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Cour III

C-1256/2020

 

 

 

 

 

Arrêt du 12 septembre 2022

Composition

 

Caroline Bissegger (présidente du collège),

David Weiss, Viktoria Helfenstein, juges,

Julien Theubet, greffier.

 

 

 

Parties

 

A._______, (Suisse),

recourante,

 

 

 

contre

 

 

Swissmedic, Institut suisse des produits thérapeutiques,   

autorité inférieure.

 

 

 

 

Objet

 

Dispositifs médicaux, interdiction de mise sur le marché (décision du 5 février 2020).

 

 

 


Faits :

A. 
A._______ (ci-après : la Fondation, la recourante, l'intéressée), avec siège à (...), est une fondation dont le but social est le « soutien et le développement de projets favorisant la conscientisation et l'autogestion de la santé, notamment par toutes actions ayant une dimension sociétale, en particulier dans le cadre de la meilleure connaissance du cycle féminin, de l'applicabilité et de la promotion de la méthode symptothermique de régulation des naissances, dans la meilleure connaissance des processus physiologiques du jeûne prolongé et dans la promotion du jeûne holistique » (extrait du registre du commerce, n° fédéral CH-[...], consulté le 24 août 2022).

A.a  Par courriel du 27 mars 2014, la Fondation a indiqué à l'Institut suisse des produits thérapeutiques (ci-après : Swissmedic, Institut ou autorité inférieure) commercialiser depuis 2009 une application « B._______ » qui analyse le cycle menstruel de la femme et qui permet d'assurer une contraception naturelle sous certaines conditions. Dans ce contexte, la Fondation a requis auprès de l'Institut des informations pour distinguer un dispositif médical d'un outil didactique, l'application « B._______ » entrant selon elle dans cette dernière catégorie (SM pce 1, p. 1).

A.b  Dans les suites de cette correspondance, Swissmedic a transmis à la Fondation des informations sur les dispositions applicables aux dispositifs médicaux, leur mise sur le marché et l'évaluation de leur conformité aux prescriptions en vigueur. Par décision du 27 janvier 2016, l'Institut - après avoir considéré que « B._______ » constitue un dispositif médical de la classe I au sens du droit communautaire - a communiqué à l'intéressée qu'elle « ne sera plus autorisée [à partir du 15 mars 2016] à commercialiser en Suisse et dans les Etats contractants le dispositif médical [« B._______ »,] actuellement non conforme » faute d'avoir été annoncé à Swissmedic conformément aux dispositions en la matière, à savoir par le biais des formulaires ad hoc disponibles sur le site internet de l'Institut (SM p. 1 à 6).

A.c  Par arrêt C-669/2016 du 17 septembre 2018, la cour de céans a rejeté le recours de la Fondation contre la décision susmentionnée du 27 janvier 2016 (SM p. 7 à 45).

 

 

B.   

B.a  Par courriel du 15 octobre 2018 - complété ultérieurement -, A._______ a transmis à Swissmedic les formulaires d'annonce de mise sur le marché ainsi que la déclaration de conformité du dispositif médical « B._______ ». Selon les informations communiquées dans ce contexte, cette application - assimilée à un dispositif médical de classe I - a pour but de permettre une « régulation naturelle des naissances » au sens du code GMDB (« Global Medical Device Nomenclature ») n° 64008 visant les dispositifs médicaux définis comme suit : « An interpretive software application intended to be used by a healthy woman in the home to monitor the fertile and infertile phases of her menstrual cycle to assist her in achieving natural conception or preventing undesired pregnancy. It uses the symptothermal method which is based on data from self-observed signs such as waking temperature, the nature of cervical secretions, and cervix position/hardness » (SM p. 51 à 61).

B.b  Par prononcé du 3 décembre 2018, annulé par « décision de réexamen » du 8 août 2019, Swissmedic a refusé la déclaration de mise sur le marché de « B._______ » en raison du fait que ce produit « ne correspond pas à un dispositif de classe I [...], mais doit être classé dans la classe IIb » conformément à la version d'octobre 2018 du « Manual on Borderline and Classification in the Community Regulatory Framework for Medical Devices » s'agissant des « logiciels visant à maîtriser la conception et la contraception [en utilisant] des données entrées par les patient(e)s » (SM p. 61 à 87).  .

B.c  Par décision du 5 février 2020 et après avoir donné l'occasion à la Fondation de prendre position sur les mesures envisagées (SM 87 à 104), Swissmedic a interdit à cette dernière - sous menace des sanctions prévues par la loi - de mettre sur le marché l'application « B._______ », de l'exporter et d'en faire de la publicité tant qu'elle ne dispose pas d'un certificat CE valable (SM p. 105 à 112).

C. 
Le 3 mars 2020, la Fondation a interjeté recours contre la décision de Swissmedic du 5 février 2020, concluant en substance à ce que la mesure d'interdiction de mise sur le marché de « B._______ » soit annulée, à ce qu'elle soit indemnisée en raison du dommage provoqué par Swissmedic et à ce que lui soit communiqué, en vertu des règles en matière de transparence, notamment « le nombre exact de procédures de surveillance du marché ouvertes [en Suisse et dans la zone UE] en matière d'applications portant sur la fertilité féminine » (TAF pces 1 et 2).

Dans sa réponse du 18 mai 2020, Swissmedic a conclu à ce que les conclusions en indemnisation du dommage et celles visant à l'obtention de renseignements sur d'autres procédures soient déclarées irrecevables et à ce que le recours soit rejeté pour le surplus (TAF pce 7).

Par réplique du 2 juillet 2020 et duplique du 31 août 2020, les parties ont persisté dans leur position respective, après quoi la Fondation a repris et développé son point de vue dans des écritures du 3 octobre 2020, 26 janvier 2021, 16 mars 2021, 27 octobre 2021, 4 novembre 2021 et 22 février 2022 (TAF pces 10, 12 et 15 ss). Le 13 juin 2022, la cour de céans a encore ordonné un échange d'écritures (TAF pces 34ss).

Droit :

1. 
Sous réserve des exceptions - non réalisées en l'espèce - prévues à l'art. 32 LTAF, le Tribunal administratif fédéral, en vertu de l'art. 31 LTAF, connaît des recours contre les décisions au sens de l'art. 5 PA prises par les autorités mentionnées à l'art. 33 LTAF. En particulier, les décisions rendues par Swissmedic - établissement de la Confédération au sens de l'art. 33 let. e LTAF, en relation avec l'art. 68 al. 2 de la loi fédérale du 15 décembre 2000 sur les médicaments et les dispositifs médicaux (Loi sur les produits thérapeutiques, LPTh, RS 812.21) - peuvent être contestées conformément à l'art. 84 al. 1 LPTh devant le Tribunal de céans, qui est donc compétent pour connaître du présent recours.

Déposé pour le surplus en temps utile (art. 50 PA) et en la forme requise (art. 52 PA) par une personne disposant manifestement de la qualité pour recourir (art. 48 PA ; cf. également art. 101 de l'ordonnance sur les dispositifs médicaux [ci-après : ODim ; RS 812.213] dans sa version en vigueur dès le 26 mai 2021), le recours est recevable, de sorte qu'il y a lieu d'entrer en matière.

2.   

2.1  En sa qualité d'autorité de recours, le Tribunal administratif fédéral dispose d'une pleine cognition (art. 49 PA). Il vérifie d'office les faits constatés par l'autorité inférieure (art. 12 PA), sous réserve du devoir de collaborer des parties (art. 13 PA). Il applique le droit d'office, sans être lié par les motifs invoqués (art. 62 al. 4 PA), ni par l'argumentation juridique développée dans la décision (cf. ATF 135 III 397 consid. 1.4 et 128 II 145 consid. 1.2.2; cf. également Moser/Beusch/Kneubühler, Prozessieren vor dem Bundesverwaltungsgericht, 2ème éd., Bâle 2013, n. 2.156). Cela étant, il se concentre en principe sur les griefs soulevés et peut se limiter à ceux qui, sans arbitraire, lui paraissent pertinents (ATF 133 III 439 consid. 3.3; 130 II 530 consid. 4.3) ; il n'examine les questions de droit non invoquées que dans la mesure où les arguments des parties ou le dossier l'y incitent (ATF 135 I 91 consid. 2.1; ATAF 2014/24 consid. 2.2. et réf. cit.; TAF A-4998/2015 précité consid. 1.6.1).

2.2  Bien qu'étant au bénéfice d'un plein pouvoir de cognition, le Tribunal ne peut pas substituer sa propre appréciation à celle de l'autorité de première instance lorsqu'il s'agit d'examiner - comme c'est le cas en l'espèce - des questions qui requièrent des connaissances techniques. Aussi l'autorité de juridiction administrative doit-elle respecter le pouvoir d'appréciation reconnu à l'autorité administrative de première instance, en ne s'écartant pas sans nécessité et motif pertinent de la solution opportune ou convenable retenue par celle-ci (ATF 135 II 296 consid. 4.4.3). Plus le pouvoir d'appréciation de l'autorité de première instance est important, plus le Tribunal de céans est appelé à faire preuve de retenue en exerçant son propre pouvoir d'appréciation, ce qui suppose toutefois que l'autorité inférieure ait clairement et précisément motivé sa décision (cf. ATF 133 II 35 consid. 3 et TF 9C_776/2020 du 7 juillet 2022 consid. 5.3).

3.   

3.1  Au plan formel, la Fondation considère que Swissmedic ne pouvait revenir, dans la décision attaquée, sur la classification de « B._______ » opérée dans sa décision du 27 janvier 2016, au demeurant confirmée par arrêt C-669/2016 de la cour de céans du 17 septembre 2018.

Ce grief doit être écarté. Selon la jurisprudence en effet, seul le dispositif d'une décision acquiert en principe force de chose jugée, la portée exacte de celui-ci se déterminant à la lumière des motifs de l'arrêt. Ainsi, dans le cadre d'une procédure subséquente, les considérants d'une décision entrée en force dont le dispositif ne renvoie pas aux motifs ne sont pas contraignants pour l'administration (entre autres, TF 8C_589/2016 du 26 avril 2017 consid. 3.2 et réf. cit., en particulier ATF 123 III 16 consid. 2a). Or en l'espèce, défini par son dispositif, le prononcé du 27 janvier 2016 constitue une mesure au sens de l'art. 5 al. 1 let. a PA ayant pour objet d'interdire à la recourante de mettre sur le marché son application « B._______ ». Cet effet constitue certes la conséquence juridique de la qualification de « B._______ » comme dispositif médical et du constat que sa mise sur le marché n'est pas intervenue conformément aux procédures prescrites, respectivement aux prescriptions applicables aux dispositifs médicaux de catégorie I. Ces dernières considérations n'en demeurent pas moins de simples motifs n'emportant pas force de chose décidée. Par conséquent, l'autorité précédente était bel et bien fondée à revenir sur la classification opérée dans sa décision du 27 janvier 2016, surtout que le cadre légal en la matière a depuis lors évolué (TF 2C_ 99/2017 du 12 juin 2018 consid. 3.5 et réf. citées, en particulier ATF 142 V 551 consid. 4.1 en particulier). A cet égard, on observera à toutes fins utiles que dans son arrêt précité C-669/2016, la cour de céans n'a pas examiné la question de la classification de l'application, qui ne faisait l'objet d'aucune contestation en procédure judicaire (TAF C-669/2016 précité consid. 4.1). Pour le surplus, à aucun moment Swissmedic n'a fourni à la recourante des assurances relatives à la mise sur le marché du dispositif litigieux, de sorte que cette dernière ne saurait se prévaloir de la protection du principe de la bonne foi (TF 2C_735/2015 du 11 novembre 2016 consid. 6.2 et réf. cit., en particulier ATF 132 II 485 consid. 9.5). 

3.2  Au plan formel, la recourante reproche également à Swissmedic d'être confrontée à un conflit d'intérêt dans la mesure où elle défend les intérêts de l'industrie pharmaceutique. Purement appellatoires et fondées sur aucun élément probant, ces critiques ne constituent toutefois pas des motifs recevables au regard notamment des exigences de motivation prévues à l'art. 52 PA (TAF B-4669/2013 du Tribunal du 30 octobre 2019 consid. 4.2.3 ; pour des cas d'application de la LTF, cf. ATF 145 IV 154 consid. 1.1; 142 III 364 consid. 2.4).  

4. 
L'objet de la contestation, qui est déterminé par la décision attaquée, porte exclusivement sur le bienfondé de l'interdiction - subordonnée à l'obtention du certificat CE - de mettre sur le marché le dispositif médical « B._______ » et d'en faire de la publicité. En tant qu'elle menace la recourante de sanctions en cas d'infractions à la mesure d'interdiction ordonnée, le prononcé attaqué ne saurait en revanche être assimilé à une décision au sens de l'art. 5 PA et ne constitue dès lors pas l'objet de la contestation.

Cela étant, il ne saurait être entré en matière sur les conclusions formulées par le recourante en relation avec sa demande d'indemnisation et celles fondées sur la loi fédérale sur le principe de la transparence dans l'administration (LTrans; RS 152.3), qui dépassent l'objet de la contestation et s'avèrent par conséquent irrecevables (sur ces notions, cf. Meyer/von Zwehl, L'objet du litige en procédure de droit administratif fédéral, in Mélanges Pierre Moor, 2005, p. 440).

5. 
Plusieurs modifications de la loi fédérale sur les médicaments et les dispositifs médicaux (ci-après : LPTh ; RS 812.21) sont entrées en vigueur postérieurement à la décision attaquée, rendue le 5 février 2020 (RO 2020 2961, RO 2020 2961 et RO 2020 2743). De même, l'ODim a été entièrement refondue avec effet au 26 mai 2021 (RO 2020 2977).  Selon les principes généraux du droit intertemporel (cf. p.ex. ATF 129 V 354 consid. 1 et réf. cit.), sont déterminantes dans le cas d'espèce les dispositions applicables dans leur teneur en vigueur jusqu'au prononcé de la décision litigieuse. Dans la mesure où les dispositions pertinentes ont été modifiées par ces révisions, elles seront citées ci-après dans leur ancienne version.

5.1  Selon l'art. 4 al. 1 let. b LPTh, constituent des  dispositifs médicaux, les produits, y compris les instruments, les appareils, les diagnostics in vitro, les logiciels et autres objets ou substances destinés à un usage médical, ou  présentés comme tels, dont l'action principale n'est pas obtenue par un médicament. 

5.1.1  Conformément à l'art. 45 LPTh, nul dispositif médical utilisé conformément à l'usage auquel il est destiné ne doit mettre en danger la santé de l'utilisateur, du consommateur, du patient ou de tiers. Les allégations quant à ses performances ou à son efficacité doivent pouvoir être prouvées (al. 1). Quiconque met un dispositif médical sur le marché doit pouvoir prouver que ledit dispositif satisfait aux exigences essentielles (al. 2). Conformément à l'art. 45 al. 3 LPTh, il revient au Conseil fédéral de fixer les exigences auxquelles les dispositifs médicaux doivent satisfaire. Il fixe notamment: a. les exigences essentielles; b. les règles de leur classification; c. les langues dans lesquelles doit être rédigée l'information sur le produit (al. 3). Quant à l'institut, il désigne les normes techniques qui permettent de concrétiser les exigences essentielles. Il désigne autant que possible des normes harmonisées sur le plan international. Toute dérogation doit être approuvée par l'autorité compétente (al. 4).

5.1.2  Sous le titre « procédure d'évaluation de la conformité », l'art. 46 LPTh fait supporter à quiconque met un dispositif médical sur le marché la charge de prouver qu'il a été soumis aux procédures d'évaluation de la conformité prescrites (al. 1). Selon l'al. 2 de cette disposition, le Conseil fédéral règle les procédures d'évaluation de la conformité. Il fixe notamment: a. les types de procédure; b. les dispositifs médicaux pour lesquels il faut recourir à un organe d'évaluation de la conformité; c. les documents exigés et la durée de leur archivage.

5.2  Faisant usage de la délégation de compétence contenue à cette dernière disposition, le Conseil fédéral a adopté l'Ordonnance sur les dispositifs médicaux (ci-après : ODim, RS 812.213), qui traite, à sa seconde section, des conditions relatives à la mise sur le marché des dispositifs médicaux (art. 4 ss ODim). En la matière, les conceptions des droits suisse et européens convergent (TF 2C_391/2017 du 19 septembre 2017 consid. 5.1, 2A.474/2002 du 17 mars 2003 consid. 5.1, 2A.522/2004 du 18 août 2005 consid. 2.1; cf. également Message du 1er mars 1999 concernant la loi fédérale sur les médicaments et les dispositifs médicaux [loi sur les produits thérapeutiques, LPT; ci-après : le Message] ad art. 4 al. 1 let. b LPTh [FF 1999 3184]; Ursula Eggenberger Stöckli, Basler Kommentar zum Heilmittelgesetz, Bâle/Genève/Munich, 2006, ad art. 4, n os 31 et 32 p. 50; cf. aussi, pour la classification des dispositifs médicaux, " Guidelines relating to the application of the Council Directive 93/42/EEC on Medical Devices " [MEDDEV 2.4/1 Rev. 9 de juin 2010; http://ec.europa.eu/growth/sectors/medical-devices/guidance_fr]).

Selon l'art. 5 al. 1 ODim, le responsable de la première mise sur le marché attribue les dispositifs médicaux classiques aux classes I, IIa, IIb, et III en fonction des risques qu'ils peuvent présenter, compte tenu de l'emploi auquel ils sont destinés. La classification doit être conforme aux dispositions de l'annexe IX - intitulée « critères utilisés pour la classification » -  de la directive 93/42/CEE relative aux dispositifs médicaux. À son ch. 4.2, règle 14, cette annexe dispose que « tous les dispositifs utilisés pour la contraception ou pour prévenir la transmission de maladies sexuellement transmissibles font partie de la classe IIb, sauf s'il s'agit de dispositifs implantables ou de dispositifs à long terme, auxquels cas ils font partie de la classe III ». Par ailleurs, selon le manuel de la Commission européenne « Manual on borderline and classification in the community regulatory framework for medical devices », version 1.22 publiée en mai 2019 (ci-après : MEDDEV ; https://ec.europa.eu/docsroom/documents/35582) - qui comporte des lignes directrices non contraignantes visant à harmoniser les pratiques européennes en matière de mise sur le marché des dispositifs médicaux (TF 2C_391/2017 précité consid. 5.3 ; cf. également ATAF 2010/50 consid. 4.4) -, les applications logicielles destinées à prévenir les grossesses ou faciliter la conception constituent des dispositifs médicaux appartenant à la classe IIb conformément à la règlementation européenne susmentionnée (règle 9.11 MEDDEV).   

5.3  Selon l'art. 9 al. 1 ODim, quiconque met un dispositif médical sur le marché en Suisse doit pouvoir, sur demande, produire une déclaration de conformité aux autorités chargées du contrôle dans le cadre de la surveillance du marché. Conformément à l'art. 10 al. 1 ODim, la procédure d'évaluation de la conformité, le certificat de conformité et la déclaration de conformité sont régis par l'annexe 3, dont il ressort qu'un organe d'évaluation de la conformité doit être consulté conformément à la directive 93/42/CEE pour les dispositifs médicaux de classes IIa, IIb et III (ch. 2 let. b) ; pour les dispositifs de classe I, aucun organe d'évaluation de la conformité ne doit en principe être consulté (ch. 2 let. a).

5.4  Conformément à l'art. 66 LPTh, l'institut peut, dans les limites de ses attributions, prendre toutes les mesures administratives nécessaires à l'exécution de la loi, soit notamment interdire la distribution, la remise, les importations et exportations ainsi que le commerce de produits thérapeutiques. Si un dispositif médical s'avère non conforme aux prescriptions légales, l'autorité compétente notifie au responsable de sa mise sur le marché le résultat de la procédure de contrôle et lui donne l'occasion de s'exprimer à ce sujet ; l'autorité peut ordonner des mesures ; le cas échéant, elle accorde un délai approprié pour leurs mises en oeuvre (l'art. 27 al. 1 ODim).

6. 
Selon Swissmedic, le logiciel « B._______ » est utilisé notamment pour la contraception de sorte qu'il doit être classé dans la catégorie IIb des dispositifs médicaux conformément aux paragraphes 1.4 du chapitre I, 2.5 du chapitre II et 4.2 du chapitre III de l'annexe IX de la directive 93/42/CEE, cette classification étant encore confirmée par les lignes directrices du MEDDEV. Par conséquent, la mise sur le marché de ce dispositif suppose la consultation d'un organisme d'évaluation de la conformité de manière à obtenir le marquage CE, comme l'exigent les art. 46 LPTH et 10 al. 1 ODim ainsi que le ch. 2 let. b annexe 3 ODim. Or, la Fondation n'a entrepris aucune démarche en ce sens et n'est ainsi pas en mesure d'apporter la preuve de la conformité de son dispositif médical. Toujours selon l'autorité précédente, il se justifie dans ces conditions d'interdire de mettre sur le marché le dispositif litigieux, de le distribuer ou d'en faire la publicité en Suisse et dans les pays contractants tant et aussi longtemps qu'il n'est pas couvert par un certificat CE.

6.1  Etant établi et admis de part et d'autre que « B._______ » constitue un dispositif médical au sens des dispositions précitées, la recourante critique tout d'abord la classification retenue par l'Institut. Sans remettre en cause que son dispositif a notamment une visée contraceptive, elle considère qu'il ne saurait pour autant être classé dans la catégorie IIb comme l'indique la réglementation précitée. En effet, la « méthode symptothermique » à la base du logiciel litigieux permet une « contraception naturelle et écologique » parfaitement fiable et dénuée de risques, à distinguer par conséquent des autres méthodes contraceptives plus invasives ou moins fiables visées notamment par la règle 4.2 du chapitre III de l'annexe IX de la directive 93/42/CEE. Aux yeux de la recourante, il est partant arbitraire d'assimiler - à l'instar de la position exprimée par Swissmedic ainsi que dans le MEDDEV - une méthode contraceptive manuelle et traditionnelle permettant une régulation naturelle des naissances à des méthodes chimiques potentiellement dangereuses et risquées pour la santé. Aussi la recourante requiert-elle la mise en oeuvre auprès d'une juriste et d'une gynécologue d'une expertise visant à comparer plusieurs dispositifs logiciels à visée contraceptive.   

Cette argumentation ne convainc pas. Quoiqu'en dise la recourante, le texte de la règle 14 du ch. 4.1 de l'annexe IX à la directive 93/42/CEE - dont le caractère contraignant en droit Suisse n'est à bon droit pas remis en cause - est parfaitement clair et ne souffre aucune équivoque en tant qu'il dispose que « tous les dispositifs utilisés pour la contraception [...] font partie de la catégorie IIb, sauf s'il s'agit de dispositifs invasifs à long terme, auxquels cas ils font partie de la classe III ». Tel que l'exprime l'autorité précédente, la finalité du dispositif considéré et l'emploi auquel il est destiné apparaissent ainsi décisives pour déterminer si une classification dans la catégorie IIb se justifie au regard de cette disposition (art. 5 al. 1 ODim ; par analogie, TF 2C_391/2017 précité consid. 5.2 ; cf. également TAF C-669/2016 précité consid. 4.8). Or, il est incontesté que « B._______ » se présente, entre autres usages, comme un moyen de contraception de nature non invasive (à cet égard, cf. outre les écritures de la recourante, TAF C-669/2016 précité consid. 6.3.1 ; sur la notion de dispositifs invasifs, cf. ch. 1.2 de l'annexe IX à la directive 93/42/CEE). A la suite de l'autorité précédente, il faut par conséquent conclure que ce logiciel constitue effectivement un dispositif médical de catégorie IIb. Dans ce contexte, les allégations de la recourante relatives à la fiabilité de la « méthode symptothermique » n'y changent rien puisque la disposition règlementaire ne procède à aucune distinction en relation avec ce critère (sur la méthode en question, cf. TAF C-669/2016 précité consid. 6.4). En d'autres termes, la règlementation précitée vise tous les dispositifs médicaux qui servent à la contraception, quelle que soit leur nature.

Pour le surplus, il faut bien constater que la règle 9.11 MEDDEV vise un dispositif médical largement similaire à celui dont il est question ici, soit une application alimentée par les données fournies par les utilisateurs et destinée notamment à prévenir les grossesses à la lumière des circonstances permettant de cibler au mieux la fenêtre de fertilité féminine. Or, si - comme le rappelle la recourante - les lignes directrices du MEDDEV ne sont pas juridiquement contraignantes, elles doivent néanmoins être prises en considération puisqu'elles précisent la règlementation européenne en matière de classification des dispositifs médicaux, qui converge avec la règlementation suisse de manière à assurer une mise sur le marché conforme des dispositifs médicaux autant en Suisse qu'en Europe (consid. 5.2 supra). Cela étant, on ne saurait reprocher à Swissmedic - en sa qualité d'autorité spécialisée - de s'être fiée à la règle 9.11 MEDDEV et d'avoir classé le dispositif contesté en catégorie IIb. Du moins, on ne voit aucun motif pertinent exigeant de s'écarter de cette appréciation, la réquisition de preuve formulée par la recourante n'étant en particulier pas de nature à apporter un éclairage différent de la situation (sur l'appréciation anticipée des preuves, ATF 134 I 140 consid. 5.3). D'ailleurs, les circonstances que la recourante entend prouver par la mise en oeuvre de l'expertise requise se confondent avec la procédure de certification dans la mesure où celle-ci vise à établir le respect des exigences essentielles rattachées aux dispositifs médicaux (cf. art. 9s ODim en relation avec l'annexe II à la directive 93/42/CEE).

6.2  De là, l'autorité précédente a à bon droit considéré que la preuve de la conformité de « B._______ » implique la réalisation d'une procédure de certification auprès d'un organe d'évaluation de la conformité en vue de l'apposition du marquage CE. Comme l'exprime la recourante, la mise en oeuvre d'une telle procédure constitue certes une démarche stricte et onéreuse. Elle n'en demeure pas moins justifiée par un intérêt de santé publique et au regard des risques inhérents aux dispositifs médicaux à but contraceptif, à savoir notamment celui des grossesses non-désirées (cf. à cet égard TAF C-669/2016 précité consid. 5.3 et 6.3.2 ainsi que Gabriel Avigdor, La réglementation des applications médicales mobiles, in : Réflexions romandes en droit de la santé, édit. : Dupont/Guillod, 2016, p. 200). Il sied de noter à cet égard que « B._______ » n'est pas une application qui réduit ce risque à zéro puisque notamment le facteur humain joue un rôle important dans son utilisation.

6.3  Dans ses écritures, la recourante se prévaut également d'une violation du principe de l'égalité, observant que d'autres dispositifs logiciels utilisés pour la contraception font l'objet d'un traitement plus favorable au sien.

Ce grief n'est pas davantage fondé. Selon la jurisprudence, le principe de la légalité de l'activité administrative prévaut en effet sur celui de l'égalité de traitement, de sorte que le justiciable ne peut généralement pas se prétendre victime d'une inégalité devant la loi lorsque celle-ci est correctement appliquée à son cas (ATF 139 II 49 consid. 7.1 et réf. citées). Or, tel est le cas en l'espèce, la classification du dispositif « B._______ » dans la catégorie IIb étant conforme aux dispositions en la matière, comme cela a été retenu plus haut. Pour le surplus, il n'est en l'état pas établi que la loi aurait été faussement appliquée dans d'autres cas selon une pratique constante et délibérée de l'autorité, de sorte que la recourante ne saurait prétendre à l'égalité dans l'illégalité (ATF 139 II 49 consid. 7.1 et réf. citées). A cet égard et quoiqu'elle en dise, la recourante ne peut rien tirer du régime réservé aux applications C._______, D._______, E._______ ou F._______, qui - comme l'exprime l'Institut dans sa duplique - ont également été contrôlées dans le cadre de la surveillance du marché.

7. 
En présence ainsi d'un dispositif médical dont la preuve de conformité n'est pas apportée, l'interdiction de mise sur le marché prononcée par l'autorité inférieure apparaît fondée. Sous l'angle de la proportionnalité (art. 5 al. 2 Cst.), on doit en effet exclure qu'une mesure moins incisive soit à même de préserver à suffisance l'intérêt à la protection de la santé (art. 118 Cst.) poursuivi par la LPTh. A l'inverse de ce que soutient la recourante - qui se plaint de manière erronée d'une violation des règles sur l'effet suspensif (art. 55 PA), sans pour autant avoir requis d'autres mesures provisionnelles -, il ne saurait en particulier y avoir lieu de lui octroyer un délai pour « se conformer à l'exigence du CE ». Comme énoncé plus haut, l'art. 46 LPTh subordonne en effet la mise sur le marché des dispositifs médiaux à l'aboutissement de la procédure d'évaluation de la conformité prescrite. Par conséquent, on ne saurait reprocher à Swissmedic d'avoir interdit - sans avoir accordé le délai requis par la recourante - la mise sur le marché de « B._______ », dont la conformité n'a à ce stade pas été établie de façon adéquate. Admettre l'inverse reviendrait en effet à tolérer l'utilisation de dispositifs médicaux susceptibles de mettre en danger la santé des consommateurs (art. 45 LPTh). 

Quant à la mesure d'interdiction de faire de la publicité du dispositif litigieux, elle est également fondée. Selon l'art. 21 ODim en effet, la publicité pour les dispositifs médicaux destinés à la remise directe au public ou à l'utilisation directe par le public doit se limiter exclusivement à des allégations correspondant à l'information sur le produit en ce qui concerne son utilisation, ses performances et son efficacité (al. 1), toute information trompeuse au sujet de l'efficacité ou des performances d'un dispositif médical étant interdite (al. 2). Or, en l'absence de certification valable, on voit mal que « B._______ » puisse faire l'objet d'une publicité conforme à cette disposition.

8. 
En définitive, le recours doit être rejeté et la décision entreprise confirmée en tous points.

9.   

9.1  En règle générale, les frais de procédure comprennent l'émolument judiciaire et les débours et sont mis dans le dispositif à la charge de la partie qui succombe (art. 63 al. 1 PA, applicable par renvoi de l'art. 37 LTAF ; art. 1 du règlement du 21 février 2008 concernant les frais, dépens et indemnités fixés par le Tribunal administratif fédéral [FITAF, RS 173.320.2]). Les frais de procédure sont fixés à Fr. 4'000.- et sont compensés par l'avance effectuée de même montant requise par le Tribunal de céans (TAF pces 3 et 5).

9.2  Conformément à l'art. 7 al. 1 a contrario et 3 du règlement du 21 février 2008 concernant les frais, dépens et indemnités fixés par le Tribunal administratif fédéral (FITAF, RS 173.320.2), la partie qui succombe n'a pas droit aux dépens pour les frais nécessaires causés par le litige. Vu l'issue du litige, il n'est pas alloué d'indemnité à titre de dépens à la recourante.

 

 

 

 

 

 

 

Par ces motifs, le Tribunal administratif fédéral prononce :

1. 
Le recours est rejeté dans la mesure de sa recevabilité.

2. 
Les frais de procédure de Fr. 4'000.- sont mis à la charge de la recourante et sont compensés par l'avance de frais de même montant versée en cours de procédure.

3. 
Il n'est pas alloué de dépens.

4. 
Le présent arrêt est adressé à la recourante, à l'autorité inférieure ainsi qu'au Département fédéral de l'intérieur.

 

L'indication des voies de droit se trouve à la page suivante.

 

La présidente du collège :

Le greffier :

 

 

Caroline Bissegger

Julien Theubet

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de droit :

La présente décision peut être attaquée devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par la voie du recours en matière de droit public, dans les trente jours qui suivent la notification (art. 82 ss, 90 ss et 100 LTF). Ce délai est réputé observé si les mémoires sont remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF). Le mémoire doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, les motifs et les moyens de preuve, et être signé. La décision attaquée et les moyens de preuve doivent être joints au mémoire, pour autant qu'ils soient en mains de la partie recourante (art. 42 LTF).

 

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