Bundesverwaltungsgericht
Tribunal administratif fédéral
Tribunale amministrativo federale
Tribunal administrativ federal

Cour II
B-7849/2007/scl
{T 0/2}

Arrêt du 19 novembre 2008

Composition
Bernard Maitre (président du collège), Claude Morvant, Hans Urech, juges,
Olivier Veluz, greffier.

Parties
B-7849/2007
B-7850/2007
Fondation X._______,
représentée par Maître Jean-Cédric Michel,
recourante,

contre

Service de l'emploi du Département de l'économie,
rue Caroline 11, 1014 Lausanne,
autorité inférieure,

Centre vaudois de gestion des programmes d'insertion (CGPI),
représenté par Maître Paul-Arthur Treyvaud,
autorité concernée.

Objet
Assurance-chômage (restitution de subventions perçues indûment).

Faits :

A.
A.a Le Centre de gestion des programmes d'insertion (ci-après : le CGPI) est membre, sous la forme d'une commission, de l'Association de Développement du Nord Vaudois (ci-après : l'ADNV) ; cette dernière est une association de droit privé. La mission du CGPI est de promouvoir dans le canton de Vaud l'intégration des demandeurs d'emploi sur le marché du travail par la mise sur pied d'emplois temporaires subventionnés (ETS).

La Commission de surveillance du Fonds de compensation de l'assurance-chômage, par l'intermédiaire du Secrétariat d'Etat à l'économie (seco) et sur préavis du Service cantonal vaudois de l'emploi (ci-après : SDE), a reconnu que les programmes organisés par le Centre de gestion des programmes d'occupation (devenu par la suite le CGPI) étaient des mesures du marché du travail donnant droit à une subvention du 1er janvier au 31 décembre 2002. Le SDE a obtenu du seco le renouvellement des subventions accordées au CGPI pour les années 2003 à 2005.

Le 16 décembre 2003, le Conseil d'Etat du canton de Vaud a conclu avec le CGPI un accord de prestations pour le développement et la mise à disposition de mesures du marché du travail et de mesures de réinsertion professionnelle de type "Emploi temporaire subventionné". Cet accord est entré en vigueur le 1er janvier 2004. Le 5 février 2005, un nouvel accord de prestations similaire au précédent a été conclu entre le Conseil d'Etat du canton de Vaud et le CGPI ; il est entré en vigueur le 1er janvier 2005.
A.b La Fondation X._______ est une fondation de droit privé, dont le siège est à Genève. Elle a pour but de venir en aide aux chômeurs et autres personnes ayant des difficultés d'insertion.

Pour la mise en oeuvre opérationnelle des programmes d'insertion, le CGPI a conclu avec la Fondation X._______ les 15 février 2002, 18 août 2003, 28 avril 2004 et 24 mars 2005 des contrats "de mise à disposition de personnel en emploi temporaire subventionné (ETS) LACI ou RMR" pour les années respectivement 2002, 2003, 2004 et 2005. Selon ces accords, la Fondation X._______ mettait sur pied un programme prédéfini annuellement pour l'accueil des personnes pouvant prétendre aux mesures relatives au marché du travail. Hormis le contrat relatif à l'année 2002, chaque autre accord prévoyait notamment le nombre total de jours d'occupation et de formation, un budget annuel, un montant minimal garanti et le montant des acomptes versés par le CGPI à la Fondation X._______.

B.
Procédure B-7849/2007
B.a En 2005, le SDE a confié à la société Y._______ SA (ci-après : la Fiduciaire) le mandat de contrôler les comptes des différents organisateurs de mesures relatives au marché du travail, dont la Fondation X._______. Le rapport établi par la Fiduciaire a amené le SDE à rendre le 20 janvier 2006 une décision par laquelle il a exigé de la Fondation X._______ le remboursement d'un montant de Fr. 864'327.90 pour l'année 2004, au titre de subventions pour des mesures relatives au marché du travail perçues indûment, en réservant une décision analogue pour les années 2002, 2003 et 2005.
B.b Conformément à l'indication des voies de droit contenue dans la décision entreprise, la Fondation X._______ (ci-après : la recourante) a porté la cause devant le Tribunal administratif du canton de Vaud par mémoire du 23 février 2006. Sur le fond, elle a conclu à l'annulation de la décision entreprise, à ce que le SDE soit débouté de toutes autres ou contraires conclusions et à ce que ce dernier soit condamné à tous les dépens de la procédure.

Sous l'angle formel, la recourante a fait valoir que les relations nouées avec le CGPI consistaient en un contrat de droit privé. Il n'existerait en revanche aucun rapport de droit public ni de droit privé entre la Fondation X._______ et le SDE légitimant ce dernier à exiger d'elle le remboursement d'un montant de Fr. 864'327.90. Dans ces conditions, la recourante a soutenu que la décision du SDE ne saurait déployer d'effets à son égard. En outre, en l'assujettissant sans autres aux dispositions de la loi et de l'ordonnance sur l'assurance-chômage en dehors de toute relation de droit public ou de droit privé, le SDE aurait fort mal interprété et appliqué la loi. Par ailleurs, la recourante a relevé que le SDE avait d'abord nié tout lien avec elle, puis, "par une volte-face", a décidé sans aucun fondement juridique de la rechercher en paiement d'une somme prétendument perçue de manière indue. En procédant ainsi, le SDE aurait violé le principe de la confiance. Pour ces motifs, la décision du SDE devrait être annulée.

Sous l'angle matériel et à titre subsidiaire, la recourante a exposé poste par poste "les raisons qui justifieraient que la décision du SDE du 20 janvier 2006 soit annulée car non fondée".
B.c Dans sa réponse du 21 avril 2006, le SDE a conclu au rejet du recours. Il a soutenu qu'en sa qualité d'autorité cantonale compétente, il procédait régulièrement à des contrôles visant à s'assurer que l'usage des subventions accordées soit conforme à la loi et aux directives de l'organe de compensation. S'il appert qu'un acteur du dispositif n'a pas respecté les dispositions légales et réglementaires de droit public auxquelles il serait soumis de facto en acceptant le mandat qui lui était confié, l'autorité lui notifierait toute décision visant à préserver les intérêts de l'Etat. L'existence ou non d'une relation contractuelle entre la Fondation X._______ et l'autorité inférieure ne serait pas déterminante, du moment que les dispositions légales et réglementaires s'appliquent aussi à la recourante.
B.d Le CGPI a également conclu, sous suite de dépens, au rejet du recours dans ses observations du 30 mai 2006.
B.e Dans ses observations complémentaires du 31 mai 2006, la recourante a confirmé ses conclusions.
B.f Statuant le 24 octobre 2006, le Tribunal administratif du canton de Vaud a partiellement admis le recours, dans la mesure où il était recevable et a annulé la décision querellée. Il a considéré en bref que, en ce domaine, la loi ne conférait pas de pouvoir de décision à l'autorité administrative.
B.g Par écritures du 23 novembre 2006, le SDE a formé un recours de droit administratif devant le Tribunal fédéral des assurances.

Par arrêt du 30 août 2007, le Tribunal fédéral a admis le recours en ce sens que le jugement du Tribunal administratif du canton de Vaud du 24 octobre 2006 est annulé et la cause transmise au Tribunal administratif fédéral comme objet de sa compétence.
B.h Le 26 septembre 2007, la Cour III du Tribunal administratif fédéral a repris le traitement du recours du 23 février 2006 comme objet de sa compétence sous la référence C-6318/2007 et a désigné le collège appelé à statuer.
B.i Dans ses observations du 23 novembre 2007, le SDE souligne notamment que tant le contrat conclu avec le CGPI que celui conclu entre la recourante et ce dernier relèvent du droit administratif. Dans ces conditions, le SDE pourrait demander la restitution des subventions perçues indûment par voie de décision.
B.j Egalement invitée à formuler ses observations, la Fondation X._______ confirme par pli du 30 novembre 2007 les conclusions formulées dans son recours du 23 février 2006 et reprend l'essentiel de l'argumentation développée dans ce dernier. Elle ajoute notamment que les versements perçus dans le cadre du contrat du 28 avril 2004 n'étaient pas constitués de subventions, seul le CGPI ayant bénéficié de celles-ci sur la base de l'accord distinct passé avec le SDE. Elle prétend en outre qu'elle n'est pas soumise au régime de la loi sur l'assurance-chômage, qu'elle n'a jamais conclu de contrat avec le SDE et que, dans ces circonstances, la décision attaquée ne pouvait déployer d'effets à son égard. Par ailleurs, l'assujettissement à la loi sur les subventions impliquerait préalablement une demande de subvention. Or, la recourante fait valoir qu'elle n'a jamais déposé une telle demande, de sorte qu'elle ne serait pas soumise à ce régime légal. Dans ces conditions, elle estime que le SDE était incompétent pour rendre la décision querellée.
B.k Par ordonnance du 28 décembre 2007, la Cour II du Tribunal administratif fédéral a annoncé que, dans le cadre des mesures de décharge de la Cour III dudit Tribunal, elle reprenait le traitement de la présente affaire sous la nouvelle référence B-7849/2007 et a désigné le nouveau collège appelé à statuer sur le fond de la cause.
B.l Par décision incidente du 29 février 2008, la recourante a notamment été invitée à verser une avance sur les frais de procédure présumés.

Sur requête de la recourante, le juge instructeur a annulé le 14 mars 2008 sa précédente décision incidente en tant qu'elle concerne le versement de l'avance sur les frais de procédure présumés.
B.m Par pli du 31 mars 2008, le SDE a déposé ses observations complémentaires. Il a repris l'essentiel de l'argumentation développée dans ses précédentes écritures.

C.
Procédure B-7850/2007
C.a Par décision du 14 mai 2007, le SDE a exigé de la Fondation X._______ la restitution d'un montant de Fr. 1'911'862.10 pour les années 2002 à 2005, au titre de subventions pour des mesures relatives au marché du travail perçues indûment.
C.b Conformément à l'indication des voies de droit contenue dans la décision entreprise, la Fondation X._______ a recouru le 13 juin 2007 contre cette décision auprès du Tribunal administratif du canton de Vaud en concluant, principalement, à son annulation, à ce que le SDE soit débouté de toutes autres ou contraires conclusions et condamné à tous les dépens de la procédure et, subsidiairement, à ce que la recourante soit acheminée à prouver par toutes voies de droit les faits allégués à l'appui de son recours. Pour motifs, la recourante reprend en substance l'argumentation développée dans ses observations du 30 novembre 2007 déposées dans le cadre de la procédure B-7849/2007 (cf. supra let. B.j).
C.c Par décision du 26 septembre 2007, le Tribunal administratif du canton de Vaud a transmis la cause au Tribunal administratif fédéral comme objet de sa compétence. La Cour III de ce dernier s'est dans un premier temps chargée de l'instruction de la cause sous la référence C-6972/2007.
C.d Par ordonnance du 28 décembre 2007, la Cour II du Tribunal administratif fédéral a annoncé que, dans le cadre des mesures de décharge de la Cour III dudit Tribunal, elle reprenait le traitement de la présente affaire sous la nouvelle référence B-7850/2007 et a désigné le collège appelé à statuer sur le fond de la cause.
C.e Par décision incidente du 29 février 2008, la recourante a notamment été invitée à verser une avance sur les frais de procédure présumés.

Sur requête de la recourante, le juge instructeur a annulé le 14 mars 2008 sa précédente décision incidente en tant qu'elle concerne le versement de l'avance sur les frais de procédure présumés.
C.f Invité à se prononcer sur le recours, le SDE en a proposé le rejet, avec suite de frais, dans sa réponse du 29 février 2008. Il a repris l'essentiel de l'argumentation développée dans le cadre de ses précédentes écritures.
C.g Dans sa réponse du 31 mars 2008, le CGPI a conclu, sous suite de dépens, au rejet du recours.

D.
Egalement invité à se déterminer sur les recours en sa qualité d'autorité spécialisée, le seco en a proposé le rejet dans ses observations du 26 juin 2008.

E.
Les parties n'ayant pas présenté de demande formelle pour des débats publics, il est admis qu'elles y ont renoncé tacitement.

Les arguments avancés de part et d'autre au cours de la présente procédure seront repris plus loin dans la mesure où cela se révèle nécessaire.
Droit :

1.
Le Tribunal administratif fédéral examine d'office et librement la recevabilité des recours qui lui sont soumis (ATAF 2007/6 consid. 1 ; ALFRED KÖLZ / ISABELLE HÄNER, Verwaltungsverfahren und Verwaltungsrechtspflege des Bundes, 2e éd., Zurich 1998, n° 410).

1.1 Sous réserve des exceptions prévues à l'art. 32 de la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal administratif fédéral (LTAF, RS 173.32), ce dernier connaît des recours contre les décisions au sens de l'art. 5 de la loi fédérale du 20 décembre 1968 sur la procédure administrative (PA, RS 172.021 ; art. 31 LTAF) prises par les autorités mentionnées aux art. 33 à 34 LTAF. En particulier, les décisions et les décisions sur recours du seco ainsi que les décisions de l'organe de compensation peuvent faire l'objet d'un recours devant le Tribunal administratif fédéral (art. 101 de la loi fédérale du 25 juin 1982 sur l'assurance-chômage [LACI, RS 837.0]).

En l'espèce, les actes attaqués sont des décisions au sens de l'art. 5 PA. Ils émanent d'une autorité au sens de l'art. 33 LTAF agissant sur la base d'une délégation de compétence de l'organe de compensation (voir sur ce point : ATF 133 V 536 consid. 4 ss). Le Tribunal administratif fédéral est donc compétent pour connaître des présents recours.

1.2 La recourante, qui a pris part aux procédures devant l'autorité inférieure, est spécialement atteinte par les décisions querellées et a un intérêt digne de protection à leur annulation ou à leur modification (art. 48 al. 1 PA). La qualité pour recourir doit dès lors lui être reconnue.

1.3 Les dispositions relatives à la représentation, aux délais de recours, à la forme et au contenu des mémoires de recours (art. 11, 50 et 52 al. 1 PA), ainsi que les autres conditions de recevabilité (art. 44 ss PA) sont respectées (concernant l'avance de frais [art. 63 al. 4 PA] voir : consid. 8.1).

Les recours sont donc recevables.

2.
Il y a lieu de réunir en une seule procédure et de trancher dans un seul arrêt des recours présentant une étroite unité dans le contenu de leur état de fait et dans lesquels se posent les mêmes questions de droit, une telle solution répondant à l'économie de procédure et étant dans l'intérêt de toutes les parties (ATF 131 V 461 consid. 1.2 ; arrêt du Tribunal administratif fédéral A-1476/2006 du 26 avril 2007 consid. 1.3 ; ANDRÉ MOSER, in Moser/Übersax, Prozessieren vor eidgenössischen Rekurskommissionen, Bâle 1998, ch. 3.12 p. 89).

En l'espèce, les recours concernent les mêmes parties et des faits de même nature et portent sur des questions matérielles semblables, soit de savoir si c'est à bon droit que l'autorité inférieure exige la restitution par la recourante de subventions prétendument perçues de manière indue pour les années 2002 à 2005. Il se justifie dès lors de joindre les causes et de statuer sur les recours dans un seul arrêt.

3.
3.1 Le chapitre 6 de la LACI institue des mesures relatives au marché du travail (MMT). Selon l'art. 59 al. 1 LACI, l'assurance alloue des prestations financières au titre des mesures relatives au marché du travail en faveur des assurés et des personnes menacées de chômage. Les prestations dont la restitution est demandée relèvent de la section 3 de ce chapitre, savoir les mesures d'emploi prévues aux art. 64a et 64b LACI. Sont réputés mesures d'emploi notamment les emplois temporaires qui entrent dans le cadre de programmes organisés par des institutions publiques ou privées à but non lucratif ; ces programmes ne doivent toutefois pas faire directement concurrence à l'économie privée (art. 64a al. 1 let. a LACI). L'assurance rembourse aux organisateurs les frais attestés indispensables à l'organisation de la mesure d'emploi. Elle peut moduler ce remboursement en fonction des résultats. Le Conseil fédéral règle les modalités (art. 64b al. 1 LACI).

3.2 Les prestations dont la restitution est demandée ont été allouées, par ailleurs, à titre de mesures collectives relatives au marché du travail au sens de l'art. 1 al. 3 LACI (art. 1 de l'ordonnance sur l'assurance-chômage du 31 août 1983 [OACI, RS 837.02]). Par opposition aux mesures individuelles, dont les bénéficiaires directs sont les assurés eux-mêmes, les mesures collectives sont accordées, sous la forme de subventions, à des institutions qui se voient confier l'exécution d'une mesure préventive en matière de chômage (THOMAS NUSSBAUMER, Arbeitslosenversicherung, in : Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], Soziale Sicherheit, 2e éd., n° 644 ; AGNÈS LEU, Die arbeitsarktlichen Massnahmen im Rahmen der Arbeitslosenversicherung in der Schweiz, Zurich 2005, p. 15).

4.
Sous l'angle formel, la recourante soutient d'abord que l'autorité inférieure n'était pas compétente pour prononcer les décisions querellées qui ne sauraient, de surcroît, produire d'effet à son égard. La recourante ne serait pas en relation contractuelle avec le SDE. Elle aurait conclu des contrats de droit privé avec le CGPI de sorte que les dispositions de la LACI, de l'OACI et de la loi sur les subventions du 5 octobre 1990 (LSu, RS 616.1) ne lui seraient pas opposables. Sous l'angle matériel, la recourante estime en bref que les décisions querellées sont mal fondées.

Il ressort de ce qui précède qu'il s'agit dans un premier temps d'examiner la nature juridique de la relation contractuelle nouée entre la Fondation X._______ et le CGPI - qualification qui permettra de déterminer si la Fondation X._______ est soumise à la LACI, à l'OACI et à la LSu -, avant de déterminer si le SDE est compétent pour exiger, par voie de décision, la restitution de subventions perçues prétendument de manière indue par la Fondation X._______. Dans l'affirmative, il conviendra d'établir si c'est à bon droit que le SDE réclame la restitution d'un montant total de Fr. 2'776'190.-.

5.
En droit suisse, le contrat de droit privé et le contrat de droit administratif se distinguent essentiellement par leur objet. Un contrat de droit administratif est ainsi un acte bilatéral dont l'objet est régi par le droit public (PIERRE MOOR, Droit administratif, vol. II, 2e éd., Berne 2002, p. 353 ; PIERRE TERCIER, Les contrats spéciaux, 3e éd., Zurich/Bâle/Genève 2003, n. 63). L'objet est constitué par celle des prestations échangées qui présente, du point de vue de la distinction à faire, une caractéristique particulière dont l'équivalent ne se rencontre d'habitude pas dans les contrats de droit privé. Il est régi par le droit public lorsque le contrat en cause s'intègre dans une activité proprement publique. Selon le Tribunal fédéral, une convention relève notamment du droit administratif lorsqu'elle met directement en jeu l'intérêt public, parce qu'elle a pour objet même une tâche d'administration publique ou une dépendance du domaine public (ATF 105 Ia 392 consid. 3 et les réf., ATF 103 Ia 31 consid. 2 ; voir également MOOR, op. cit., p. 363 ss).

En principe, un contrat de droit administratif lie un sujet de droit public avec un autre sujet de droit public ou un sujet de droit privé. Dans de rares cas, deux sujets de droit privé peuvent passer entre eux un contrat de droit administratif. Il suffit pour cela que l'un des contractants ait reçu la compétence d'appliquer à la prestation déterminante des règles de droit public (ATF 93 I 506 consid. 1, ATF 99 Ib 115 consid. 2). Il en va notamment ainsi du contrat d'expropriation lorsque l'expropriant est sujet de droit privé ou des cas de subventions prévues par le droit fédéral dont l'octroi est délégué à des tiers - celles octroyées par le Fonds national suisse (FNS) par exemple (art. 2 LSu ; Message du 15 décembre 1986 à l'appui d'un projet sur les aides financières et les indemnités, in : FF 1997 I 369, p. 381 ; MOOR, op. cit., p. 366 s.).

6.
En l'espèce, la relation contractuelle litigieuse est concrétisée par quatre contrats successifs de mise à disposition de personnel en emplois temporaires subventionnés LACI ou RMR. Ils ont été conclus par le CGPI, d'une part, et la recourante, d'autre part.

Il ressort de leur art. 1er que ces contrats sont conclus dans le cadre des mesures de création d'emplois temporaires subventionnés par l'assurance-chômage (ETS LACI pour les chômeurs en cours de droits) et l'Etat de Vaud (ETS RMR pour les chômeurs en fin de droits). Ils ont pour objet la mise à disposition, par le CGPI, de participants en ETS auprès de l'institution d'accueil. Selon l'art. 1.1 par. 2 des conditions générales de ces contrats, l'objectif prioritaire d'un emploi temporaire financé par l'assurance-chômage est de faciliter l'insertion ou la réinsertion des chômeurs dans le monde du travail ; l'objectif n'est donc pas la productivité des participants.

Les programmes convenus correspondaient, en 2003, à 11'000 jours d'occupation et 4'400 jours de formation, en 2004, à 11'200 jours d'occupation et 3'300 jours de formation et, en 2005, à 14'300 jours d'occupation et 3'600 jours de formation. Le budget annuel prévu était de Fr. 1'000'000.- (montant minimal garanti de Fr. 800'000.-) en 2003, de Fr. 1'100'000.- (montant minimal garanti de Fr. 900'000.-) en 2004 et de Fr. 1'310'000.- (montant minimal garanti de Fr. 1'000'000.-) en 2005. Le contrat relatif à l'année 2002 n'indiquait quant à lui aucune précision ni sous l'angle du nombre de jours des programmes ni sous celui des budgets.

6.1 Le CGPI - sujet de droit privé dont le but est d'intérêt public - est partie à deux accords de prestations avec l'Etat de Vaud pour le développement et la mise à disposition de mesures de marché du travail, l'un pour l'année 2004 et l'autre pour 2005. Ces accords sont des contrats de droit public (cf. art. 81d OACI). Le CGPI est un organisateur d'emplois temporaires subventionnés (art. 2 ch. 2 des accords). Selon leur art. 5, les accords s'appliquent aux bénéficiaires d'indemnités de chômage au sens de la loi sur l'assurance-chômage, aux demandeurs d'emploi inscrits auprès des Offices régionaux de placement et aux bénéficiaires du revenu minimum de réinsertion (RMR). Le SDE garantit le paiement des places commandées (art. 6 des accords). Selon l'art. 10 des accords, l'organisateur développe des mesures d'emploi temporaire et assure le suivi des participants. A cet effet, il acquiert des postes auprès d'institutions d'intérêt public ou en crée en développant des activités propres à l'emploi temporaire des demandeurs d'emploi. Il conclut un contrat de partenariat avec l'institution d'accueil. Ce contrat spécifie les conditions d'application des mesures et les conditions d'accueil des participants. L'organisateur informe l'institution d'accueil du cadre légal et des objectifs de l'emploi temporaire subventionné. L'art. 14 du premier accord et l'art. 16 du second prévoient que l'organisateur tient une comptabilité analytique, en distinguant clairement les frais donnant lieu à une subvention des autres, conformément à la circulaire établie par le seco au sujet des mesures relatives au marché du travail. Selon l'art. 17 du premier accord (art. 19 pour le second accord), une enveloppe budgétaire globale est allouée pour les frais de l'organisateur, au titre de la subvention. Le montant de l'enveloppe est de Fr. 7'830'000.- ; il porte sur l'organisation de 390 mesures relatives au marché du travail par an, correspondant à 85'800 jours d'occupation au prix de Fr. 91.25 l'unité (art. 16 du premier accord). L'art. 18 du second accord prévoit pour sa part à son alinéa 3 que l'enveloppe budgétaire de l'organisateur pour l'organisation de 55 places-années auprès de la Fondation X._______ (projet spécifique) est fixée à Fr. 1'310'000.-, correspondant à 14'300 jours de mesure au prix de Fr. 91.60 par jour, y compris un taux de formation intégrée de 25 %. Le SDE verse à l'organisateur un montant allant jusqu'à 80 % de celui de l'enveloppe sous forme d'acomptes, le solde après réception de la facture finale, mais au plus tôt le 1er janvier de l'année suivante (art. 17 al. 2, respectivement 19 al. 2 et 3, des accords).

6.2 Il ressort manifestement des considérants qui précèdent que la prestation déterminante des contrats litigieux est une tâche d'intérêt public consistant en la mise sur pied de mesures d'emploi temporaire en vue de l'insertion et de la réinsertion professionnelle des chômeurs. Le CGPI a reçu de l'Etat de Vaud la compétence d'appliquer à cette prestation des règles de droit public par l'intermédiaire des accords de prestations mentionnés plus avant. Les contrats litigieux doivent par conséquent être soumis aux règles du droit public (voir dans le même sens : ATF 128 III 250 consid. 2 commenté par YVO HANGARTNER in : Pratique juridique actuelle [PJA] 2002 p. 1497). De surcroît, même si la recourante n'a pas formellement demandé des subventions, ces contrats portent également sur l'octroi de telles aides financières, tel que cela ressort clairement de leur titre mais également de leur contenu. Or, les subventions sont des prestations qui, de par leur nature, relèvent du droit public, qu'elles soient allouées par acte administratif ou, comme en l'espèce, par contrat (ATF 105 Ia 392 consid. 3 et les réf. ; voir également : art. 19 ss LSu en relation avec l'art. 2 LSu). C'est donc à tort que la recourante prétend que les dispositions de droit public prévues par la LACI, l'OACI et la LSu ne lui sont pas opposables.

7.
Il convient encore d'examiner si l'autorité inférieure avait la compétence pour exiger la restitution des subventions litigieuses par voie de décision.

7.1 Comme nous venons de le voir, les subventions litigieuses ont été allouées à la recourante par des contrats de droit administratif conclus avec le CGPI. Ces contrats n'ont pas pour partie le SDE ; ils ne prévoient d'ailleurs aucun rôle pour ce dernier.

Il est vrai que, selon l'art. 8 de l'accord du 16 décembre 2003 conclu entre le CGPI et le SDE, ce dernier contrôle la réalisation des mesures et l'occupation des places commandées et se réserve le droit de vérifier à tout moment la comptabilité de l'organisateur. Il n'en demeure pas moins que cet accord - tout comme celui du 4 février 2005 - distingue clairement l'organisateur (le CGPI) des institutions d'accueil comme la recourante. Aussi, le SDE n'a pas, selon l'accord du 16 décembre 2003, de pouvoir de vérification directe desdites institutions. En outre, même si l'autorité inférieure se réservait le droit de vérifier la comptabilité des institutions d'accueil, comme le permet d'ailleurs l'art. 8 de l'accord de prestations du 4 février 2005, le chapitre 6 des deux accords, intitulé "Règlement en cas de litige", n'indique en aucun cas que dite autorité puisse agir directement contre une institution d'accueil qui ne respecterait pas ses obligations. Seul l'organisateur est en effet visé.

De surcroît, l'art. 10 de ces accords stipule notamment que le CGPI doit vérifier le respect par l'institution d'accueil des conditions d'application des mesures du marché du travail et des conditions d'accueil des participants. C'est dire qu'il appartient au CGPI - qui a reçu du SDE la compétence de conclure des contrats de droit administratif avec la recourante - d'exiger la restitution des prestations financières que la recourante aurait perçues de manière indue.

7.2 S'il est vrai que le CGPI est compétent pour réclamer la restitution des prestations litigieuses, il n'en reste pas moins qu'il n'a aucun pouvoir de décision. Cependant, le litige repose sur un problème d'exécution de contrats de droit public.

Or, aux termes de l'art. 35 let. a LTAF, le Tribunal administratif fédéral connaît par voie d'action en première instance des contestations qui reposent sur des contrats de droit public signés par la Confédération, ses établissements, ses entreprises ou par des organisations visées par l'art. 33 let. h. Cette dernière disposition vise les autorités ou organisations extérieures à l'administration fédérale, pour autant qu'elles statuent dans l'accomplissement de tâches de droit public que la Confédération leur a confiées.

En l'espèce, il ressort des considérants qui précèdent que le SDE a reçu de l'Organe de compensation la compétence de statuer sur les demandes de subventionnement des mesures collectives de formation ou d'emploi et que, conformément à l'art. 81d OACI, le SDE a lui-même confié par contrat au CGPI la tâche de distribuer des subventions aux institutions d'accueil. C'est dire qu'il peut être admis que le CGPI doit être considéré comme une organisation visée par l'art. 33 let. h LTAF. En conséquence, il lui appartient d'exiger par une action auprès du Tribunal de céans la restitution des prestations financières que la recourante aurait perçues de manière indue (sur l'action au Tribunal administratif fédéral, voir arrêt B-7957/2007 du 4 novembre 2008 consid. 4.2 s. et les réf.).

8.
Il suit déjà de ce qui précède que les recours formés par la Fondation X._______ doivent être admis. Dans ces conditions, point n'est donc besoin d'examiner les autres griefs de la recourante. Partant, les décisions du SDE des 20 janvier 2006 et 14 mai 2007 doivent être annulées.

8.1 En règle générale, les frais de procédure comprenant l'émolument judiciaire et les débours sont mis à la charge de la partie qui succombe (art. 63 al. 1 PA et art. 1 al. 1 du règlement du 21 février 2008 concernant les frais, dépens et indemnités fixés par le Tribunal administratif fédéral [FITAF, RS 173.320.2]). Aucun frais de procédure n'est mis à la charge des autorités inférieures, ni des autorités fédérales recourantes et déboutées (art. 63 al. 2 PA).

Dans ses décisions incidentes du 14 mars 2008, le juge instructeur avait renoncé à percevoir les avances sur les frais de procédure présumés. Il avait en outre annoncé que la question de savoir s'il convenait de prendre une nouvelle décision sur dites avances serait tranchée ultérieurement. Cependant, au vu de l'issue de la procédure, la Cour de céans a exceptionnellement renoncé à percevoir lesdites avances de frais afin d'éviter les coûts inutiles qu'aurait engendré leur remboursement.

8.2 L'autorité de recours peut allouer, d'office ou sur requête, à la partie ayant entièrement gain de cause une indemnité pour les frais indispensables et relativement élevés qui lui ont été occasionnés (art. 64 al. 1 PA et art. 7 ss FITAF). Les dépens comprennent les frais de représentation et les éventuels autres frais nécessaires de la partie (art. 8 FITAF).

En l'espèce, la recourante n'a pas présenté de note de frais. Sur la base du dossier (art. 14 al. 2 FITAF), les dépens sont dès lors équitablement fixés à Fr. 2'500.- (TVA comprise) et mis à la charge du SDE qui succombe.

Compte tenu de l'issue de la procédure, il n'est pas alloué de dépens au CGPI.

Par ces motifs, le Tribunal administratif fédéral prononce :

1.
Il est procédé à la jonction des causes.

2.
Les recours sont admis. Partant, les décisions du Service cantonal vaudois de l'emploi des 20 janvier 2006 et 14 mai 2007 sont annulées.

3.
Il n'est pas perçu de frais de procédure.

4.
Une somme de Fr. 2'500.- (TVA comprise), mise à la charge du Service cantonal vaudois de l'emploi, est allouée à la Fondation X._______ à titre de dépens.

5.
Il n'est pas alloué de dépens au Centre de gestion des programmes d'insertion.

6.
Le présent arrêt est adressé :
à la recourante (Acte judiciaire ; annexe : observations du seco)
à l'autorité inférieure (n° de réf. PS.2006.0043 RZ ; Acte judiciaire ; annexe : observations du seco)
à l'autorité concernée (Acte judiciaire ; annexe : observations du seco)
au Département fédéral de l'économie (Acte judiciaire)
au Secrétariat d'Etat à l'économie
au Tribunal administratif du canton de Vaud

Le président du collège : Le greffier :

Bernard Maitre Olivier Veluz

Indication des voies de droit :
La présente décision peut être attaquée devant le Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par la voie du recours en matière de droit public, dans les trente jours qui suivent la notification (art. 82 ss, 90 ss et 100 de la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral [LTF, RS 173.110]). Le mémoire doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, les motifs et les moyens de preuve, et être signé. La décision attaquée et les moyens de preuve doivent être joints au mémoire, pour autant qu'ils soient en mains de la partie recourante (voir art. 42 LTF).
Expédition : 26 novembre 2008
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