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Cour I

A-6306/2015

 

 

 

 

Arrêt du 15 mai 2017

Composition

 

Pascal Mollard (président du collège),

Daniel Riedo, Michael Beusch, juges,

Valérie Humbert, greffière.

 

 

 

Parties

 

A._______,

représentée par Maître Ramon Rodriguez, à Genève

recourante,

 

 

 

contre

 

 

Administration fédérale des contributions AFC,

Service d'échange d'informations en matière fiscale SEI, Eigerstrasse 65, 3003 Bern,

autorité inférieure.

 

 

 

 

Objet

 

assistance administrative (CDI-ES).

 

 

 


Faits :

A.   

A.a  Le 23 mars 2015, l'office national espagnol de lutte contre la fraude fiscale (ci-après : autorité fiscale espagnole ou autorité requérante) a adressé à l'administration fédérale des contributions (ci-après : AFC, autorité inférieure ou autorité requise) une demande d'assistance administrative en matière fiscale, couvrant l'année 2013, concernant un numéro d'une carte de crédit émise par la Banque B._______ SA dont le titulaire lui est inconnu. En substance, l'autorité fiscale espagnole souhaite connaître l'identité de la ou des personne(s) inscrite(s) comme détentrice(s) de la carte de crédit, les références du compte bancaire lié à cette carte, l'identité des personnes enregistrées comme titulaires et/ou ayants droit économiques de ce compte ainsi que les références de tout autre compte bancaire enregistré auprès de Banque B._______ SA sous le nom d'une de ces personnes.

A.b  A l'appui de sa demande, l'autorité requérante expliquait soupçonner le détenteur de la carte de crédit d'être un résident espagnol soumis à l'impôt en Espagne. En effet, ses investigations auraient montré de fréquents retraits d'argent liquide (117 transactions en un an), tous localisés à X._______, pour un total de 104'140 euros, sans que la carte de crédit ne soit jamais utilisée dans des établissements commerciaux espagnols où l'identification du détenteur aurait été possible.

B.   

B.a  Donnant suite à l'ordonnance de production de l'AFC du 8 avril 2015, la Banque B._______ SA lui a transmis, par courrier du 20 avril suivant, les informations demandées, indiquant que le titulaire de la carte de crédit est Aa._______, née le (...), dont l'adresse est à X._______ et que la carte est créditée depuis un compte bancaire ouvert auprès de la Banque C._______ SA. La banque a également précisé que l'intermédiaire et la destinataire de la correspondance pour cette carte est la société D._______SA à Z._______.

B.b  Après une première ordonnance de production infructueuse adressée à la Banque C._______ SA, qui a affirmé que la carte de crédit n'était liée à aucun compte auprès de son établissement pour la période considérée, l'AFC a requis, en date du 28 mai 2015, des informations complémentaires auprès de la Banque B._______ SA au sujet du compte bancaire à partir duquel la carte était créditée. Par courrier du 8 juin 2015, la Banque B._______ SA a communiqué les informations.

B.c  Sur la base des précisions ainsi obtenues, l'AFC a adressé le 18 juin 2015 une nouvelle ordonnance de production à la Banque C._______ SA, laquelle a transmis les informations requises le 1er juillet 2015. En particulier, la banque a indiqué le n° du compte bancaire concerné et le nom de la société titulaire de ce compte, à savoir la société E._______ Ltd dont le siège est à W._______ dans (...). Elle a précisé que les ayants droit économiques étaient A._______ (et non Aa._______) (...), née le (...) et F._______, né le (...) (cf. cause parallèle A-6733/2015), tous les deux domiciliés à la même adresse à X._______.

C.   

C.a  Le 27 juillet 2015, en réponse à la demande de l'avocat dûment mandaté pour représenter A._______, l'AFC lui a communiqué les pièces du dossier. Par le même courrier, elle lui a notifié la teneur des informations qu'elle envisageait de transmettre à l'autorité fiscale espagnole, lui impartissant un délai pour déposer ses observations.

C.b  Le 7 août 2015, A._______ s'est opposée à la transmission des informations.

C.c  Par décision du 2 septembre 2015, rectifiée le 24 septembre suivant en raison d'une erreur de frappe, l'AFC a dit vouloir transmettre à l'autorité fiscale espagnole les informations suivantes :

a) According to the information provided by Banque B._______ SA and Banque C._______ SA, the holder of the above-mentionned credit card is Mrs A._______, born (...), domiciled at (...) X._______, (...).

b) The credit card no ***1 is linked to the bank account no ***2 at Banque C._______ SA.

c) According to the information provided by Banque C._______ SA, the holder of the bank account no ***2 is a company registered in (...): Mrs A._______ is one of the beneficial owners of the account.

D.   

D.a  Par acte du 2 octobre 2015, A._______, agissant par l'entremise de son avocat, interjette recours par devant le Tribunal administratif fédéral (ci-après : TAF ou Tribunal) à l'encontre de cette décision dont elle demande l'annulation, concluant au rejet de la demande d'assistance, sous suite de frais et dépens. A l'appui de ses conclusions, elle prétend en substance que les conditions formelles et matérielles de l'assistance en matière fiscale ne sont pas respectées, en particulier celles liées à l'interdiction de la pêche aux renseignements et celle de divulguer des informations concernant les ayants droit économiques d'un compte.

D.b  Dans sa réponse du 30 novembre 2015, l'AFC conclut au rejet du recours.

D.c  Le 1er décembre 2015, l'AFC communique au Tribunal copie du pli envoyé le même jour à la recourante contenant - en application de la récente jurisprudence du Tribunal fédéral (ci-après : TF) rendue au sujet de l'étendue de l'accès au dossier - une copie de la correspondance échangée avec l'autorité fiscale espagnole.

Les autres faits, ainsi que les arguments développés par les parties à l'appui de leurs positions respectives, seront repris dans les considérants en droit ci-après, dans la mesure utile à la résolution du litige.

Droit :

1.   

1.1  Sous réserve des exceptions prévues à l'art. 32 de la loi fédérale du 17 juin 2005 sur le TAF (LTAF, RS 173.32) - non réalisées en l'espèce - le TAF connaît, selon l'art. 31 LTAF, des recours contre les décisions au sens de l'art. 5 de la loi fédérale du 20 décembre 1968 sur la procédure administrative (PA, RS 172.021), prises par l'AFC (cf. art. 33 let. d LTAF en lien avec l'art. 10 al. 1 de loi fédérale du 28 septembre 2012 sur l'assistance administrative internationale en matière fiscale [LAAF, RS 651.1]).

1.2  L'assistance administrative internationale en matière fiscale est actuellement régie, pour ce qui concerne le droit interne, par la LAAF, en vigueur depuis le 1er février 2013. La demande d'assistance litigieuse, déposé le 23 mars 2015, entre ainsi dans le champ d'application de la LAAF (cf. art. 24 LAAF a contrario).

1.3  La présente procédure est soumise aux règles générales de procédure, sous réserve des dispositions spécifiques de la LAAF (art. 19 al. 5 LAAF, cf. ég. art. 37 LTAF).

1.4  Pour le surplus, déposé en temps utile (art. 50 al. 1 PA) et en les formes requises (art. 52 PA), par la destinataire de la décision litigieuse laquelle possède un intérêt digne de protection à son annulation ou à sa modification (art. 48 al. 1 PA ; cf. pour la qualité pour recourir d'un ayant droit économique ATF 139 II 404 consid. 2), le recours est donc recevable sur ce plan et il peut être entré en matière sur ses mérites.

2.   

2.1  Le TAF constate les faits et applique le droit d'office, sans être lié par les motifs invoqués (cf. art. 62 al. 4 PA) ni par l'argumentation juridique développée dans la décision entreprise (cf. Pierre Moor/Etienne Poltier, Droit administratif, vol. II, Berne 2011, p. 300 s.). La procédure est régie par la maxime inquisitoire, ce qui signifie que le TAF définit les faits et apprécie les preuves d'office et librement (cf. art. 12 PA). Les parties doivent toutefois collaborer à l'établissement des faits (art. 13 PA) et motiver leur recours (art. 52 PA). En conséquence, l'autorité saisie se limite en principe aux griefs soulevés et n'examine les questions de droit non invoquées que dans la mesure où les arguments des parties ou le dossier l'y incitent (cf. ATF 122 V 157 consid. 1a ; ATAF 2012/23 consid. 4, ATAF 2007/27 consid 3.3 ; Alfred Kölz/Isabelle Häner/Martin Bertschi, Verwaltungsverfahren und Verwaltungsrechtspflege des Bundes, 3e éd., Zurich/Bâle/Genève 2013, ch. 1135).

2.2  Le recourant peut invoquer la violation du droit fédéral, y compris l'excès ou l'abus du pouvoir d'appréciation (art. 49 let. a PA), la constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (art. 49 let. b PA) ou l'inopportunité (art. 49 let. c PA; cf. André Moser/Michael Beusch/Lorenz Kneubühler, Prozessieren vor dem Bundesverwaltungsgericht, 2e éd., Bâle 2013, ch. 2.149, p. 73; Ulrich Häfelin/Georg Müller/Felix Uhlmann, Allgemeines Verwaltungsrecht, 7e éd., Zurich/St-Gall 2016, ch. 1146 ss).

3.   

3.1  Selon la jurisprudence, l'interprétation et l'application d'une convention de double imposition suivent les principes du droit international conventionnel et du droit coutumier international, en particulier ceux de la Convention de Vienne du 23 mai 1969 sur le droit des traités (CV, RS 0.111; cf. ATF 141 II 447 consid.4.3.1, 140 II 167 consid. 5.5.2, 139 II 404 consid. 7.2.1; arrêt du TAF A-2122/2016 du 31 janvier 2017 consid. 4.2). Tout traité en vigueur lie les parties selon l'article 26 CV et elles se doivent de l'exécuter de bonne foi (pacta sunt servanda). Il s'agit ainsi de s'assurer à chaque application d'une convention internationale qu'elle respecte le principe de la bonne foi ainsi que l'objet et le but du traité. Chaque partie peut attendre de l'autre qu'elle se comporte dans le respect de ces principes (cf. ATF 140 II 167 consid. 5.5.2, 139 II 404 consid. 7.2.1 p). Selon l'article 31 par. 1 CV, un traité doit être interprété de bonne foi suivant le sens ordinaire à attribuer aux termes du traité dans leur contexte et à la lumière de son objet et de son but (ATF 141 II 447 consid.4.3.1 ; arrêt du TF 2C_498/2013 du 29 avril 2014 consid. 5.1; ATAF 2010/7 consid. 3.5 ; arrêts du TAF A- 4143/2015 du 27 juin 2016 consid. 2.1, A-155/2015 du 22 juin 2015 consid. 4.1).

3.2  Il peut être fait appel à des moyens complémentaires d'interprétation, et notamment aux travaux préparatoires et aux circonstances dans lesquelles le traité a été conclu, en vue, soit de confirmer le sens résultant de l'application de l'art. 31 CV, soit de déterminer le sens lorsque l'interprétation donnée conformément à l'art. 31 CV laisse le sens ambigu ou obscur ou conduit à un résultat manifestement absurde ou déraisonnable que les parties, en toute bonne foi, n'ont pas pu vouloir (art. 32 let. a et b CV; cf. Michael Beusch, Der Einfluss "fremder" Richter - Schweizer Verwaltungsrechtspflege im internationalen Kontext, in RSJ/SJZ 109/2013 p. 349, p. 351 s. ; ATF 141 II 447 consid. 4.3.2 et les réf. cit.). En tant que les règles d'interprétation de la CV codifient le droit international coutumier, elles s'appliquent aussi aux Etats non parties à la CV (arrêts du TAF A-8400/2015 du 21 mars 2016 consid. 2.1.1, A-4414/2014 du 8 décembre 2014 consid.  1.4.1).

4.   

4.1   

4.1.1  La Confédération suisse et l'Espagne sont liés par la Convention du 26 avril 1966 entre la Confédération suisse et l'Espagne en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune (ci-après: CDI-ES, RS 0.672.933.21). Cette convention a été révisée une première fois par un protocole de modification, conclu le 29 juin 2006, approuvé par l'Assemblée fédérale le 14 décembre 2006 (RO 2007 2197) et entré en vigueur par échange de notes du 1er juin 2007 (RO 2007 2199). La modification de 2006 visait notamment à introduire dans la CDI-ES l'art. 25bis sur l'échange de renseignements afin que soit possible l'assistance administrative en cas de fraude fiscale ou d'infraction équivalente ainsi qu'un protocole additionnel relatif à certaines dispositions (cf. art. 6 du protocole de modification de 2006 ; Message du Conseil fédéral [CF] du 6 septembre 2006 concernant un protocole modifiant la CDI-ES [ci-après : MCF CDI-ES protocole du 29 juin 2006], FF 2006 7281, 7285). Le ch. IV du protocole additionnel apporte des précisions quant au nouvel art. 25bis de la CDI-ES. Au par. 11 de ce ch. IV, a été insérée une clause de la nation la plus favorisée garantissant à l'Espagne qu'elle se puisse se voir octroyer automatiquement le même niveau d'assistance administrative en matière fiscale que celui dont la Suisse pourrait convenir avec un autre Etat membre de l'Union Européenne (UE).

Afin de régir sur le plan interne l'échange de renseignements (la LAAF n'était pas encore adoptée, cf. consid. supra 1.2), le CF a adopté l'ordonnance du 6 septembre 2006 relative à la CDI-ES, entrée en vigueur le 1er juin 2007 (OACDI-ES, RS 672.933.21).

A ce stade, ni l'art. 25bis CDI-ES ni le ch. IV du protocole additionnel ne donnaient de précisions sur les informations que devait fournir l'autorité fiscale requérante lorsqu'elle présentait une demande d'assistance au sens de l'art. 25bis CDI-ES.

4.1.2  Le 27 juillet 2011, la Suisse et l'Espagne ont signé un nouveau protocole de modification, lequel a été approuvé par l'Assemblée fédérale le 15 juin 2012 (RO 2013 2365) et est entrée en vigueur le 24 août 2013 (RO 2013 2367). Ce protocole de modification a pour objectif principal de clarifier la portée de l'assistance administrative. Il faisait suite à la décision du CF du 13 mars 2009 de retirer la réserve de la Suisse à l'échange de renseignements selon le Modèle de convention de l'OCDE (OCDE, Modèle de Convention fiscale concernant le revenu et la fortune, version abrégée [avec un commentaire article par article], Paris 2014 [ci-après: Modèle CDI OCDE, respectivement: Commentaire]; différentes versions de ce document sont disponibles sur le site internet: www.oecd.org thèmes fiscalité conventions fiscales) et de se conformer à l'avenir au standard de l'OCDE relatif à l'assistance administrative en matière fiscale, conformément à l'art. 26 MC-OCDE (cf. MCF du 23 novembre 2011 concernant l'approbation d'un protocole modifiant la CDI-ES [ci-après :MCF CDI-ES protocole 2011], FF 2011 8391). En conséquence, la clause de la nation la plus favorisée a été éliminée, l'Espagne bénéficiant dès lors de la standardisation internationale (cf. MCF protocole 2011, FF 2011 8394). Le ch. IV du protocole additionnel concernant l'art. 25bis a été remplacé et le par. 2 ch. IV énumère désormais les informations que les autorités fiscales requérantes doivent présenter lors de leur demande d'assistance.

4.1.3  En ce qui concerne les impôts sur le revenu et sur la fortune, les modifications introduites par le protocole du 27 juillet 2011 s'appliquent aux demandes d'assistance qui portent sur des renseignements concernant l'année 2010 et les années suivantes (cf. art. 13 ch. 2 let. [iii] du protocole du 27 juillet 2011; arrêts du TAF A-4157/2016 du 15 mars 2017 consid. 3.1, A-3789/2016 du 22 septembre 2016 consid. 2, A-4941/2015 du 24 février 2016), de sorte que la présente affaire est soumise aux règles en vigueur depuis ces dernières modifications.

 

4.2   

4.2.1  Sur le plan formel, le par. IV ch. 2 du Protocole additionnel CDI-ES prévoit que la demande d'assistance doit indiquer (a) l'identité de la personne faisant l'objet d'un contrôle ou d'une enquête ; (b) la période visée ; (c) une description des renseignements demandés ; (d) l'objectif fiscal poursuivi et, (e) dans la mesure où ils sont connus, les noms et adresse de toute personne dont il y a lieu de penser qu'elle est en possession des renseignements demandés (le détenteur d'informations).

4.2.2  Outre aux exigences formelles, la demande d'assistance doit satisfaire à plusieurs critères matériels.

4.2.2.1  L'art. 25bis CDI-ES prévoit que les autorités compétentes des Etats contractants échangent les renseignements vraisemblablement pertinents pour appliquer les dispositions de la CDI-ES ou pour l'administration ou l'application de la législation interne relative aux impôts de toute nature ou dénomination perçus pour le compte des Etats contractants.

La jurisprudence a eu l'occasion de circonscrire la notion de vraisemblable pertinence commune aux CDI conçues sur le Modèle de l'OCDE (cf. arrêt A-4157/2016 du 15 mars 2017 consid. 3.5.1.1 et les nombreuses références citées). Ainsi, il n'incombe pas à l'Etat requis de refuser une demande ou de transmettre les informations parce que cet Etat serait d'avis qu'elles manqueraient de pertinence pour l'enquête ou le contrôle sous-jacents. L'appréciation de la pertinence vraisemblable des informations demandées est en premier lieu du ressort de l'Etat requérant, le rôle de l'Etat requis se bornant à un contrôle de plausibilité (cf. ATF 142 II 161 consid.  2.1.1, 2.1.4 et 2.4 ; arrêt du TAF A-5229/2016 du 15 mars 2017 consid.  4.2.1).

4.2.2.2  La demande d'assistance ne doit pas être déposée uniquement à des fins de recherche de preuves (interdiction de la pêche aux renseignements [fishing expedition]; par. IV ch. 3 Protocole CDI-ES; voir arrêt du TF 2C_276/2016 du 12 septembre 2016 [destiné à la publication] consid. 6.1 et 6.3). L'interdiction des "fishing expeditions" correspond au principe de proportionnalité (voir art. 5 al. 2 de la Constitution fédérale du 18 avril 1999 de la Confédération suisse [Cst., RS 101]), auquel doit se conformer chaque demande d'assistance administrative (arrêt du TAF A-7111/2014, A-7156/2014, A-7159/2014 du 9 juillet 2015 consid. 5.2.5).

4.2.2.3  La demande d'assistance est soumise au respect du principe de subsidiarité qui dicte que l'autorité requérante doit épuiser au préalable toutes les sources habituelles de renseignements prévues dans sa procédure fiscale interne (par. IV ch. 1 du Protocole additionnel CDI-ES; voir arrêts du TAF A-4157/2016 du 15 mars 2017 consid. 3.2.2, A-6394/2016 du 16 février 2017 consid. 2.2.1, A-4992/2016 du 29 novembre 2016 consid.  5.2). A cet égard, il est admis que la déclaration de l'autorité requérante selon laquelle la demande est conforme aux termes de la convention implique, en vertu de la confiance mutuelle qui doit régner entre les Etats, qu'elle a épuisé les sources habituelles de renseignement dont elle pouvait disposer en vertu de son droit interne (arrêts du TAF A-A-2797/2016, A- 2801/2016 du 28 décembre 2016 consid. 4.2.4.2, A-6983/2014 du 12 janvier 2016 consid. 7, A-6399/2014 du 4 janvier 2016 consid. 5; voir aussi arrêt du TAF A-7111/2014, A-7156/2014, A-7159/2014 du 9 juillet 2015 consid. 5.3.3).

4.2.2.4  Conformément aux principes du droit international, la demande doit en outre respecter le principe de la bonne foi. Cela signifie notamment qu'elle ne peut pas se fonder sur des renseignements obtenus par des actes punissables au regard du droit suisse (cf. art. 7 let. c LAAF). La bonne foi d'un Etat est présumée. Dans le contexte de l'assistance administrative en matière fiscale, cette présomption implique que l'Etat requis ne saurait en principe mettre en doute les allégations de l'Etat requérant ; il doit se fier en principe aux indications que lui fournit celui-ci (ATF 142 II 161 consid. 2.1.3 ; arrêt du TF 2C_904/2015 du 8 décembre 2016 consid. 6.3). Autrement dit, les déclarations de l'autorité requérante doivent être tenues pour correctes tant qu'aucune contradiction manifeste ne résulte des circonstances (ATF 128 II 407 consid. 3.2, 4.3.1, 4.3.3, 126 II 409 consid.4 ; arrêts du TF 2C_1000/2015 [destiné à la publication] du 17 mars 2017 consid. 6.4 et 2C_893/2015 du 16 février 2017 [destiné à la publication] consid. 8.7.1 ; arrêts du TAF A-5229/2016 du 15 mars 2017 consid. 4.2.1, A- 4569/2015 du 17 mars 2016 consid. 6, A-7188/2014 du 7 avril 2015 consid. 2.2.6).

4.2.2.5  Les renseignements demandés doivent être compatibles avec les règles de procédure applicables dans l'Etat requérant et dans l'Etat requis, les règles sur le secret bancaire n'ayant toutefois pas à être respectées (voir art. 25bis par. 3 et 5 CDI-ES; ATF 142 II 161 consid. 4.5.2; arrêts du TAF A-3830/2015, A-3838/2015 du 14 décembre 2016 consid. 3, A-3787/2016 du 22 septembre 2016 consid. 12, A-1015/2016 du 18 août 2016 consid. 4, A-6666/2014 du 19 avril 2016 consid. 2.1). Lorsque la Suisse est l'Etat requis, l'AFC dispose donc des pouvoirs de procédure nécessaires pour exiger des banques la transmission de l'ensemble des documents requis qui remplissent la condition de la pertinence vraisemblable, sans que puissent lui être opposés l'art. 47 loi fédérale du 8 novembre 1934 sur les banques (LB, RS 952.0) ou toute autre disposition de droit interne (ATF 142 II 161 consid. 4.5.2, arrêts du TF 2C_411/2016, 2C_412/2016, 2C_413/2016, 2C_414/2016, 2C_415/2016, 2C_416/2016, 2C_417/2016, 2C_418/2016 du 13 février 2017 consid. 3, 2C_490/2015 du 14 mars 2016 consid. 3.2.1, 2C_216/2015 du 8 novembre 2015 consid.  5.3).

Le respect de la procédure interne de l'Etat requérant ne signifie pas que l'Etat requis doit vérifier que la procédure dans celui-là s'est déroulée en conformité avec toutes les dispositions de droit applicables (cf. arrêt du TAF A-3830/2015 du 14 décembre 2016 consid. 12). En effet, le respect des prescriptions du droit de procédure de l'Etat requérant est un point qui concerne essentiellement celui-ci (cf. arrêt du TAF A-688/2015 du 22 février 2016 consid. 9). Une solution contraire serait impossible à mettre en oeuvre, les autorités suisses n'ayant pas les connaissances nécessaires pour contrôler en détail l'application du droit étranger. A cela s'ajoute qu'il appartient à chaque Etat d'interpréter sa propre législation et de contrôler la manière dont celle-ci est appliquée (cf. arrêt du TAF A-5229/2016 du 15 mars 2017 consid. 4.2.5.1). Ainsi, tout grief à ce propos doit être invoqué devant les autorités compétentes étrangères (cf. arrêts du TAF A-4157/2016 du 15 mars 2017 consid. 3.5.4, A-7143/2014 du 15 août 2016 consid. 11, A-688/2015 du 22 février 2016 consid. 9).

5. 
En l'espèce, le Tribunal examinera tout d'abord si les conditions de forme ont été respectées, en particulier celle ayant trait à l'identification de la personne concernée (consid. 5.1) puis les autres exigences formelles (consid. 5.2). Il passera ensuite en revue l'application au cas présent des différentes conditions matérielles (consid. 6).

5.1   

5.1.1  Il sied de relever d'emblée que, contrairement aux termes du par. IV ch. 2 du Protocole additionnel CDI-ES (cf. consid. supra 4.2.1), l'autorité fiscale requérante n'indique pas l'identité de la personne faisant l'objet d'un contrôle ou d'une enquête, faute pour elle de la connaître. Le but de sa demande vise précisément à obtenir le nom de cette personne dont elle ne détient que le n° d'une de ses cartes de crédit. Ainsi la première question à résoudre est de savoir dans quelle mesure il est possible d'accorder l'assistance administrative sur la base d'une demande ne mentionnant pas le nom du contribuable visé. A ce sujet, il sied d'indiquer à la recourante que le par. IV n'exige nullement en terme exprès « le nom et l'adresse de la personne concernée » comme elle le prétend à tort dans son écriture de recours, citant manifestement les termes d'un autre protocole.

5.1.2  Dans un arrêt récent qui concerne l'application de la convention conclue le 26 février 2010 entre la Confédération suisse et le Royaume des Pays-Bas en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu (CDI-NL, RS 0.672.963.61), le TF a jugé en principe admissibles les demandes groupées sans indication de noms, pour autant qu'elles contiennent des informations suffisantes pour identifier les personnes concernées (cf. arrêt du TF 2C_276/2016 du 12 septembre 2016 [destiné à la publication] consid. 5.3.4).

5.1.3  La Haute Cour s'est fondée dans ce cas sur l'existence d'un accord amiable conclu le 31 octobre 2011 entre la Suisse et le Royaume des Pays-Bas concernant l'interprétation de la lettre b) du par. XVI du Protocole additionnel à la CDI-NL. Cette disposition énonce les informations que l'autorité requérante doit fournir à l'autorité requise lorsqu'elle formule une demande de renseignements fondée sur l'art. 26 de la CDI-NL qui régit l'échange de renseignements. Selon cette disposition, il est exigé que l'Etat requérant fournisse, entre autres, (i) des informations suffisantes pour l'identification de la personne ou des personnes faisant l'objet d'un contrôle ou d'une enquête, en particulier le nom et, si disponible, l'adresse, le compte bancaire et tout autre élément de nature à faciliter l'identification de la personne, comme la date de naissance, l'état civil ou le numéro de contribuable, ainsi que (v) le nom et, dans la mesure où elle est connue, l'adresse de toute personne présumée être en possession des renseignements demandés. La let. c) stipule que si ces conditions d'ordre procédural sont importantes dans le but d'empêcher la «pêche aux renseignements», elles doivent toutefois être interprétées de façon à ne pas faire obstacle à un échange effectif de renseignements.

L'accord amiable précise la manière dont doivent être comprises ces conditions dans le sens qu'il devra être donné suite à une demande d'assistance administrative si l'Etat requérant, en plus des autres informations exigées à la let. b) du par. XVI du Protocole additionnel, a) identifie la personne faisant l'objet d'un contrôle ou d'une enquête, cette identification pouvant être établie par d'autres moyens que le nom et l'adresse; et b) indique, dans la mesure où ils sont connus, le nom et l'adresse de toute personne présumée être en possession des renseignements demandés, pour autant que la demande ne constitue pas une «pêche aux renseignements.

5.1.4  Cet accord à l'amiable a été conclu à la suite de la décision du CF, prise sur proposition du Département fédérale des finances [DFF] du 15 février 2011, de modifier les exigences applicables à l'assistance administrative instaurée dans le cadre des CDI basées sur le standard de l'OCDE (cf. communiqué du DFF du 15 février 2011, consultable sur www.efd.admin.ch>documentation>communiqués du DFF archives communiqués). Cette décision se basait sur l'examen par les pairs (« Peer Reviews ») effectué par le Forum mondial sur la transparence et l'échange de renseignements à des fins fiscales (Forum mondial qui regroupe les Etats du G- 20, ceux de l'OCDE et ceux qui reconnaissent le standard OCDE) du respect du standard international en matière d'assistance administrative (cf. Document de base du DFF daté du 15 février 2011 et annexé au communiqué de précité). L'examen concernant la Suisse relevait que les neufs CDI approuvées par l'Assemblée fédérale le 18 juin 2010 (avec l'Autriche, le Danemark, la France, le Luxembourg, le Mexique, la Norvège, le Qatar et le Royaume-Uni) contenaient des conditions trop restrictives au sujet de l'identification de la personne concernée par la demande (conditions qui exigeaient le nom, cf. MCF du 6 avril 2011 sur le complément aux conventions en vue d'éviter les doubles impositions approuvées par l'Assemblée fédérale le 18 juin 2010 [MCF du 6 avril 2011], FF 2011 3519, 3525). A la suite de cette décision de février 2011, l'identification du contribuable et des détenteurs d'informations continue donc à s'effectuer en règle générale par le nom et l'adresse. L'adaptation souhaitée au standard OCDE exprimait uniquement le principe que la procédure d'assistance administrative ne doit pas échouer en raison d'une interprétation trop formaliste des dispositions des CDI et qu'en conséquence, d'autres moyens d'identification devaient être admis, par exemple un numéro de compte ou un numéro d'assurance (cf. MCF du 6 avril 2011, FF 2011 3527 ; arrêt du TF 2C_276/2016 du 12 septembre 2016 [destiné à la publication] consid.  5.3.2).

5.1.5  Le mode d'adaptation des conventions afin d'intégrer le standard OCDE précité dépendait du stade de leur approbation. Pour les pays avec lesquels une CDI avait été signée mais non encore ratifiée, la disposition concernant l'échange de renseignements pouvait être précisée par le biais d'une procédure à l'amiable ou par celui d'un échange de notes diplomatiques (cf. document de base du DFF daté du 15 février 2011 précité ; arrêt du TF 2C_276/2016 du 12 septembre 2016 [destiné à la publication] consid. 5.3.2). Ce fut notamment le cas avec le Royaume des Pays-Bas. La CDI-NL a été conclue le 26 février 2010 et approuvée par l'Assemblée fédéral par arrêté fédéral du 17 juin 2011 (cf. RO 2011 4965). Selon l'art. 1 al. 3 let. a de l'arrêté d'approbation, la Suisse donne suite à une demande d'assistance administrative lorsqu'il en ressort qu'il ne s'agit pas d'une «pêche aux renseignements» et que les Pays-Bas identifient le contribuable, cette identification pouvant être établie par d'autres moyens que le nom et l'adresse. L'al. 4 de cette même disposition habilite l'AFC à faire en sorte d'obtenir une reconnaissance mutuelle de l'interprétation présentée à l'al. 3. C'est sur cette base que l'accord à l'amiable, sur lequel se base l'arrêt du TF précité (cf. consid. 5.3.1), a ensuite été conclu (cf. RO 2012 4079).

Pour les CDI déjà approuvées par l'Assemblée fédérale (soit celles conclues avec l'Autriche, le Danemark, les Etats-Unis, la Finlande, la France, le Luxembourg, le Mexique, la Norvège, le Qatar et le Royaume Uni), le Conseil fédéral a proposé un complément aux conditions applicables aux demandes d'assistance administrative. Il a soumis au Parlement dix arrêtés fédéraux destinés à compléter les CDI concernées (cf. MCF du 6 avril 2011, FF 2011 3519) et habilitant le DFF à convenir, dans un cadre bilatéral avec ces Etats, d'une règle à ce sujet. Ce fut, pour exemple, le cas avec la France (cf. Arrêté fédéral du 23 décembre 2011 concernant un complément à la convention contre les doubles impositions entre la Suisse et la France, RS 672.934.90). Sur cette base, la France et la Suisse ont conclu le 25 juin 2014 un accord modifiant le protocole additionnel à la convention de 1966 les liant (cf. RS. 0.672.934.91). L'al. a) du par. 3 du point XI de ce protocole - qui exigeait le nom et l'adresse de la personne concernée - a été supprimé et remplacé par la phrase suivante « l'identité de la personne faisant l'objet d'un contrôle ou d'une enquête, cette information pouvant résulter de la fourniture du nom de cette personne ou de tout autre élément de nature à en permettre l'identification » (cf. RO 2016 1195).

La CDI-ES était à cette époque en cours de révision si bien qu'il a été possible d'intégrer dans le protocole modifiant le protocole additionnel (conclu le 27 juillet 2011) une règle d'interprétation conforme au standard OCDE. Toutes les CDI signées ultérieurement par la Suisse sont conçues sur ce même modèle et précisent, dans le protocole additionnel, à l'instar de la CDI-ES, que la demande de l'autorité requérante doit mentionner l'identité de la personne faisant l'objet d'un contrôle ou d'une enquête (cf. CDI du 12 septembre 2012 avec la République de Bulgarie, RS 0.672.921.41 ; CDI du 12 septembre 2013 avec la Hongrie, RS 0.672.941.81). La précision selon laquelle cette identité peut résulter d'autres informations que le nom, n'y figure pas. Celle-ci n'avait de sens que pour les CDI qui exigeaient la production du nom auparavant, ce qui n'était pas le cas de l'Espagne (cf. consid. 4.1.1). A cela s'ajoute que la clause de la nation la plus favorisée dont bénéficiait l'Espagne a précisément été abrogée parce que l'interprétation de l'art. 25bis sur l'échange de renseignements de la CDI-ES donnée par le protocole additionnel était conforme au standard exigé par l'OCDE depuis la modification de 2011 (cf. consid. 4.1.2). Il ne saurait dès lors être question d'exiger de l'autorité fiscale espagnole plus d'informations qu'il n'en est requis des autres pays.

5.1.6  Partant, il ressort de l'interprétation qui précède qu'il n'est pas nécessaire que la demande contienne le nom de la personne concernée pour que l'assistance administrative soit octroyée à l'Espagne. Reste toutefois à examiner si les informations fournies sont suffisantes pour identifier la personne concernée. Cette question se confondant avec celle relative au critère de l'interdiction de la « pêche aux renseignements », elle sera examinée plus loin (cf. consid. 6.1.2).

5.2  S'agissant des autres conditions formelles, le Tribunal relève qu'elles sont toutes satisfaites dans la mesure où l'autorité requérante indique la période visée (l'année 2013), la description des renseignements demandés, le nom de la banque émettrice de la carte de crédit ainsi que l'objectif fiscal qui fonde la demande. Au sujet de ce dernier point et au vue de la récente jurisprudence (arrêt du TF 2C_276/2016 précité), le fait que l'autorité requérante, qui ne connaît pas l'identité de la personne concernée, nourrisse de simples soupçons à l'égard de celle-ci, soupçons qui l'amènent à croire qu'il s'agit d'un contribuable espagnol à l'égard duquel un redressement fiscal est envisagé, sans pouvoir en apporter la preuve ni définir plus précisément l'objectif fiscal visé, ne fait en principe aucunement obstacle à l'octroi de l'assistance.

6.   

6.1  Pour ce qui est des conditions de fond, la recourante se plaint dans un premier grief que la demande d'assistance constituerait une « pêche aux renseignements » proscrite par la CDI-ES au motif que l'autorité requérante - qui ignore l'identité de la personne concernée - se limite à des spéculations au sujet de cette dernière. Elle réfute l'interprétation opérée à ce sujet par l'autorité inférieure qui se fonde sur le Commentaire du Modèle CDI-OCDE, lequel ne serait qu'un outil d'interprétation, inapplicable en l'espèce au vu des termes clairs du par. IV du protocole additionnel CDI-ES.

6.1.1  Il est vrai que le Commentaire de l'OCDE ne constitue pas une réglementation internationale au sens propre. Les explications du Commentaire ne sont donc qu'un moyen d'interprétation complémentaire, au même titre que les travaux préparatoires et les circonstances dans lesquelles un accord a été conclu (cf. ATAF 2011/6 consid. 7.3.1, 2010/7 consid. 3.6.2; arrêts du TAF A-3294/2014 du 8 décembre 2014 consid. 2.2.5, A-4232/2013 du 17 décembre 2013 consid. 4.6 ; Michael Beusch, Spezialisierung in der Justiz: Gedanken betreffend das öffentliche Recht im Allgemeinen und das Steuerrecht im Besonderen, in: Thomas Stadelmann [éd.], Spezialisierung in der Judikative [...], Berne 2013, p. 98). Cela étant, du moment que l'art.  25bis CDI-ES correspond au standard OCDE en matière d'échange de renseignements tel qu'il est libellé à l'art. 26 du Modèle CDI-OCDE (cf. consid. 4.1.2), les exigences à ce sujet peuvent donc être interprétées à la lumière du Commentaire (cf. ATF 142 II 161 consid. 2.1, 142 II 69 consid. 2.1, 141 II 436 consid. 4.4.3 ; arrêt du TF 2C_276/2016 précité consid. 6.1). A cet égard, la recourante fait fausse route à vouloir considérer que les termes du protocole sont limpides et ne correspondent pas au Modèle CDI-ES. En effet, comme déjà relevé (cf. consid. 5.1.1), elle cite dans son écriture de recours (cf. p. 9), des extraits d'un protocole additionnel qui n'est pas celui concernant la CDI-ES.

6.1.2  Selon le Commentaire, la norme de «pertinence vraisemblable» a pour but d'assurer un échange de renseignements en matière fiscale qui soit le plus large possible. Dans ce contexte, les limites posées à l'Etat requérant sont l'interdiction de la « pêche aux renseignements » ou celle de demander des renseignements manifestement impropres à faire progresser l'enquête fiscale ou sans rapport avec elle. Une demande de renseignements ne constitue pas une pêche aux renseignements du simple fait qu'elle ne précise pas le nom ou l'adresse (ou les deux) du contribuable faisant l'objet d'un contrôle ou d'une enquête. L'identification du contribuable doit cependant être possible autrement, sur la base d'informations suffisantes fournies par l'Etat requérant (cf. Commentaire sur l'art. 26 ch.  4.4 et 5.1). Le Commentaire donne quelques exemples, notamment au sujet de transactions opérées au moyen de cartes de crédit étrangères et il expose ce qui suit :

« L'État A a obtenu des renseignements sur toutes les transactions impliquant des cartes de crédit étrangères qui ont été réalisées sur son territoire durant une certaine année. L'État A a traité les données et lancé une enquête qui a identifié tous les numéros de cartes de crédit par rapport auxquels la fréquence et la configuration des transactions et le type d'utilisation au cours de cette année suggèrent que les titulaires étaient des résidents fiscaux de l'État A. L'État A ne peut obtenir les noms de ces personnes par le biais des sources habituelles de renseignements prévues par sa procédure fiscale interne, les informations pertinentes n'étant pas en possession ou sous le contrôle de personnes se trouvant dans sa juridiction. Les numéros de cartes de crédit identifient l'un des émetteurs de ces cartes comme étant la Banque B située dans l'État B. En se basant sur une investigation ou enquête en cours, l'État A envoie une demande de renseignements à l'État B, demandant le nom, l'adresse et la date de naissance des titulaires des cartes spécifiques identifiées durant son enquête et de toute autre personne ayant un pouvoir de signature sur ces cartes. L'État A fournit les numéros des cartes bancaires spécifiques concernées ainsi que les informations précisées ci-dessus afin de démontrer la pertinence vraisemblable des renseignements demandés pour son enquête et, plus généralement, pour l'administration et l'application de sa législation fiscale. »

6.1.3  La situation décrite au considérant qui précède - et également reproduite et expliquée dans l'arrêt du TF 2C_276/2016 précité consid. 6.1.2 - correspond en tout point au cas de l'espèce. L'autorité requérante a mené des investigations précises au sujet de transactions opérées au moyen de cartes de crédit étrangères pour l'année 2013. Elle a notamment identifié le numéro de la carte de crédit sur laquelle s'appuie la demande. Elle a fourni une description détaillée des faits et des circonstances qui ont motivé sa requête. Elle a également exposé les raisons qui lui permettent de penser que la personne titulaire de la carte de crédit en question - dont elle donne le numéro et le nom de la banque émettrice - était un contribuable espagnol qui n'a pas respecté la loi fiscale de son pays ; elle cite, en substance, la fréquence des retraits, le montant de ces derniers et le fait qu'ils ont tous été effectués à des distributeurs localisés à X._______ et que la carte n'a jamais été utilisée dans des commerces.

L'Etat requérant a ainsi fait valoir suffisamment de points de rattachement fiscal et l'ensemble des éléments qu'il cite est donc propre à écarter l'idée que la demande est aléatoire ou spéculative. Il y a donc lieu de retenir que la demande telle que formulée par l'autorité requérante ne constitue pas une pêche aux renseignements.

6.2  Par ailleurs, la condition de la pertinence vraisemblable est également réalisée dans la mesure où il est manifeste que les renseignements demandés ont un lien de connexité avec les circonstances présenté et sont de nature à être utilisés dans la procédure étrangère (cf. consid. 4.2.2.1). Dans ce contexte, il sied de rappeler qu'une demande d'assistance a précisément pour but de permettre à l'autorité requérante d'établir les faits (cf. ATF 129 II 484 consid. 4.1, 128 II 407 consid. 5.2.1, 127 II 142 consid. 5a; ATAF 2010/26 consid. 5.1; arrêts du TAF A- 7049/2014 du 19 février 2016 consid.8.2, A-6473/2012 du 29 mars 2013 consid. 3.2,), si bien que celle-ci n'a pas à apporter de preuve absolue mais doit démontrer l'existence de soupçons suffisants (cf. arrêt du TAF A-5229/2016 du 15 mars 2017 consid. 4.2.1, A-7188/2014 du 7 avril 2015 consid. 2.2.6) ; ce qui a été fait in casu.

6.3  Pour le surplus, le Tribunal ne voit pas de motif - et la recourante n'en soulève aucun - de remettre en doute le respect du principe de la subsidiarité (cf. consid. 4.2.2.3). Il n'existe pas non plus d'élément qui donnerait à penser que la demande d'assistance repose sur un comportement contraire à la bonne foi ou sur un acte punissable selon le droit suisse (cf. consid. 4.2.2.4). Par ailleurs, la recourante n'invoque aucune violation des prescriptions du droit de procédure de l'Etat requérant qui démontrerait que celui-ci cherche à obtenir des informations qu'il serait impossible de recueillir de manière générale sur la base de sa législation interne (cf. consid. 4.2.2.5).

En revanche, s'agissant du respect de la procédure de l'Etat requis, la recourante se plaint en substance d'une violation de l'art. 127 de la loi fédérale du 14 décembre 1990 sur l'impôt fédéral direct LIFD (RS 642.11) et se prévaut également de l'art. 4 al. 3 LAAF (dans sa teneur jusqu'au 31 décembre 2016, cf. RO 2013 231) qui excluait la transmission de renseignements concernant des personnes qui ne sont pas concernées par la demande, grief qu'il s'agit en conséquence d'examiner plus avant.

6.4   

6.4.1  Il est vrai que l'AFC doit respecter les règles et les limites du droit suisse lorsqu'elle demande des renseignements dans le cadre d'une procédure d'assistance administrative, sous réserve des exceptions résultant du droit international (cf. consid. 4.2.2.5). Selon une jurisprudence constante, ce principe implique en général que l'AFC doit tenir compte des limites découlant des art. 111 et 126 ss LIFD (cf. ATF 142 II 69 consid. 4 ; arrêts du TAF A-3830/2015 du 14 décembre 2016 consid. 13, A-2468/2016 du 19 octobre 2016 consid. 3.5.1, A-1015/2015 du 18 août 2016 consid.  11). Les dispositions de la LIFD à appliquer dépendent de la nature du détenteur de l'information. Dans le cas présent, l'autorité inférieure a décidé de transmettre aux autorités espagnoles des renseignements qui proviennent uniquement d'institutions bancaires. Le TAF considérait précédemment que l'AFC devait aussi respecter les règles de la procédure fiscale suisse lorsqu'elle mettait en oeuvre l'assistance administrative internationale en recherchant les informations souhaitées auprès d'une banque, le secret bancaire pouvant toutefois être ignoré (cf. arrêts du TAF A-3294/2014 du 8 décembre 2014 consid. 3.3, A-1606/2014 du 7 octobre 2014 consid. 7.2.1). Cela signifiait en particulier que l'AFC ne pouvait chercher à connaître le nom des bénéficiaires économiques d'un compte, du moins lorsqu'il n'existait aucun indice qu'un délit pénal fiscal au sens du droit suisse avait été commis (cf. les informations prévues à l'art. 127 LIFD). Cela étant, depuis la nouvelle jurisprudence du Tribunal fédéral du 24 septembre 2015 (ATF 141 II 439 et ATF 142 II 161), il convient de considérer désormais que l'AFC n'est pas liée par les règles de la procédure fiscale suisse et qu'elle peut en principe transmettre toutes les informations bancaires vraisemblablement pertinentes à l'Etat requérant, sur la base de la disposition conventionnelle topique, in casu l'art. 25bis par. 5 CDI-ES (cf. ATF 142 II 161 consid. 4.5 ss). Il faut dès lors admettre que les informations demandées au sujet de comptes bancaires détenus même indirectement, comme en l'espèce, par la personne concernée sont vraisemblablement pertinentes pour la taxation de cette personne dans l'Etat requérant (cf. arrêt du TAF A-3830/2015 du 14 décembre 2016 consid. 13). Partant, la recourante ne peut tirer argument du fait qu'elle n'est que l'une des ayants droit économiques du compte concerné pour s'opposer à la transmission de son nom.

6.4.2  La Haute Cour a aussi jugé que les limites imposées par l'art. 4 al. 3 LAAF (dans sa teneur jusqu'au 31 décembre 2016), qui interdit de donner aux autorités étrangères des renseignements sur des personnes qui ne sont pas concernées par la demande d'assistance, devaient être comprises d'une manière restrictive et interprétées à la lumière du critère conventionnel de la pertinence vraisemblable (cf. ATF 141 II 436 consid. 3.3 et 4.5, 142 II 161 consid. 4.6.1). Dès lors, cette disposition ne faisait point obstacle à ce que l'entier des documents bancaires liés à un compte, y compris les noms de tiers qui apparaissent dans ceux-ci, soient transmis aux autorités requérantes, hormis lorsque la mention d'un nom était le fruit d'un pur hasard, sans lien avec la situation de la personne concernée (cf. ATF 142 II 161 consid. 4.6.2). Ainsi, lorsqu'une personne assujettie à l'impôt est l'ayant droit économique d'une personne morale, un rapport avec l'affaire fiscale en cause apparaît à tout le moins probable pour exclure en tous les cas la qualité de tiers non impliqué. Partant, les renseignements qui concernent la personne morale ou la société sur laquelle s'exerce le contrôle économique doivent être qualifiés de vraisemblablement pertinents, au sens des CDI conçues sur le modèle standard de l'OCDE (cf. ATF 141 II 439 consid. 4.6).

6.4.3  Au surplus, l'art. 4 al. 3 LAAF a été modifié afin que soient intégrés les principes développés par le Tribunal fédéral qui viennent d'être exposés. Ainsi, depuis le 1er janvier 2017, « La transmission de renseignements concernant des personnes qui ne sont pas des personnes concernées est exclue lorsque ces renseignements ne sont pas vraisemblablement pertinents pour l'évaluation de la situation fiscale de la personne concernée ou lorsque les intérêts légitimes de personnes qui ne sont pas des personnes concernées prévalent sur l'intérêt de la partie requérante à la transmission des renseignements. »

6.4.4  Il s'ensuit que la recourante ne peut pas non plus valablement s'opposer à la transmission du nom de la banque et du numéro de compte lié à celle-ci, pas plus qu'à la mention du siège fiscal de la société titulaire du compte. Pour être complet, le Tribunal remarque par ailleurs que l'autorité inférieure ne donne pas suite - sans en expliquer le motif - à la demande de l'autorité fiscale espagnole qui exigeait également le nom de la dite société. Cela étant, si le TAF peut, en tant qu'autorité de recours, procéder d'office à une reformatio in pejus des décisions attaquées, il n'adopte une telle solution qu'avec retenue, dans la mesure où la décision attaquée apparaît manifestement erronée et la correction d'une importance non négligeable (cf. arrêts du TAF A-536/2016 du 16 novembre 2016 consid. 4.2, A-412/2013 du 4 septembre 2014 consid. 4 et les réf. cit.). Dans le cas présent, l'autorité fiscale espagnole pouvant déposer une nouvelle demande à ce sujet en tout temps, le Tribunal de céans renonce à entreprendre une reformatio in pejus.

7. 
Au vu de ce qui précède, le Tribunal constate que la décision litigieuse satisfait aux exigences de l'assistance administrative en matière fiscale. Dès lors qu'elle est fondée à tous les points de vue, le recours doit être rejeté.

8.   

8.1  La recourante, qui succombe, doit supporter les frais de procédure qui se montent, compte tenu de la charge de travail liée à la procédure, à 5'000 francs (cf. l'art. 63 al. 1 PA et art. 4 du règlement du 21 février 2008 concernant les frais, dépens et indemnités fixés par le TAF [FITAF, RS 173.320.2]). Ils seront prélevés sur l'avance de frais déjà versée de 10'000 francs. Le solde de 5'000 francs sera restitué à la recourante sur le compte bancaire qu'elle indiquera une fois le présent arrêt entrée en force.

8.2  Vu l'issue de la cause, il n'est pas alloué de dépens (art. 64 al. 1 PA et art. 7 al. 1 FITAF a contrario).

 

 

(dispositif à la page suivante)

 

 

Par ces motifs, le Tribunal administratif fédéral prononce :

1. 
Le recours est rejeté.

2. 
Les frais de procédure de 5'000 francs sont mis à la charge de la recourante. Ils seront imputés sur l'avance de frais déjà versée de 10'000 francs. Le solde de l'avance de frais de 5'000 francs lui sera restitué sur le compte bancaire qu'elle indiquera une fois le présent arrêt entré en force.

3. 
Il n'est pas alloué de dépens.

4. 
Le présent arrêt est adressé :

-        à la recourante (Acte judiciaire)

-        à l'autorité inférieure (n° de réf.  ; acte judiciaire)

 

Le président du collège :

La greffière :

 

 

Pascal Mollard

Valérie Humbert

Indication des voies de droit :

La présente décision, qui concerne un cas d'assistance administrative internationale en matière fiscale, peut être attaquée devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par la voie du recours en matière de droit public, dans les dix jours qui suivent la notification. Le recours n'est recevable que lorsqu'une question juridique de principe se pose ou qu'il s'agit pour d'autres motifs d'un cas particulièrement important au sens de l'art. 84 al. 2 LTF (art. 82, art. 83 let. h, art. 84a, art. 90 ss et art. 100 al. 2 let. b LTF). Le mémoire de recours doit exposer en quoi l'affaire remplit la condition exigée. En outre, le mémoire doit être rédigé dans une langue officielle et doit indiquer les conclusions, les motifs et les moyens de preuve, et être signé. La décision attaquée et les moyens de preuve doivent être joints au mémoire, pour autant qu'ils soient entre les mains du recourant (art. 42 LTF).

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