Bundesverwaltungsgericht
Tribunal administratif fédéral
Tribunale amministrativo federale
Tribunal administrativ federal

Cour I
A-681/2009
{T 0/2}

Arrêt du 14 janvier 2010

Composition
Jérôme Candrian, président du collège, Marianne Ryter Sauvant, Markus Metz, juges,
Yanick Felley, greffier.

Parties
A.______, représenté par Mes Alain Ribordy et Caroline Wiman, avocats,
recourant,

contre

Office fédéral de la justice OFJ,
autorité inférieure.

Objet
Protection des données (en matière de casier judiciaire).

Faits :

A.
Il ressort des pièces du dossier que, le 18 mai 2004, A.______ a été condamné par le juge unique du Gerichtskreis X.______ à une amende de Fr. 500.- pour rixe, au sens de l'art. 133 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP, RS 311). En application du droit alors en vigueur, un délai d'épreuve d'un an lui a été imposé pour que le jugement puisse être radié du casier judiciaire (art. 49 ch. 4 aCP [RO 1971 777, 807]). Ce jugement a été radié à l'expiration du délai d'épreuve, comme en atteste un extrait du casier judiciaire délivré à A.______, le 20 septembre 2005.

B.
Selon jugement du 30 septembre 2005 rendu par le Juge de Police de l'arrondissement de Y.______, A.______ a été reconnu coupable de violation grave des règles de la circulation routière et de violation des devoirs en cas d'accident, infractions commises le 15 août 2004, et condamné à 7 jours d'emprisonnement avec sursis pendant trois ans, au sens des art. 90 ch. 2 et 92 ch. 1 de la loi fédérale du 19 décembre 1958 sur la circulation routière (LCR, RS 741.01).

Ce second jugement a été enregistré dans le casier judiciaire informatisé, le 16 novembre 2005. La violation grave des règles de la circulation routière ayant été commise durant le délai d'épreuve fixé par le premier jugement du 18 mai 2004, le casier judiciaire informatisé a généré un avis de récidive à l'intention de l'autorité cantonale de coordination compétente. Suite à cet avis, l'autorité de coordination du canton de X.______ a annulé, le 17 novembre 2005, la radiation du premier jugement, ainsi que cela ressort de l'extrait du casier judiciaire destiné à des particuliers, établi le 29 novembre 2005.

C.
En octobre, puis en novembre 2008, A.______, par l'intermédiaire de son mandataire, a demandé à l'Office fédéral de la justice (OFJ) que le jugement rendu le 18 mai 2004 par le juge unique du Gerichtskreis X.______ n'apparaisse plus sur son extrait du casier judiciaire, ou, en cas de refus, à ce que mention soit faite sur cet extrait que les données qui y figurent sont litigieuses, conformément à l'art. 25 al. 2 de la loi fédérale du 19 juin 1992 sur la protection des données (LPD, RS 235.1).

D.
Par décision du 16 décembre 2008, l'OFJ a, d'une part, rejeté la demande tendant à ce que le jugement rendu le 18 mai 2004 par le juge unique du Gerichtskreis X.______ ne figure plus sur l'extrait du casier judiciaire destiné à des particuliers ; et a, d'autre part, rejeté la demande tendant à ce que soit établi, conformément à l'art. 25 al. 2 LPD, un extrait du casier judiciaire mentionnant que les données y contenues sont litigieuses.

E.
E.a En date du 2 février 2009, A.______ (ci-après le recourant) a formé recours contre la décision du 16 décembre 2008 de l'OFJ (ci-après l'autorité inférieure) auprès du Tribunal administratif fédéral. Il conclut, sous suite de frais et dépens, à l'annulation de la décision attaquée ; à ce que la « décision d'annulation de la radiation du jugement pour rixe du 17 novembre 2005 du casier judiciaire de Soroosh Saiedi Moghaddam [soit] annulée » ; à ce que « l'inscription ''échec de la mise à l'épreuve'' » introduite dans son casier judiciaire soit supprimée ; et à ce qu'un extrait du casier judiciaire vierge de toute inscription lui soit délivré. Il estime, en substance, que l'annulation de la radiation a été prononcée en violation de son droit d'être entendu et du droit de fond applicable.

E.b Par la même écriture, le recourant a requis du Tribunal de céans, à titre de mesure provisionnelle urgente, que l'autorité inférieure soit astreinte à lui délivrer « jusqu'au 15 février 2009 au plus tard, un extrait de son casier judiciaire comportant la mention que les données y figurant sont litigieuses ». Le recourant justifiait l'urgence de sa requête par le fait qu'il avait besoin d'obtenir très rapidement un renouvellement de son permis de port d'arme, lequel lui était nécessaire pour son emploi d'agent de sécurité ; or, tant que l'inscription litigieuse figurerait telle quelle dans son casier judiciaire, il n'obtiendrait pas ce permis, et ne pourrait par conséquent pas conserver son emploi.
E.c Par décision incidente du 13 février 2009, le Tribunal administratif fédéral a rejeté la requête de mesures provisionnelles du recourant, en précisant qu'il serait statué sur les frais et les dépens dans la décision au fond.

F.
Dans sa réponse au fond du 30 mars 2009, l'autorité inférieure a conclu au rejet du recours. Le recourant et l'autorité inférieure ont formulé leurs observations finales, respectivement les 13 juillet et 19 août 2009. La cause a ensuite été gardée à juger et les parties en ont été informées.

G.
Les autres faits et arguments seront repris si besoin dans les considérants en droit ci-après.
Droit :

1.
1.1 Le Tribunal administratif fédéral est compétent pour connaître des recours contre les décisions, au sens de l'art. 5 de la loi fédérale du 20 décembre 1968 sur la procédure administrative (PA, RS 172.021), prises par les départements fédéraux et les unités de l'administration fédérale qui leur sont subordonnées ou administrativement rattachées (art. 33 let. d de la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal administratif fédéral [LTAF, RS 173.32]). La procédure devant le Tribunal administratif fédéral est régie par la PA, pour autant que la LTAF n'en dispose pas autrement (art. 37 LTAF).

L'Office fédéral de la justice (OFJ) est une unité de l'administration fédérale centrale (cf. annexe de l'ordonnance du 25 novembre 1998 sur l'organisation du gouvernement et de l'administration [OLOGA, RS 172.010.1] par renvoi de son art. 6 al. 4). L'acte attaqué satisfait en outre aux conditions prévalant à la reconnaissance d'une décision au sens de l'art. 5 PA, et ne rentre pas dans le champ d'exclusion de l'art. 32 LTAF. Le Tribunal administratif fédéral est donc en principe compétent pour connaître du litige.

1.2 Déposé en temps utile (art. 50 al. 1 PA) et dans les formes prescrites (art. 52 al. 1 PA), par le destinataire de la décision attaquée qui a un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification (art. 48 PA), le recours s'avère ainsi recevable.

2.
Les arguments invoqués au débat par les parties sont essentiellement d'ordre juridique et peuvent être saisis comme il suit.

2.1 Dans la décision en recours, l'autorité inférieure se réfère au ch. 3 al. 1 des dispositions transitoires de la modification du Code pénal suisse du 13 décembre 2002 (DT CP, RO 2006 3459, 3534), entrée en vigueur le 1er janvier 2007. Ce ch. 3 al. 1 DT CP prévoit que les dispositions du nouveau droit relatives au casier judiciaire (art. 365 à 371 CP) s'appliquent également aux jugements prononcés en vertu de l'ancien droit. A cet égard, l'autorité inférieure retient que le jugement du 15 août 2004 n'a pas été radié en vertu de l'ancien droit, puisque la radiation avait été annulée en vertu de ce droit. Elle ajoute que, conformément à l'art. 49 al. 4 ch. 2 aCP, la radiation de la condamnation à l'amende était ordonnée d'office par l'autorité cantonale compétente, et qu'une décision judiciaire n'était pas nécessaire pour cela. La décision d'annuler la radiation est une décision ultérieure intervenue sous l'ancien droit. En conséquence, lors de l'application du nouveau droit, il y avait bien inscription au casier judiciaire. Or, poursuit l'autorité inférieure, par analogie avec l'art. 371 al. 3bis CP, les jugements qui ont prononcé, en vertu de l'ancien droit, des amendes assorties d'un délai de mise à l'épreuve pour la radiation (mais qui n'ont pas été radiés en vertu de ce droit-là) n'apparaissent plus sur l'extrait du casier judiciaire destiné à des particuliers si le condamné a subi la mise à l'épreuve avec succès. En l'espèce, l'autorité inférieure constate qu'il y a eu échec de la mise à l'épreuve (cf. art. 46 al. 1 CP), et que, par voie de conséquence, c'est la règle des deux tiers de la durée déterminante pour l'élimination de l'inscription (art. 371 al. 3 CP) qui doit être retenue ; or, selon l'art. 369 al. 3 CP, cette durée est de dix ans.

L'autorité inférieure a encore précisé qu'il fallait considérer que, d'une part, le second extrait du 29 novembre 2005 destiné aux particuliers avait été envoyé directement à l'employeur du recourant, la société Securitas ; et que, d'autre part, l'extrait établi en septembre 2005 et produit par le recourant était encore vierge. Il y avait ainsi tout lieu, selon l'autorité inférieure, de supposer que le recourant avait été interpellé par son employeur de l'époque à propos du contenu du nouvel extrait et en avait effectivement eu connaissance. Le recourant n'aurait donc plus un intérêt légitime à invoquer la violation du droit d'être entendu, dès lors que l'annulation de la radiation lui était connue depuis fin novembre 2005, et qu'il a attendu que le nouveau droit entre en vigueur pour former recours. L'on peut même se demander, ajoute l'autorité inférieure, s'il n'y a pas abus de droit de sa part, dans la mesure où il n'existe plus de possibilité de prendre une décision formelle d'annuler ultérieurement une radiation.

2.2 De son côté, le recourant oppose différents moyens pour contester les arguments qui ont abouti à la décision attaquée. Il se plaint d'abord de ne pas s'être vu notifier l'annulation du 17 novembre 2005 de la radiation du jugement pour rixe du 18 mai 2004. A ses dires, à fin 2005, il n'a pas eu connaissance de l'extrait du 29 novembre 2005, celui-ci ayant été envoyé directement au chef du personnel de Securitas. Il invoque ensuite que, radiée en vertu de « l'ancien Code pénal », cette inscription ne doit plus apparaître dans les extraits du casier judiciaire destinés aux particuliers, « conformément au chiffre 3 alinéa 3 des dispositions finales de la modification du CP du 13 décembre 2002 » ; qu'en effet, selon le nouveau droit, « plus aucune décision ultérieure d'annulation d'une radiation ne peut être prise » ; et que, partant, le maintien de l'inscription, faute de base légale, viole sa liberté économique.

2.3 Le présent litige revient donc à déterminer, en premier lieu, si, faute de notification de l'annulation de la radiation au recourant, le droit d'être entendu de celui-ci a été respecté ; ensuite, si l'autorité inférieure a considéré à juste titre que le jugement rendu le 18 mai 2004 par le juge unique du Gerichtskreis VIII X.______ pouvait encore figurer sur l'extrait du casier judiciaire destiné à des particuliers ; et, enfin, si cette inscription viole l'art. 27 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst., RS 101), qui garantit la liberté économique.

3.
Le droit d'être entendu, garanti par l'art. 29 al. 2 Cst. et l'art. 35 PA, s'impose en priorité à l'examen de l'autorité de recours. En effet, en raison de son caractère formel, sa violation entraîne en principe l'admission du recours ainsi que l'annulation de la décision attaquée, indépendamment des chances de succès au fond (cf. ATF 127 V 431 consid. 3d/aa; arrêt du Tribunal administratif fédéral A-8480/2007 du 6 juillet 2009 consid. 3.1).

En l'occurrence, comme l'admet elle-même l'autorité inférieure, il n'est pas dûment établi que le recourant ait eu connaissance de l'annulation de la radiation en fin d'année 2005. L'examen du moyen y afférent, pris de la violation du droit d'être entendu, ne peut toutefois être abordé ici qu'après l'examen des moyens liés au fond de la cause (cf. consid. 4.4 ci-après).

4.
Le litige au fond touche à la fois le droit pénal et le droit administratif. Il incombe d'en analyser de manière conjuguée les dispositions pertinentes.

4.1 Dans l'espèce, lors de l'annulation au casier judiciaire, le 17 novembre 2005, de la radiation de la condamnation du 18 mai 2004, les réglementations s'y rapportant se trouvaient aux anciens art. 359 à 364 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (aCP, RS 311), en vigueur depuis le 1er janvier 2000 (RO 1999 3505, 3508) jusqu'au 31 décembre 2006 (RO 1999 3459, 3535). Elles ont été abrogées au 1er janvier 2007, par les art. 365 à 371 CP actuels (RO 2006 3459, 3522, 3534).
Selon l'art. 359 aCP, l'Office fédéral de la justice (OFJ) gère, en collaboration avec d'autres autorités fédérales et les cantons (art. 360bis al. 1 CP), un casier judiciaire informatisé contenant des données sensibles et des profils de la personnalité relatifs aux condamnations ainsi que des données sensibles et des profils de la personnalité relatifs aux demandes d'extrait du casier judiciaire déposées dans le cadre d'enquêtes pénales en cours. Selon l'art. 360 al. 2 aCP, sont notamment inscrits au casier les condamnations prononcées pour crime ou délit (let. a), la mention du sursis (let. d) et les faits qui entraînent une modification des inscriptions (let. e). Conformément à l'art. 360bis al. 1 aCP, intitulé « Traitement et consultation des données », les données personnelles relatives aux condamnations sont traitées, entre autres, par l'OFJ (let. a), les autorités de poursuite pénale (let. b), les autorités d'exécution des peines (let. d) et les services de coordination des cantons (let. e).

L'actuel art. 367 al. 1 CP a le même contenu que l'art. 360bis al. 1 aCP précité. Il résulte de la disposition actuelle que les données personnelles relatives aux condamnations sont traitées, entre autres, par l'OFJ (l'art. 367 al. 1 CP let. a), les autorités de poursuite pénale (let. b), les autorités d'exécution des peines (let. d) et les services de coordination des cantons (let. e). En l'espèce, la décision en recours a été rendue par l'OFJ dans une procédure administrative de première instance, ce qui rend la LPD applicable, sachant au demeurant qu'il n'y a pas de procédure pénale pendante (cf. art. 2 al. 2 let. c LPD).

4.2 Les informations consignées dans le casier judiciaire contiennent « évidemment des données sensibles et des profils de la personnalité. Une base légale formelle s'avère donc nécessaire pour procéder à leur traitement » (Message du Conseil fédéral, du 17 septembre 1997, concernant la création et l'adaptation de bases légales applicables aux registres des personnes [FF 1997 IV 1149, 1151]). A teneur de son article 2 alinéa 1er, la LPD régit le traitement de données concernant des personnes physiques et morales effectué par des personnes privées (let. a) ou des organes fédéraux (let. b). Sont des « données personnelles (données) », toutes les informations qui se rapportent à une personne identifiée ou identifiable (art. 3 let. a LPD). Par « traitement », l'on entend « toute opération relative à des données personnelles - quels que soient les moyens et procédés utilisés - notamment la collecte, la conservation, l'exploitation, la modification, la communication, l'archivage ou la destruction de données » (art. 3 let. e LPD). C'est à ce traitement que se réfèrent notamment les art. 360bis al. 1 aCP et 367 al. 1 CP.

4.3 Inscrite au casier judiciaire le 17 novembre 2005 par l'autorité de coordination du canton de X.______ en application des articles précités, l'annulation de la radiation de la condamnation du 18 mai 2004 constituait alors clairement un traitement de données personnelles, au sens de l'art. 3 let. a et e LPD. Cette inscription constituait une mesure administrative d'exécution d'un jugement pénal ayant acquis force de chose jugée. De là, la LPD était bien applicable (cf. art. 2 al. 2 let. c LPD). Reste à déterminer si ce traitement a rang de décision, au sens de l'art. 5 PA, et aurait de la sorte dû être communiqué au recourant (art. 34 al. 1 PA).

5.
5.1 L'art. 5 PA définit la décision, au sens matériel, comme une mesure prise dans un cas d'espèce, fondée sur le droit public fédéral et ayant pour objet de créer, de modifier ou d'annuler des droits ou des obligations (al. 1 let. a) ; de constater l'existence, l'inexistence ou l'étendue de droits ou d'obligations (al. 1 let. b) ; de rejeter ou de déclarer irrecevables des demandes tendant à créer, modifier, annuler ou constater des droits ou obligations (al. 1 let. c). La décision en tant qu'acte matériel a ainsi pour objet de régler une situation juridique, c'est-à-dire de déterminer les droits et les obligations de sujets de droit ; c'est en ce sens qu'elle crée, supprime, modifie ou constate des droits ou obligations (sur la notion de décision, cf. Pierre Moor, Droit administratif, Volume II, X.______ 2002, p. 156 et p. 214). Un simple renseignement donné par l'autorité ne constitue pas une décision (cf. Moor, op. cit., p. 156 et les réf. citées).

Au sens formel, la décision est définie aux art. 34 et 35 PA : il s'agit dans la règle d'un acte écrit, soumis à notification, désigné comme tel, motivé et comportant l'indication de voies de droit.

Lorsqu'il s'agit de qualifier un acte de décision, il importe peu que celle-ci soit désignée comme telle ou qu'elle en remplisse les conditions formelles, ainsi qu'elles sont fixées par la loi (cf. ATF 133 II 450 consid. 2.1; arrêts du Tribunal administratif fédéral A-8595/2007 du 21 avril 2008 consid. 2, A-2040/2006 du 17 avril 2007 consid. 2.2). Est bien plutôt déterminant le fait qu'elle revête les caractéristiques structurelles d'une décision (cf. Pierre Tschannen/Ulrich Zimmerli, Allgemeines Verwaltungsrecht, 2ème éd., X.______ 2005, § 29 ch. 3), ceci indépendamment de la volonté de l'autorité ou de celle de l'administré (cf. arrêts du Tribunal administratif fédéral A-8595/2007 du 21 avril 2008 consid. 4.2, A-2040/2006 du 17 avril 2007 consid. 2.2.3). Il doit donc s'agir d'un acte de souveraineté individuel adressé à un particulier, par lequel un rapport de droit administratif concret, formant ou constatant une situation juridique, est réglé de manière obligatoire et contraignante. Les effets doivent se déployer directement tant à l'égard des autorités qu'à celui du destinataire de la décision (cf. Benoît Bovay, Procédure administrative, X.______ 2000, p. 253; Ulrich Häfelin/Georg Müller/Felix Uhlmann, Allgemeines Verwaltungsrecht, 5e éd., Zurich/Bâle/Genève 2006, ch. 854 ss).

5.2 Selon la définition consacrée à l'art. 3 let. e LPD, un traitement de données n'est, littéralement, pas une décision, mais une opération (cf. consid. 4.2 ci-devant). Il s'agit d'une opération manuelle ou électronique qui permet de créer, alimenter, exploiter ou détruire un fichier (cf. Message du Conseil fédéral du 17 septembre 1997 précité [FF 1997 IV 1149, 1151]). A cet égard, selon le Message du Conseil fédéral du 23 mars 1988 concernant la protection des données, « il s'agit de faire en sorte que la personne concernée soit à même de se rendre compte, dans une certaine mesure, que ses données font l'objet d'un traitement. Dans cette optique, les maîtres de fichiers sont tenus de renseigner toute personne qui en ferait la demande sur les données la concernant qui sont contenues dans le fichier et sur la gestion de ce même fichier » (FF 1988 II 421, 441). La volonté des auteurs de la LPD était ainsi clairement d'éviter que les autorités doivent notifier à l'administré une décision chaque fois qu'une autorité traite une donnée le concernant.

5.3 Aujourd'hui consacré à l'art. 370 al. 1 CP, le droit de toute personne de consulter dans son intégralité l'inscription qui la concerne était par ailleurs déjà, lors de l'introduction de l'art. 370 CP le 1er janvier 2007 (RO 2006 3459, 3526), un principe qui faisait « l'unanimité » (cf. Message du Conseil fédéral du 21 septembre 1998 concernant la modification du code pénal suisse (dispositions générales, entrée en vigueur et application du code pénal) et du code pénal militaire ainsi qu'une loi fédérale régissant la condition pénale des mineurs [FF 1999 1787, 1976]).

D'après l'art. 363 al. 2, 1ère phrase aCP, applicable le 17 novembre 2005 lors de l'annulation de la radiation ici concernée, aucun extrait du casier n'était délivré aux particuliers, mais chacun avait le droit de se faire délivrer des extraits de son propre casier. Cette disposition est actuellement exprimée à l'art. 371 al. 1 CP. L'art. 27 de l'ordonnance du 1er décembre 1999 sur le casier judiciaire informatisé (RO 1999 3509, 3520) précisait que toute personne pouvait consulter l'intégralité des enregistrements la concernant (al. 1) ; les renseignements étaient fournis oralement, aucun document écrit concernant les enregistrements n'étant délivrés (al. 3). Depuis le 1er janvier 2007, date de l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 29 septembre 2006 sur le casier judiciaire (ordonnance VOSTRA, RS 331), toute personne peut demander à l'OFJ si une inscription la concernant est enregistrée dans VOSTRA ; les renseignements sont fournis oralement au guichet ; si la personne est enregistrée, elle peut consulter au guichet un extrait complet contenant toutes les inscriptions ; ce document écrit ne peut toutefois pas lui être délivré (art. 26 al. 2 et 3 de l'ordonnance VOSTRA).

La non-délivrance d'une copie de l'intégralité de l'inscription concernant une personne au casier judiciaire, consacrée par l'actuel art. 370 al. 2 CP, a pour but d'éviter que soient obtenues par ce biais des données qui, en application de l'actuel art. 371 CP, ne peuvent pas figurer sur l'extrait du casier judiciaire la concernant. Cette disposition est conforme à la législation sur la protection des données. Celle-ci confère en effet le droit d'accès de chacun à toutes les données qui le concernent (art. 8 al. 2 LPD), mais autorise les services compétents à ne pas communiquer par écrit les renseignements demandés (art. 8 al. 5, 2ème phrase LPD) (cf. Message du Conseil fédéral du 21 septembre 1998 précité [FF 1999 1787, 1977]).

5.4 Compte tenu de ce qui précède, le maître du fichier n'a ainsi jamais eu l'obligation de communiquer d'office au recourant l'annulation de la radiation du jugement du 18 mai 2004. Il incombait à ce dernier de demander au maître du fichier de pouvoir consulter l'inscription au casier judiciaire qui le concernait après sa condamnation du 30 septembre 2005. Du reste, selon l'art. 7a LPD, entré en vigueur le 1er janvier 2008 (RO 2007 4983, 4985), lorsque les données ne sont pas collectées auprès de la personne concernée, le maître du fichier n'est pas tenu d'informer celle-ci, si, comme en l'espèce, l'enregistrement est expressément prévu par la loi (art. 7a al. 4 let. a LPD).

Dès lors, le traitement de données résultant de l'annulation d'une radiation de jugement ne confère en soi aucun droit ni obligation. Il ne saurait, autrement dit, être considéré comme une décision. Il s'ensuit que la non-communication au recourant de l'annulation de la radiation, du 17 novembre 2005, était matériellement de bon droit, et n'est en rien venue violer le droit d'être entendu de ce dernier.

Le recours doit ainsi être déclaré mal fondé sur ces points.

6.
Il s'agit à présent d'examiner si l'inscription litigieuse ne doit plus apparaître dans les extraits destinés aux particuliers, conformément au chiffre 3 alinéa 3 DT CP invoqué par le recourant.
6.1
6.1.1 D'après le ch. 3 al. 1 DT CP, les dispositions du nouveau droit relatives au casier judiciaire (art. 365 à 371 CP) s'appliquent également aux jugements prononcés avant le 1er janvier 2007. Le ch. 3 al. 3 DT CP dispose toutefois que les inscriptions radiées en vertu de l'ancien droit n'apparaissent plus dans les extraits du casier judiciaire destinés aux particuliers.

A cet égard, le législateur n'a jamais eu l'intention ni de limiter les pouvoirs des autorités chargées de la poursuite pénale ni de favoriser les condamnés. Le but du ch. 3 de l'al. 3 DT CP précité est bien plutôt de faire en sorte que les inscriptions radiées selon les art. 359 à 364 aCP - en vigueur depuis le 1er janvier 2000 (RO 1999 3505, 3508) jusqu'au 31 décembre 2006 (RO 1999 3459, 3535) - continuent, sous l'empire du nouveau droit, de ne pas apparaître dans les extraits délivrés à des particuliers (cf. Message du Conseil fédéral du 29 juin 2005 relatif à la modification du code pénal dans sa version du 13 décembre 2002 et du code pénal militaire dans sa version du 21 mars 2003, [FF 2005 4425, 4460]).
6.1.2 Selon l'art. 49 ch. 4, 1ère phrase aCP (RO 1971 777, 807), un jugement pouvait ordonner que la condamnation à l'amende soit, à certaines conditions, radiée du casier judiciaire, si le condamné n'avait pas encouru de condamnation pour une infraction commise pendant un délai d'épreuve d'un à deux ans fixé par le juge. Ces inscriptions demeuraient dans le casier judiciaire, mais n'apparaissaient plus dans les extraits délivrés à des particuliers (cf. Message du Conseil fédéral du 21 septembre 1998 concernant la modification du code pénal suisse (dispositions générales, entrée en vigueur et application du code pénal) et du code pénal militaire ainsi qu'une loi fédérale régissant la condition pénale des mineurs [FF 1999 1787, 1975]). Leur élimination définitive intervenait ensuite une année après leur radiation en vertu de l'art. 80 ch. 1 aCP (art. 14 let. c de l'ancienne ordonnance du 1er décembre 1999 sur le casier judiciaire informatisé [RO 1999 3509, 3515]). Cela étant, faute de respecter la mise à l'épreuve d'une précédente condamnation, la radiation était annulée en application de l'art. 49 ch. 4 aCP, et dite condamnation réapparaissait sur l'extrait délivré aux particuliers (art. 363 al. 2, 3ème phrase aCP a contrario [RO 1999 3505, 3508], art. 25 al. 4 de l'ordonnance sur le casier judiciaire informatisé du 1er décembre 1999, a contrario [RO 1999 3509, 3520]).

Les services de coordination des cantons contrôlaient périodiquement les délais d'épreuve des jugements selon l'art. 49 ch. 4 aCP, établissaient les demandes de radiation ou d'annulation d'une radiation et enregistraient ensuite les décisions d'inscription correspondantes (art. 6 al. 1 let. a, 1ère phrase de l'ancienne ordonnance du 1er décembre 1999 sur le casier judiciaire informatisé [RO 1999 3509, 3512]) émanant de l'autorité cantonale compétente, au sens de l'art. 49 ch. 4 al. 2 CP (RO 1971 777, 807), à savoir, ici, de la Direction de la justice du canton de X.______ (cf. Circulaire du 16 décembre 2004 de la Cour suprême du canton de X.______). Ces décisions d'inscription ne conféraient en elles-mêmes ni droit ni obligation aux administrés.
6.1.3 En l'occurrence, dès lors que la radiation litigieuse a été annulée conformément à la législation fédérale et cantonale sur le casier judiciaire alors en vigueur, il ne saurait être question d'une radiation selon l'ancien droit, l'inscription en cause reprenant effet sous l'empire de cet ancien droit. Partant, le ch. 3 al. 3 DT CP ne peut être invoqué par le recourant.

Il y a donc lieu de faire application des seuls art. 365 à 371 CP, en vertu du ch. 3 al. 1 des dispositions finales de la modification du 13 décembre 2002.

6.2 Applicable selon le ch. 3 al. 1 des dispositions finales de la modification du 13 décembre 2002, l'art. 369 CP dispose aujourd'hui que c'est le jugement éliminé (al. 7, 2ème phrase) qui ne peut plus être opposé à la personne concernée.

Un jugement qui prononce une peine avec sursis ou sursis partiel n'apparaît plus dans l'extrait du casier judiciaire destiné aux particuliers lorsque le condamné a subi la mise à l'épreuve avec succès (art. 371 al. 3bis CP). Sinon, le jugement qui prononce une peine ne figure plus sur l'extrait du casier judiciaire lorsque les deux tiers de la durée déterminante pour l'élimination de l'inscription en vertu de l'art. 369 sont écoulés (art. 371 al. 3 CP). Les jugements qui prononcent une peine privative de liberté avec sursis, une peine pécuniaire, un travail d'intérêt général ou une amende comme peine principale sont éliminés d'office après dix ans (art. 369 al. 3 CP). Le délai pour les jugements visés à l'art. 371 al. 3 CP court à compter du jour où le jugement est exécutoire (art. 369 al. 6 let. a CP). Le mois et l'année sont comptés de quantième à quantième (art. 110 al. 6, 2ème phrase CP).

Le jugement pour rixe du 18 mai 2004, étant devenu exécutoire le jour de son prononcé, doit ainsi demeurer inscrit au casier judiciaire. Il ne pourra plus apparaître sur l'extrait destiné aux particuliers qu'après six ans et huit mois, soit en novembre 2010.

Le moyen pris du maintien de l'inscription en cause doit donc être rejeté.

7.
De là, il suit enfin que le recourant invoque en vain une violation du principe de la liberté économique (art. 27 Cst.), au motif que, dans la mesure où l'art. 369 al. 7 CP ne permettrait plus qu'une décision d'annulation d'une radiation soit prise, la radiation litigieuse serait illicite et ne reposerait pas sur une base légale.
Il suffit de rappeler à cet égard que, comme tout droit fondamental, la liberté économique peut être restreinte, autant qu'une telle restriction soit fondée sur une base légale (art. 36 al. 1 Cst.), repose sur un intérêt public (art. 36 al. 2 Cst.) et soit proportionnée au but visé (art. 36 al. 3 Cst.), - réquisits qui sont remplis en l'occurrence.
En effet, s'agissant de la base légale, il ne faut pas confondre radiation, au sens de l'art. 49 ch. 4, 1ère phrase aCP (RO 1971 777, 807), avec élimination définitive, au sens de l'art. 14 let. c de l'ancienne ordonnance du 1er décembre 1999 sur le casier judiciaire informatisé, de l'art. 12 al. 2 de l'ordonnance VOSTRA du 29 septembre 2006, et de l'art. 369 al. 3 et al. 7, 2ème phrase CP. ll faut ensuite distinguer inscription au casier (art. 370 CP) et extrait du casier judiciaire destiné aux particuliers (art. 371 CP). Une fois encore, en conformité du droit fédéral applicable (ch. 3 al. 1 des dispositions finales de la modification du 13 décembre 2002, art. 369 et 371 CP), le jugement pour rixe du 18 mai 2004 ne pourra plus apparaître sur l'extrait destiné aux particuliers après six ans et huit mois (cf. consid. 6.2 ci-avant). C'est dire que l'argument tiré de l'absence de base légale et d'intérêt public tombe à faux.
Par ailleurs, les art. 369 al. 3 et 6, ainsi que 370 al. 3bis CP ne laissent aucun pouvoir d'appréciation à l'autorité inférieure, en sorte qu'un examen in concreto de la condition de proportionnalité ne s'impose pas ici.
Le grief pris de la violation de la liberté économique invoqué par le recourant doit donc de même être écarté.

8.
Il suit de tout ce qui précède que l'autorité inférieure était en droit de refuser la demande tendant à ce que le jugement rendu le 18 mai 2004 par le juge unique du Gerichtskreis X.______ contre le recourant ne figure plus sur l'extrait du casier judiciaire destiné à des particuliers. Le recours doit donc être rejeté.
Succombant, le recourant doit supporter les frais de procédure (art. 63 al. 1 PA et art. 1 al. 1 du Règlement du 21 février 2008 concernant les frais, dépens et indemnités fixés par le Tribunal administratif fédéral (FITAF, RS 173.320.2), qui s'élèvent à Fr. 1'500.- et sont compensés par l'avance de frais du même montant qu'il a versée.

Vu l'issue de la procédure, aucune indemnité de dépens ne sera allouée au recourant. Par ailleurs, l'autorité inférieure n'a pas droit aux dépens (art. 64 al. 1 PA et art. 7 al. 3 FITAF).

Par ces motifs, le Tribunal administratif fédéral prononce :

1.
Le recours est rejeté.

2.
Les frais de procédure, d'un montant de Fr. 1'500.-, sont mis à la charge du recourant. Ce montant est compensé par l'avance de frais de Fr. 1500.- déjà versée par le recourant.

3.
Il n'est pas alloué de dépens.

4.
Le présent arrêt est adressé :
au recourant (Acte judiciaire)
à l'autorité inférieure (n° de réf. 6.5.1.0 ; Recommandé)
au Secrétariat général du Département fédéral de justice et police (Acte judiciaire)

Les voies de droit figurent à la page suivante.

Le président du collège : Le greffier :

Jérôme Candrian Yanick Felley

Indication des voies de droit :
Pour autant que les conditions au sens des art. 82 ss, 90 ss et 100 de la loi du 17 juin 2005 sur le Tribunal fédéral (LTF, RS 173.110) soient remplies, la présente décision peut être attaquée devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par la voie du recours en matière de droit public, dans les trente jours qui suivent la notification. Le mémoire doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, les motifs et les moyens de preuve, et être signé. La décision attaquée et les moyens de preuve doivent être joints au mémoire, pour autant qu'ils soient en mains de la partie recourante (voir art. 42 LTF).
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