation personnelle du requérant doit également
être prise en compte pour déterminer l'existence ou non d'une alternative de protection interne
(3.2.3).
4.2.1.
S'agissant de la première condition, la zone de réinstallation interne doit être
accessible à l'intéressé, tant sur les plans pratique et juridique qu'en termes de sécurité
(Principes directeurs du HCR, § 10-12). Précisément, il n'existe pas de possibilité
de réinstallation interne si l'accès à cette zone est entravé par des obstacles ne
pouvant être raisonnablement surmontés. On ne peut en effet exiger du requérant qu'il
s'expose à des dangers physiques pour atteindre la zone de réinstallation interne envisagée
ou qu'il traverse la région à l'origine de ses persécutions pour y accéder. Autrement
dit, le requérant doit avoir la garantie juridique de se rendre dans cette zone, d'y entrer, et
d'y demeurer.
4.2.2.
Quant à la deuxième condition, la zone de réinstallation interne doit garantir
à l'intéressé la sécurité, ce qui suppose qu'il y soit durablement à l'abri
de toute persécution. Une telle exigence est satisfaite lorsque dite zone est hors de portée
des persécuteurs, que le requérant ne court pas le risque d'y être exposé à
des persécutions locales et qu'il n'encourt aucun risque d'être renvoyé au lieu où
il craint d'être persécuté. (Principes directeurs du HCR, § 19). L'alternative de
protection interne n'est en particulier pas donnée si le requérant est exposé dans cette
zone à des menaces à ce point graves qu'elles le contraindraient de revenir vers son lieu de
persécution originel.
4.2.3.
En troisième lieu, les facteurs relatifs à la situation personnelle du requérant
doivent eux aussi être pris en considération (Principes directeurs du HCR, § 25). Il importe
à cet égard de tenir notamment compte de l'âge, du sexe, de la santé, ainsi que des
relations familiales et sociales de la personne concernée pour déterminer si la zone de réinstallation
interne lui offre un véritable refuge. L'analyse des conditions socio-économiques générales
de cette zone doit également être intégrée à cet examen. De manière générale,
l'on considère que les conditions existant dans la zone de réinstallation interne doivent permettre
au requérant de mener une vie relativement normale au regard des conditions de vie dans son pays
d'origine.
4.3.
4.3.1.
Pour ce qui a trait à la pratique suisse en la matière, les exigences à respecter
pour valablement conclure à une alternative de protection interne ont été fixées
par la jurisprudence, en plusieurs étapes.
A l'instar des règles internationales, la pratique
suisse a tout d'abord mis l'accent sur la sécurité : dans la zone de réinstallation
interne envisagée, le requérant concerné devait être effectivement protégé
contre toute persécution (cf. JICRA 1996/1, décision de principe du 28 novembre 1995, consid.
5b et 5c). L'existence d'un refuge interne n'était donc reconnue que si ce requérant pouvait
trouver dans cette zone une protection efficace. Cela supposait, d'une part, qu'il y fût totalement
à l'abri des persécutions le menaçant dans les autres régions de son pays d'origine,
et impliquait, d'autre part, qu'il ne risquât pas d'y être renvoyé. Dans son nouveau lieu
de refuge, le requérant ne devait en outre pas courir un risque de persécution d'origine locale,
ni être victime de pressions rendant sa vie quotidienne si difficile qu'il ne pourrait y résider
de manière durable (cf. JICRA 2006/25 consid. 8.3 p. 278 et JICRA 1996/1 précitée, consid.
5c p. 6 s.). Une persécution émanant des organes centraux de l'Etat excluait généralement
l'existence d'une alternative de protection interne (cf. JICRA 1996/1 consid. 5c).
4.3.2.
4.3.2.1
Dans la dernière jurisprudence citée, la Commission avait également précisé
que des facteurs personnels ou économiques telles que les difficultés d'intégration liées
à des différences culturelles ou religieuses ou résultant d'une situation tendue sur le
marché d'emploi étaient sans pertinence pour déterminer l'existence d'une possibilité
de refuge interne. Sur ce point, la pratique suisse s'écartait des principes susvisés du HCR.
En cas de protection effective contre des persécutions sur le lieu de refuge, la reconnaissance
de la qualité de réfugié était par conséquent exclue,
même en présence de conditions de vie défavorables prévalant dans ce lieu
(cf. JICRA 1996/1 consid. 5d p. 7ss). La question de l'exigibilité du séjour sur le lieu de
refuge interne devait ainsi être analysée à la seule lumière des empêchements
à l'exécution du renvoi.
4.3.2.2
Cette conception, fortement critiquée par la doctrine et jugée contraire à l'esprit
même de la Convention de 1951, a été révisée. Depuis l'arrêt de principe
du Tribunal D-4935/2007 du 21 décembre 2011, publié dans le recueil des arrêts du Tribunal
administratif fédéral suisse [ATAF] 2011/51, la seule absence de persécutions dans la
zone de réinstallation interne ne suffit plus pour conclure à l'existence d'une alternative
de protection interne ("Innerstaatliche Schutzalternative"). Il y a en effet lieu de prendre
en considération d'autres facteurs plus larges couvrant non seulement les éléments relatifs
à la situation personnelle du requérant d'asile concerné (tels l'âge, le sexe, l'état
de santé, ou les liens familiaux), mais aussi les conditions générales régnant dans
cette zone, comme la sécurité, le respect des droits de l'homme, et les conditions économiques
de subsistance. L'alternative de protection interne n'est ainsi pas donnée si la personne persécutée
dans une région de son pays est contrainte de se rendre dans une autre partie de celui-ci où
son existence serait menacée (cf. ATAF 2011/51 précité consid. 8).
4.3.2.3
Dans ce même arrêt (consid. 8.6), le Tribunal a par ailleurs souligné l'importance
de l'accessibilité à la zone de réinstallation interne envisagée : Le requérant
doit pouvoir s'y rendre et y séjourner légalement et en toute sécurité. Dans la négative,
une alternative de protection interne ne saurait être admise.
5.
5.1.
5.1.1.
En l'occurrence, il convient tout d'abord de rappeler que la situation sécuritaire
globale en Afghanistan est tendue et que les Talibans ont continuellement renforcé leur présence
sur l'ensemble du territoire afghan (voir notamment à ce propos : The Situation in Afghanistan
and its implications for international peace and security, General Assembly Security Council, 13 septembre
2012 ; Afghanistan, die aktuelle Sicherheitslage, Schweizerische Flüchtlingshilfe, Berne,
9 septembre 2012 ; Amnesty International Annual Report - Afghanistan, mai 2012 ; Taliban
Presence in Afghanistan, allvoices.com, consulté le 25 octobre 2012). Dans trois arrêts
rendus en dates du 16 juin 2011, du 28 octobre 2011, et du 30 décembre 2011, publiés sous ATAF
2011/7, ATAF 2011/38, respectivement ATAF 2011/49, le Tribunal a toutefois précisé que l'exécution
du renvoi vers Kaboul, Herat, et Mazar-I-Sharif était raisonnablement exigible, à certaines
conditions. Ces trois villes peuvent donc entrer en ligne de compte comme alternative de protection interne
pour les requérants devant fuir d'autres régions de l'Afghanistan où ils risquent des
persécutions.
Dans le premier ATAF 2011/7 cité (cf. consid. 9.3),
le Tribunal a procédé à une analyse détaillée de la situation dans cet Etat
et en a conclu que les conditions de sécurité en Afghanistan s'étaient péjorées
de manière généralisée durant ces dernières années, y compris dans les
centres urbains et à Kaboul (cf. ibidem consid. 9.7.5). La situation sécuritaire s'est toutefois
stabilisée dans la capitale afghane, contrairement aux zones rurales du pays (ibid. consid. 9.8
et 9.9). Dans ce même arrêt toujours (cf. consid. 9.9.2), le Tribunal a
considéré que l'exécution du renvoi vers Kaboul pouvait être raisonnablement exigée
pour les hommes jeunes et en bonne santé si les exigences strictes, déjà énoncées
dans la jurisprudence de la Commission (cf. JICRA 2003 n° 10), étaient respectées. En
particulier, l'existence d'un solide réseau social à même d'assurer la réinsertion
de ces personnes doit être établie, à défaut de quoi la précarité des conditions
de vie dans la capitale afghane les mettrait concrètement en danger au sens de l'art. 83 al. 4 LEtr
(ibid.).
5.1.2.
Sous l'angle sécuritaire, le Tribunal considère qu'à Kaboul, les recourants
ne seront pas durablement à l'abri de tout risque de persécutions, même si la présence
des Talibans n'est actuellement pas significative dans cette ville. En effet, pour pouvoir conclure à
l'existence d'un refuge interne, il ne suffit pas de constater que l'agent de persécution n'est
pas présent sur le territoire envisagé mais il convient encore d'exclure la probabilité
qu'il puisse étendre son contrôle sur la zone visée (cf. Hathaway
James C./Foster Michelle, La possibilité de protection interne / réinstallation interne
/ fuite interne comme aspect de la procédure de détermination du statut de réfugié
in : Feller Erika/Volker Türk/Nicholson Frances, La
protection des réfugiés en droit international, UNHCR, 2008, p. 441). Or, dans le cas particulier,
la situation sécuritaire instable globale de l'Afghanistan ne permet pas d'écarter durablement
pareille éventualité, ce d'autant moins que des incidents impliquant les Talibans ont pu être
observés à Kaboul et que cette ville reste régulièrement secouée par des émeutes
(cf. notamment : "Les Talibans
peuvent facilement entrer dans Kaboul", www.lemonde.fr, 16 avril 2012). L'on ne saurait de surcroît
exclure une prise de contrôle ou, à tout le moins, une infiltration à grande échelle
de Kaboul par les forces talibanes après le retrait du gros du contingent des forces internationales,
prévu d'ici à 2014 (sur ce dernier point, voir p. ex. UK Home Office, Operational Guidance
"Afghanistan" du 20 février 2012 ch. 2.3.2 p. 2, l'édition du
10 décembre 2012 du New York Times ["No
easy exit for Nato in Afghanistan"], ainsi que le rapport de l'Organisation suisse d'aide aux réfugiés
[OSAR] du 3 septembre 2012, intitulé "Afghanistan : Update Die aktuelle Sicherheitslage").
Il sied d'ajouter à cela que le réseau social constitué par A._______, durant sa présence
à Kaboul de 1977 à 2007 (cf. let A supra), est susceptible de la rendre plus repérable
et, partant, plus exposée à d'éventuelles persécutions talibanes dans la capitale
afghane. Pour ces motifs-là déjà, le Tribunal estime que la recourante ne dispose pas
de possibilité de refuge interne à Kaboul.
La province de Herat ne saurait davantage être considérée
comme une alternative de protection interne au sens défini ci-dessus. D'une part, le taux de pauvreté
y dépasse la moyenne nationale (38,7 % contre 35,8 % sur le plan national) et le taux d'emploi est
de 56,3 %, contre 62,5 % en moyenne nationale (voir p. ex. arrêt E-3040/2012 du 16 novembre 2012
consid. 4.1.7 et réf. cit.). D'autre part, l'ethnie pachtoune des intéressés est minoritaire
à Herat, ceux-ci n'y ont jamais vécu et n'y disposent d'aucun réseau social et familial.
Ces considérations-là valent également pour Mazar-I-Sharif où les recourants
n'ont pas non plus séjourné avant leur expatriation.
5.1.3.
En définitive, le Tribunal en conclut qu'aucune des régions d'Afghanistan ne peut en
l'état garantir aux intéressés la sécurité ni les mettre durablement à
l'abri de persécutions de la part des Talibans. L'alternative de protection interne, retenue par
l'ODM pour refuser la qualité de réfugié à A._______, n'est donc pas donnée
en l'espèce.
6.
En
l'absence de motifs d'indignité (cf. art. 53 LAsi) et d'éléments justifiant l'exclusion
de la qualité de réfugié au sens de l'art. 1 F de la Convention du 28 juillet 1951 relative
au statut des réfugiés (Conv. réfugiés, RS 0.142.30), dite qualité doit par
conséquent être reconnue à A._______ et l'asile lui être accordé (cf. consid.
2.1 supra), à titre primaire. Ses enfants mineurs remplissent, quant à eux, les conditions
d'application de l'art. 51 al. 1 LAsi, afférent à l'asile familial.
Aussi, doivent-ils être reconnus comme réfugiés et se voir octroyer l'asile, mais
à titre dérivé uniquement, dans la mesure où il n'ont invoqué aucun motif
d'asile propre (cf. let. A supra, in fine). Le recours, en ce qu'il est dirigé contre le refus
de la qualité de réfugié et de l'asile, doit par conséquent être admis et la
décision du 25 mai 2010 réformée sur ces deux points.
7.
7.1.
Le Tribunal statue sans frais suite à l'admission du recours (art. 63 al. 1 et
2 PA). Partant, la demande d'assistance judiciaire partielle du 23 juin 2010 devient sans objet.
7.2. Ayant
eu gain de cause, A._______ a droit à des dépens (art. 64 al. 1 PA en relation avec l'art.
7 du règlement du 21 février 2008 concernant les frais, dépens et indemnités fixés
par le Tribunal administratif fédéral [FITAF, RS 173.320.2]).
Le Tribunal lui attribue donc un montant de 800 francs
pour l'activité indispensable déployée par sa mandataire (art. 10 al. 2 FITAF), étant
rappelé qu'en cas d'absence de décompte, l'indemnité est fixée sur la base du dossier
(art. 14 al. 2 FITAF, 2ème phr.).
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