Décision confirmée par le TF par arrêt du 11.10.2018 (2C_343/2018)

 

 

 

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Cour I

A-5193/2016

 

 

 

 

 

Arrêt du 5 mars 2018

Composition

 

Pascal Mollard (président du collège),

Daniel Riedo, Jürg Steiger, juges,

Lysandre Papadopoulos, greffier.

 

 

 

Parties

 

A.________,  

représentée par Maître Stefano Fabbro  et

Maître Anaïs Loeffel,

recourante,

 

 

 

contre

 

 

Direction d'arrondissement des douanes Genève, Avenue Louis-Casaï 84, Case postale, 1211 Genève 28, 

agissant par la Direction générale des douanes (DGD), Division principale Procédures et exploitation, Monbijoustrasse 40, 3003 Berne,

autorité inférieure.

 

 

 

 

Objet

 

taxation de tabac pour pipes à eau.

 

 

 


Faits :

A. 
A._______ (ci-après: recourante) est une société inscrite au registre du commerce *** et a pour but en particulier la "vente et achat (import-export) de tabac, de cigarettes et de marchandises diverses".

B. 
La recourante allègue avoir passé trois commandes pour du tabac pour pipe à eau. Selon ces allégations, la commande n° 1 (21'990 kg) daterait du 21 mars 2015.

La commande n° 2 (6'760 kg) aurait été passée le 19 avril 2015.

La commande n° 3 (3'042 kg) daterait du 22 avril 2015. Cette dernière aurait été annulée, contrairement aux deux précédentes.

La commande n° 1 aurait été expédiée par fret maritime le 26 avril 2015.

La commande n° 2 aurait pour sa part été expédiée le 28 avril 2015 par fret aérien et le tabac pour pipe à eau serait "arrivé[...] à la douane de Genève le 29 avril 2015".

C. 
Une circulaire D120 du 29 avril 2015 n° 421.1-1/15.001 a été émise par la Direction générale des douanes (ci-après: DGD), Section imposition du tabac et de la bière. Cette circulaire, intitulée "Modification de l'ordonnance sur l'imposition du tabac (tabac pour pipe à eau)", indique que l'augmentation de l'impôt (consid. 7.4 ci-dessous) entre en vigueur le 1er mai 2015.

D. 
Selon la publication du 12 mai 2015, l'art. 2 al. 6 de l'ordonnance du 14 octobre 2009 sur l'imposition du tabac (OITab, RS 641.311) été introduit par le ch. I de l'ordonnance du 29 avril 2015 et est en vigueur depuis le 1er mai 2015 (RO 2015 1249).

E. 
Le tabac pour pipe à eau qui aurait fait l'objet de la commande n° 1 serait "arrivé[...] le 29 juin 2015 à Genève". La recourante soutient que le tabac commandé par elle serait actuellement stocké en port franc.

F. 
La recourante dit avoir initié les démarches de dédouanement pour 18 kg de la commande n° 2 le 19 août 2015 seulement, en raison de difficultés qui auraient résulté de la modification des règles appliquées.

G. 
Le 20 août 2015, le bureau de douane Genève Routes subdivision Port Franc a rendu une décision de taxation douane pour un montant de Fr. 1'616.75, avec le détail suivant:

Pour les droits de douane, la base de calcul est de 20.7 kg brut, au taux de Fr. 553.00 par 100 kg brut, ce qui implique un montant dû de Fr. 114.45.

Pour l'impôt sur le tabac, la base de calcul est de 18 kg poids effectif, au taux de Fr. 80.00 par kg poids effectif, ce qui implique un montant dû de Fr. 1440.00.

Pour les redevances SOTA, la base de calcul est de 18 "kg eff.", au taux de Fr. 1.73 par kg poids effectif, ce qui implique un montant dû de Fr. 31.15.

Pour le fonds de prévention du tabagisme, la base de calcul est de 18 "kg eff.", au taux de Fr. 1.73 par kg poids effectif, ce qui implique un montant dû de Fr. 31.15.

En même temps, une décision de taxation TVA pour du tabac pour pipe à eau a été rendue pour un montant de Fr. 146.90, avec pour base de calcul de la TVA (au taux de 8%) le montant de Fr. 1'836.-, comprenant la valeur TVA de Fr. 220.- et les redevances selon la décision de taxation douanes séparée (Fr. 1'616.75).

Les deux décisions indiquent "Masse effective: 18.000", "Masse brute: 21.4", "Poids net: 18" et "Tabac pour pipe à eau", "2403.1100".

H. 
Par recours du 8 octobre 2015 déposé auprès de la Direction d'arrondissement Genève (ci-après: DA Genève ou autorité inférieure) de l'Administration fédérale des douanes (ci-après: AFD), la recourante a demandé, sous suite de frais et dépens, l'admission de son recours et la réforme partielle des décisions rendues le 20 août 2015 en ce sens que l'impôt sur le tabac auquel est soumis le tabac pour pipe à eau objet de la commande relative à 6'760 kg de tabac expédiée en Suisse en date du 28 avril 2015 doit être calculé selon les dispositions de l'OITab en vigueur à cette date. La recourante a par ailleurs demandé à ce qu'il soit constaté que la marchandise objet de la commande relative à 21'990 kg de tabac expédiée en Suisse en date du 26 avril 2015 doit être taxée sur la base de l'OITab en vigueur à cette date. La recourante invoquait avant tout la violation du principe de non-rétroactivité des lois et la protection des droits acquis.

I. 
Par décision du 22 juin 2016, la DA Genève a décidé de rejeter le recours et de mettre à la charge de la recourante un émolument d'arrêté de Fr. 400.-.

J. 
Par recours du 26 août 2016 déposé auprès du Tribunal administratif fédéral, la recourante conclut au fond, principalement, de la manière suivante:

2. Annuler la décision rendue par l'AFD le 22 juin 2016 et notifiée le 27 juin 2016.

3. Dire et constater que l'impôt sur le tabac, s'agissant du tabac pour pipe à eau commandé et envoyé avant le 1er mai 2015, doit être calculé selon la législation en vigueur avant cette date.

4. Dire et constater que la décision rendue le 22 juin 2016 par l'AFD est modifiée en ce sens que l'impôt sur le tabac est calculé selon le taux en vigueur au 28 avril 2015.

5. Dire et constater que le tabac pour pipe à eau commandé et envoyé avant le 1er mai 2015 peut être vendu dans un emballage pour la vente au détail d'un contenu de 1000g, et ce malgré l'échéance des dates qu'ils comportent.

6. Condamner l'AFD en tous les frais et dépens de l'instance.

Subsidiairement, la recourante demande ce qui suit:

7. Annuler la décision rendue par l'AFD le 22 juin 2016 et notifiée le 27 juin 2016.

8. Renvoyer la cause à l'AFD pour nouvelle décision dans le sens des considérants rendus.

9. Condamner l'AFD en tous les frais et dépens de l'instance.

K. 
Par réponse du 22 novembre 2016, la DGD "propose" que le recours soit entièrement rejeté sous suite de frais, dans la mesure où les conclusions sont recevables. Il est également proposé que les conclusions qui sortent du cadre de l'objet du présent litige soient déclarées irrecevables.

L. 
Par écriture spontanée du 22 décembre 2016, la recourante a réitéré ses conclusions, portant à la connaissance du Tribunal des "faits nouveaux", dont il ressortirait que la nouvelle législation fédérale ne serait pas appliquée de manière uniforme dans les faits, contrairement à ce que soutiendrait l'AFD. Le 23 janvier 2017, la DGD a contesté l'approche de la recourante.

 

Droit :

1.   

1.1  Sous réserve des exceptions prévues à l'art. 32 de la loi fédérale du 17 juin 2005 sur le Tribunal administratif fédéral (LTAF, RS 173.32), celui-ci, en vertu de l'art. 31 LTAF, connaît des recours contre les décisions au sens de l'art. 5 de la loi fédérale du 20 décembre 1968 sur la procédure administrative (PA, RS 172.021), prises par les autorités mentionnées à l'art. 33 LTAF, notamment l'AFD et les directions d'arrondissements. En vertu de l'art. 116 al. 2 LD, l'AFD est représentée par la DGD dans les procédures devant le Tribunal administratif fédéral et le Tribunal fédéral (arrêts du TAF A-882/2016 du 6 avril 2017 consid. 1.1, A-5069/2010 du 28 avril 2011 consid. 1.1).

La procédure de recours devant le Tribunal administratif fédéral est régie par la PA, pour autant que la LTAF n'en dispose pas autrement (art. 37 LTAF; arrêts du TAF A-5216/2014 du 13 avril 2015 consid. 1.1, A-5127/2013 du 13 mars 2014 consid. 1.1, A-1681/2006 du 13 mars 2008 consid. 1.1).

1.2  La décision litigieuse, datée du 22 juin 2016, a été notifiée le 27 juin 2016. Le recours du 26 août 2016 a donc été déposé avant l'échéance du délai légal, vu les féries (art. 50 al. 1 PA; art. 22a al. 1 let. b PA), auprès du Tribunal. Conformément à l'art. 48 PA, la recourante dispose de la qualité pour recourir, puisqu'elle est destinataires de la décision attaquée. Le recours remplit en outre les exigences de l'art. 52 al. 1 PA.

Il convient donc d'entrer en matière.

2. 
La recourante peut invoquer la violation du droit fédéral, y compris l'excès ou l'abus du pouvoir d'appréciation (art. 49 let. a PA), la constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (art. 49 let. b PA) ainsi que l'inopportunité (art. 49 let. c PA). Le Tribunal administratif fédéral dispose ainsi d'un plein pouvoir de cognition. Il constate les faits et applique le droit d'office (art. 62 al. 4 PA). Néanmoins, il se limite en principe aux griefs invoqués et n'examine les autres points que dans la mesure où les arguments des parties ou le dossier l'y incitent (ATF 122 V 157 consid. 1a, 121 V 204 consid. 6c).

3. 
Afin de déterminer l'objet du litige de la procédure, il faut procéder selon les règles relatives à l'objet de la contestation et l'objet du litige (ATF 130 V 501 consid. 1). En procédure juridictionnelle administrative, ne peuvent être examinés et jugés, en principe, que les rapports juridiques à propos desquels l'autorité administrative compétente s'est prononcée préalablement, ou aurait dû le faire, d'une manière qui la lie sous la forme d'une décision. Dans cette mesure, la décision détermine l'objet de la contestation (Anfechtungsgegenstand) qui peut être déféré en justice par voie de recours. Le juge n'entre donc pas en matière, en règle générale, sur des conclusions qui vont au-delà de l'objet de la contestation (ATF 125 V 413 consid. 1a; Ulrich Meyer/Isabel Von Zwehl, L'objet du litige en procédure de droit administratif fédéral, in Mélanges Pierre Moor, 2005, p. 439 n° 8). L'objet du litige (Streitgegenstand) dans la procédure administrative subséquente est le rapport juridique qui - dans le cadre de l'objet de la contestation déterminé par la décision - constitue, d'après les conclusions du recours, l'objet de la décision effectivement attaqué. D'après cette définition, l'objet de la contestation et l'objet du litige sont identiques lorsque la décision administrative est attaquée dans son ensemble. En revanche, lorsque le recours ne porte que sur une partie des rapports juridiques déterminés par la décision, les rapports juridiques non contestés sont certes compris dans l'objet de la contestation, mais non pas dans l'objet du litige (ATF 130 V 501 consid. 1, 125 V 413 consid. 1b et 2 et les références citées; arrêt du TAF A-4363/2014 du 4 août 2016 consid. 3.1).

4.   

4.1  Le principe de la légalité s'applique de manière stricte en droit fiscal (ATF 139 II 460 consid. 2.1).

D'après la jurisprudence relative au principe de la légalité garanti par l'art. 4 de l'ancienne Constitution fédérale de la Confédération suisse du 29 mai 1874 (RO 1 I), et qui figure actuellement aux art. 127 al. 1 et 164 al. 1 let. d de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst., RS 101), la perception de contributions publiques - à l'exception des émoluments de chancellerie - doit être prévue, quant à son principe, dans une loi au sens formel (ATF 136 I 142 consid. 3.1). Si cette dernière délègue à l'organe exécutif la compétence d'établir une contribution, la norme de délégation ne peut constituer un blanc-seing en faveur de cette autorité; elle doit indiquer, au moins dans les grandes lignes, le cercle des contribuables, l'objet et la base de calcul de cette contribution (ATF 132 II 371 consid. 2.1, 129 I 346 consid. 5.1; arrêt du TAF A-3479/2012 du 8 janvier 2013 [= ATAF 2014/8] consid. 2.1.3).

4.2  On classe habituellement les ordonnances du Conseil fédéral en plusieurs catégories.

Tout d'abord, il existe une distinction opposant les ordonnances indépendantes (selbständige Verordnungen) aux ordonnances dépendantes (unselbständige Verordnungen). Les premières sont basées directement sur la Constitution fédérale, qui autorise, expressément ou implicitement, le Conseil fédéral à adopter un certain nombre d'ordonnances. Cette différence est exclusive, en ce sens qu'une ordonnance est soit indépendante, auquel cas elle se fonde directement et exclusivement sur la Constitution, soit dépendante, auquel cas elle dépend exclusivement d'un acte infra-constitutionnel (arrêts du TAF A-1405/2014  du 31 juillet 2015 consid. 2.1.1, A-718/2013 du 27 décembre 2013 consid. 1.2.2).

Une autre distinction distingue entre les ordonnances d'exécution et de substitution, même s'il est vrai que les ordonnances présentent le plus souvent un contenu mixte, fait à la fois de simples règles d'exécution et de règles primaires (ATF 139 II 460 consid. 2.2, 136 I 29 consid. 3.3; arrêt du TAF A-2421/2016 du 3 octobre 2017 consid. 4.2). La distinction entre règles primaires et règles secondaires peut prêter à discussion (voir ATF 133 II 331 consid. 7.2.2). Elle est néanmoins importante quant à l'exigence de la base légale: une délégation législative est indispensable pour que l'auteur de l'ordonnance puisse adopter des règles primaires (arrêt du TF 2C_744/2014 du 23 mars 2016 [confirmant l'arrêt du TAF A-5414/2012 du 19 juin 2014] consid. 7.1; arrêt du TAF A-4357/2015 du 10 juillet 2017 consid. 2.1.1).

4.3   

4.3.1  Selon la jurisprudence, les principes de la légalité et de la séparation des pouvoirs limitent le droit du Conseil fédéral d'édicter des ordonnances d'exécution par quatre règles. En premier lieu, l'ordonnance d'exécution doit se rapporter à la même matière que celle qui fait l'objet de la loi qu'elle exécute. Ensuite, elle ne peut ni abroger, ni modifier cette loi. En troisième lieu, elle doit rester dans le cadre tracé et la finalité poursuivie par la loi et se contenter de préciser la réglementation dont celle-ci contient le fondement. Enfin, l'ordonnance d'exécution ne doit pas imposer au citoyen de nouvelles obligations qui ne sont pas prévues par la loi, et ceci même si ces compléments sont conformes au but de la loi (ATF 136 I 29 consid. 3.3, 130 I 140 consid. 5.1; arrêts du TAF A-2032/2013 du 27 août 2014 consid. 2.3.2.1, A-718/2013 du 27 décembre 2013 consid. 1.2.3, A-3479/2012 du 8 janvier 2013 [= ATAF 2014/8] consid. 2.3, A-6331/2010 du 3 février 2012 consid. 7.3.3.1, A-3127/2008 du 25 novembre 2008 [= ATAF 2009/6] consid. 5.1.1).

4.3.2  L'art. 164 al. 2 Cst. concrétise le principe de la délégation législative, admis en droit fédéral (ATF 134 I 322 consid. 2.4; Piermarco Zen-Ruffinen, Droit administratif, Partie générale et éléments de procédure, 2013, n. marg. 218). Le Tribunal fédéral soumet la délégation de compétences législatives horizontale au respect de quatre conditions qui ont elles-mêmes valeur constitutionnelle. De manière générale, une délégation législative est admissible lorsqu'elle 1) n'est pas exclue par la Constitution fédérale (art. 164 al. 2 Cst.); 2) figure dans une loi formelle fédérale (art. 164 al. 2 Cst.) ou cantonale; 3) se limite à une matière déterminée et bien délimitée; 4) énonce elle-même les points essentiels (Grundzügen) sur lesquels doit porter la matière à réglementer (ATF 137 II 409 consid. 6.4, 118 Ia 245 consid. 3, arrêt du TF 2C_744/2014 du 23 mars 2016 consid. 7, Zen-Ruffinen, op. cit., n. marg. 220 et les arrêts cités; arrêts du TAF A-4357/2015 du 10 juillet 2017 consid. 2.2.1, A-2414/2012 du 19 juin 2014 consid. 2.4.1).

4.4   

4.4.1  Le contrôle préjudiciel des ordonnances du Conseil fédéral appartient à toutes les autorités, fédérales aussi bien que cantonales, chargées de les appliquer. Il ne s'agit d'ailleurs pas d'une faculté, mais d'une obligation: l'autorité qui refuse d'examiner la régularité d'une ordonnance du Conseil fédéral, alors même que le recourant a soulevé valablement un tel grief, commet un déni de justice. En cas d'admission du recours, le juge ne pourra pas annuler l'ordonnance qu'il estime inconstitutionnelle ou non conforme à la loi. Il refusera simplement de l'appliquer et cassera la décision fondée sur elle. Il appartiendra ensuite à l'auteur de l'ordonnance soit au Conseil fédéral, de la modifier ou de l'abroger formellement, pour rétablir une situation conforme à la Constitution ou à la loi (arrêts du TAF A-882/2016 du 6 avril 2017 consid. 1.2.3, A-2032/2013 du 27 août 2014 consid. 2.4.2; voir aussi arrêt du TF 2C_1174/2012 du 16 août 2013 consid. 1.7).

4.4.2  Le contrôle des ordonnances d'exécution se fait en deux étapes. Tout d'abord, les ordonnances d'exécution doivent être soumises à un contrôle de légalité. L'autorité chargée de les appliquer examine en premier lieu si elles restent dans le cadre de la loi, se contentent d'en préciser le contenu ou d'en définir les termes. Lorsqu'en revanche une ordonnance d'exécution contient des règles primaires, à savoir des dispositions qui étendent le champ d'application de la loi en restreignant les droits des administrés ou en imposant à ceux-ci des obligations, sans que ces règles puissent se fonder sur une délégation législative spécifique, elle viole le principe constitutionnel de la séparation des pouvoirs, de sorte que le juge refusera de l'appliquer et annulera la décision attaquée (ATF 134 I 313 consid. 5.3, 124 I 127 consid. 3; arrêt du TAF A-5414/2012 du 19 juin 2014 consid. 2.4.3; Michael Beusch, Der Untergang der Steuerforderung, 2012, p. 17 ss). Puis, le contrôle de la légalité est suivi d'un contrôle de constitutionnalité des ordonnances d'exécution. Tout en restant dans le cadre de la loi, il se peut que de telles ordonnances contiennent une violation originaire de la Constitution, auquel cas le juge doit refuser de les appliquer. On peut penser à une ordonnance d'exécution qui consacrerait une inégalité de traitement ou contiendrait une règle contraire à la répartition des compétences entre la Confédération et les cantons (voir ATF 104 Ib 171; arrêt du TAF A-6777/2013 du 9 juillet 2015 consid. 2.2.3).

4.4.3   

4.4.3.1  La contrôle préjudiciel des ordonnances de substitution, à savoir les ordonnances fondées sur une délégation législative comporte trois phases: le contrôle des conditions de la délégation législative, celui de la conformité de l'ordonnance avec cette délégation et enfin celui de la constitutionnalité de l'ordonnance (arrêt du TAF A-2032/2013 du 27 août 2014 consid. 2.4.4, voir aussi arrêt du TAF A-4407/2012 du 1er mai 2013 consid. 3.1.1).

4.4.3.2  L'admissibilité de la délégation législative en droit fédéral dépend du respect des conditions auxquelles la Constitution et la jurisprudence du Tribunal fédéral la soumettent (art. 164 al. 2 Cst.; voir consid. 4.3.2 ci-dessus). La particularité de la délégation législative en droit fédéral tient à ce que le Tribunal fédéral est tenu d'appliquer la loi fédérale dans laquelle elle figure (art. 190 Cst.). Le Tribunal fédéral est en principe habilité à examiner, dans un cas particulier, si le législateur fédéral a respecté les conditions de la délégation législative. S'il arrive à la conclusion que tel n'est pas le cas, il doit cependant s'en tenir à cette délégation, c'est-à-dire l'appliquer (arrêts du TAF A-2032/2013 du 27 août 2014 consid. 2.4.5, A-5414/2012 du 19 juin 2014 consid. 2.4.5).

Le problème se pose principalement au regard du contenu suffisamment déterminé de la délégation législative. Même lorsque la délégation législative confère au Conseil fédéral, en violation des exigences constitutionnelles, un très large pouvoir d'appréciation, le Tribunal fédéral reste en principe lié, en vertu de la règle de l'art. 190 Cst. Encore faut-il cependant que la délégation soit suffisamment précise et qu'elle habilite effectivement le Conseil fédéral à adopter une règlementation inconstitutionnelle. En d'autres termes, le Tribunal fédéral s'efforce d'interpréter les délégations législatives, même trop larges, de façon conforme à la Constitution (ATF 136 II 337 consid. 5.1; arrêt du TAF A-5414/2012 du 19 juin 2014 consid. 2.4.5).

4.4.3.3  Les ordonnances de substitution sont ensuite soumises à un contrôle de légalité. L'autorité chargée de les appliquer vérifie donc si elles restent dans le cadre et dans les limites de la délégation législative. Lorsque celle-ci - comme c'est souvent le cas - est relativement imprécise et donne au Conseil fédéral un large pouvoir d'appréciation, le Tribunal fédéral estime, dans une jurisprudence constante, qu'il doit se "borner à examiner si les dispositions incriminées sortent manifestement du cadre de la délégation de compétences donnée par le législateur à l'autorité exécutive. Ce n'est donc que lorsque l'ordonnance sort manifestement du cadre de la loi que le juge refuse de l'appliquer" (ATF 133 V 42 consid. 3.1, 131 V 14 consid. 3.4.1, 129 II 160 consid. 2.3, arrêt du TF 2C_425/2014 du 18 juillet 2015 consid. 2.3.5; arrêt du TAF A-3479/2012 du 8 janvier 2013 [= ATAF 2014/8] consid. 2.4).

4.4.3.4  Le contrôle de constitutionnalité des ordonnances dépendantes de substitution forme la dernière étape du contrôle préjudiciel auquel celles-ci sont soumises. Tout en restant dans le cadre de la délégation législative et sans que cette dernière comporte elle-même une irrégularité, il se peut que l'ordonnance du Conseil fédéral porte directement atteinte à la Constitution ou au droit international, auquel cas le juge doit refuser de l'appliquer. Selon la jurisprudence, il lui incombe d'examiner si l'ordonnance se fonde sur des motifs sérieux ou si elle viole l'art. 9 Cst., parce qu'elle n'a ni sens ni but, établit des distinctions qui ne sont pas justifiées par les faits à réglementer ou ignore des distinctions qui auraient dû être prévues (ATF 141 II 169 consid. 3.4, 136 II 337 consid. 5.1, 136 V 24 consid. 7.1; arrêt du TAF A-6777/2013 du 9 juillet 2015 consid. 2.2.7).

5.   

5.1  On parle de rétroactivité lorsque la loi attache des conséquences juridiques nouvelles à des faits qui se sont produits et achevés entièrement avant l'entrée en vigueur du nouveau droit (Thierry Tanquerel, Manuel de droit administratif, 2011, n° 417; ATF 122 II 124 consid. 3b/dd, 119 Ia 254 consid. 3a).

En revanche, il n'y a pas de rétroactivité proprement dite si la nouvelle règle s'applique à un état de choses durable, non entièrement révolu dans le temps; il s'agit d'une rétroactivité impropre (unechte Rückwirkung), qui est en principe admise si elle ne porte pas atteinte à des droits acquis (ATF 138 I 189 consid. 3.4, 126 V 134 consid. 4a, 122 V 405 consid. 3b/aa, 122 V 8 consid. 3a, arrêt du TF 2C_236/2010 du 14 octobre 2010 consid. 1.1).

5.2  Portant atteinte au principe de la sécurité et de la prévisibilité du droit (ATF 122 V 405 consid. 3b/aa, 119 Ia 254 consid. 3b, 119 V 4 consid. 2a), que l'on peut rattacher à l'art. 5 al. 1 Cst., la rétroactivité proprement dite est normalement exclue (Pierre Moor/Alexandre Flückiger/Vincent Martenet, Droit administratif, Les fondements, vol. I, 3e éd., 2012, p. 192), sauf exceptions soumises à de strictes conditions, à savoir 1) la rétroactivité doit être prévue par la loi, 2) elle doit être raisonnablement limitée dans le temps, 3) elle ne doit pas conduire à des inégalités choquantes, 4) elle doit se justifier par des motifs pertinents et 5) elle ne doit pas porter atteinte à des droits acquis (ATF 138 I 189 consid. 3.4, 135 I 233 consid. 15.3; Tanquerel, op. cit., n° 420). Ces conditions valent chaque fois que la règle rétroactive entend imposer des obligations nouvelles ou retirer des avantages aux administrés (sofern sie sich belastend auswirkt) (arrêt du TF 2A.228/2005 du 23 novembre 2005 consid. 2.3). L'exclusion de la rétroactivité implique ainsi en principe de retenir les dispositions qui existaient au moment où s'est produit l'état de fait dont doivent découler des conséquences juridiques (ATF 138 I 189 consid. 3.4, 122 V 405 consid. 3b, 122 II 124 consid. 3b/dd, 119 Ib 103 consid. 5; ATAF 2007/25 consid. 3.1, arrêts du TAF A-2925/2010 du 25 novembre 2010 consid. 1.1, A-1766/2006, A-55/2007 du 25 septembre 2008 consid. 1.2).

La rétroactivité peut être possible lorsque la modification emporte amélioration de la situation juridique de l'intéressé (rétroactivité d'un acte favorable [Rückwirkung begünstigender Erlasse]; lex mitior; ATF 119 Ib 103 cnsid. 5, 99 V 200 consid. 2; ATAF 2007/25 consid. 3.1). Les conditions susvisées demeurent cela dit en principe applicables dans un tel contexte (Moor/Flückiger/Martenet, op. cit., p. 201 s.; Tanquerel, op. cit., n° 421). En particulier, la rétroactivité doit être prévue par la loi (ATF 105 Ia 36 consid. 3) et ne pas conduire à une inégalité de traitement (Tanquerel, op. cit., n° 421; ATAF 2007/25 consid. 3.1, arrêt du TAF A-2997/2016 du 6 avril 2017 consid. 3.9).

6.   

6.1  La Confédération perçoit un impôt sur les tabacs manufacturés (Tabakfabrikaten) ainsi que sur les matières qui sont utilisées de la même manière que le tabac (produits de substitution; art. 1 al. 1 de la loi fédérale du 21 mars 1969 sur l'imposition du tabac [LTab, RS 641.31]).

6.2  Sont soumis à l'impôt les tabacs manufacturés fabriqués industriellement en Suisse et prêts à la consommation, ainsi que les tabacs manufacturés importés (art. 4 al. 1 let. a LTab; arrêt du TAF A-3454/2010 du 19 août 2011 consid. 2.1).

6.3  Sont assujettis à l'impôt pour les tabacs manufacturés importés le débiteur de la dette douanière (art. 6 let. b LTab). Est débiteur de la dette douanière notamment la personne qui conduit ou fait conduire les marchandises à travers la frontière douanière (art. 70 al. 2 let. a LD; arrêt du TAF A-5971/2012 du 9 juillet 2013 consid. 2.3; sur le caractère large de cette notion, voir Lysandre Papadopoulos, Notion de débiteur de la dette douanière: fer de lance de l'Administration des douanes, Revue douanière 1/2018 30 ss).

6.4  L'impôt est dû pour les tabacs manufacturés importés, conformément aux dispositions applicables à la naissance de la dette douanière (art. 9 al. 1 let. b LTab). La dette douanière naît au moment où le bureau de douane accepte la déclaration en douane (art. 69 let. a LD; arrêts du TAF A-5971/2012 du 9 juillet 2013 consid. 2.3, A-1265/2011 du 3 juillet 2012 consid. 2.2).

6.5   

6.5.1  L'impôt est fixé (base de calcul) pour le tabac à coupe fine et le tabac pour pipe à eau, par kilogramme et en pour-cent du prix de vente au détail (art. 10 al. 1 let. b LTab, 1). Cette version est issue de la modification du 17 mars 2017, en vigueur depuis le 1er septembre 2017 (RO 2017 4041).

Avant cette modification, l'art. 10 al.1 let. b LTab prévoyait que l'impôt est fixé pour le tabac à coupe fine, par kilogramme et en pour-cent du prix de vente au détail, conformément à la modification du 19 décembre 2008, alors en vigueur depuis le 1er janvier 2010 (RO 2009 5561).

L'impôt grevant les tabacs manufacturés se calcule d'après les tarifs figurant dans les annexes I à IV (art. 11 al. 1 LTab; arrêt du TAF A-5971/2012 du 9 juillet 2013 consid. 2.4.1).

6.5.2  L'annexe I à la LTab concerne le tarif d'impôt pour les cigarettes, et l'annexe II règlemente le tarif d'impôt pour les cigares et les cigarillos (voir aussi art. 11 al. 1 LTab).

6.5.3  Selon l'annexe III à la LTab intitulée "Tarif d'impôt pour le tabac à coupe fine et le tabac pour pipe à eau" (voir la modification du 17 mars 2017 [RO 2017 4041], en vigueur depuis le 1er septembre 2017), l'impôt se monte à Fr. 38.- par kg et à 25 % du prix de vente au détail, mais à Fr. 80.- au moins par kg (arrêt du TAF A-882/2016 du 6 avril 2017 consid. 3.3.2).

Dans sa version en vigueur avant le 1er septembre 2017, l'annexe III à la LTab était intitulée "Tarif d'impôt pour le tabac à coupe fine" (RO 2009 5561).

Selon le message du 17 juin 2016 relatif à la modification de la loi sur l'imposition du tabac (FF 2016 4971, 4974),

"[l]'importation de tabac pour pipe à eau a fortement augmenté ces dernières années. Pour éviter que les jeunes ne soient incités à passer à ce produit, dont le prix est plus avantageux que celui des cigarettes mais dont les effets sur la santé ne sont pas moins néfastes, le Conseil fédéral a décidé, par la modification du 29 avril 2015 de l'ordonnance du 14 octobre 2009 sur l'imposition du tabac, de traiter le tabac pour pipe à eau de la même manière que le tabac à coupe fine pour la confection de cigarettes roulées à la main. Ce changement a consolidé l'assiette fiscale et a en outre supprimé l'incitation à revendre à l'étranger le tabac pour pipe à eau, qui était jusqu'ici importé en Suisse à des conditions plus avantageuses. Il est donc maintenant judicieux de citer nommément ces tabacs manufacturés dans la LTab. La clarification et l'attribution univoque des tabacs manufacturés à leur tarif d'impôt respectif sont dans l'intérêt de l'application correcte du droit."

6.5.4  Pour le tabac à fumer autre que le tabac à coupe fine et les autres tabacs manufacturés ainsi que pour le tabac à mâcher et à priser, l'impôt se monte à 12 % du prix de vente au détail pour les premiers, respectivement 6 % pour le dernier (annexe IV à la LTab).

7.   

7.1   

7.1.1  En l'espèce, en ce qui concerne l'objet du litige, le Tribunal précise qu'il porte sur la décision du 22 juin 2016, qui rejette le recours contre les décisions du 20 août 2015, à savoir la décision de taxation douane et la décision de taxation TVA, toutes deux relatives aux redevances d'entrées pour 18 kg, respectivement 20.7 kg de tabac pour pipe à eau.

Il en résulte que seul ce tabac effectivement taxé peut faire l'objet du litige devant le Tribunal de céans. Il convient par ailleurs de préciser les éléments suivants, toujours afin de cadrer la portée de l'examen du Tribunal en l'occurrence.

7.1.2  La conclusion n° 3 tendant à ce qu'il soit constaté que l'impôt sur le tabac commandé et envoyé avant le 1er mai 2015 doit être calculé selon la législation en vigueur avant cette date sort de l'objet de la contestation.

Certes, dans les conclusions de son recours du 8 octobre 2015, la recourante avait demandé la réforme partielle des décisions contestées en ce sens que l'impôt relatif à la commande n° 2 devait être calculé selon les dispositions en vigueur au 28 avril 2015. Certes encore, la recourante avait sollicité la constatation que la marchandise concernée par la commande n° 1 soit taxée selon le droit en vigueur au 26 avril 2015.

A ce propos toutefois, on ne voit pas que le dispositif de la décision attaquée traite formellement ces conclusions. Tout au plus la décision se réfère-t-elle dans ses considérants aux dates des trois commandes discutées par la recourante. La DA Genève ne semble ainsi pas avoir relevé que les conclusions émargeaient des objets de la contestation, à savoir les décisions du 20 août 2015, qui ne concernaient qu'une portion du tabac ayant selon toute vraisemblance fait l'objet de la commande n° 2. Or, la DA Genève n'avait pas à traiter ces conclusions, qui étaient déjà comprises dans la conclusion tendant à l'admission du recours et à la réforme partielle des décisions contestées quant au montant de l'impôt réclamé, cette conclusion relative à l'obtention d'une décision formatrice comprenant toute conclusion tendant à l'obtention d'une décision en constatation. Peut-être la DA Genève aurait-elle pu et dû, il est vrai, brièvement se prononcer sur la manière dont elle entendait traiter ces conclusions, mais il est clair en tout cas que tout déni de justice (voir art. 46a PA; art. 50 al. 2 PA; ATF 130 II 521 consid. 2.5; ATAF 2010/53 consid. 1.2.3, 2009/1 consid. 3) est exclu ici, la recourante ne s'en plaignant du reste pas. Le Tribunal n'avancera donc pas plus avant sur ce terrain, étant précisé, au demeurant, qu'un intérêt digne de protection (art. 25 al. 2 PA) conditionnant la procédure en constatation (ATF 130 V 388 consid. 2.4; arrêt du TAF A-4092/2016 du 17 mars 2017 consid. 1.2; arrêt du TAF A-2766/2016 du 18 avril 2017 consid. 3.7) n'apparaît pas évident en l'état du dossier.

Considérer, comme semble le faire la DGD dans sa réponse, que la conclusion n° 3 serait une demande d'autorisation d'obtenir la taxation de 28'750 kg de tabac pour pipe à eau selon le droit en vigueur jusqu'à fin avril 2015 ne change rien à la conclusion précitée du Tribunal.

7.1.3  La question, soulevée sous la conclusion n° 5, de savoir si les emballages peuvent être commercialisés tels quels, ou s'ils peuvent tout simplement être encore commercialisés, vu l'échéance de la date de péremption (même après celle-ci, le tabac serait "tout à fait consommable", selon la recourante), sort également de l'objet de la contestation. Certes, les problématiques du conditionnement dans un emballage de 250 g (plus contraignant, selon la recourante, que l'emballage de 1000 g) ainsi que celle de la date de péremption ont été mentionnées dans le recours du 8 octobre 2015 (p. 7 et 10 s.). Par ailleurs, il est vrai, que la DGD se dit dans sa réponse, "prête autoriser l'importation des 28'750 kg de tabac pour pipe à eau [...] en emballage de 1000 g". Ces problématiques ne peuvent pas pour autant faire l'objet du litige, d'abord parce que la décision ne les traite pas ni devait les traiter, mais surtout parce qu'aucune conclusion y relative n'a été déposée avec le recours du 8 octobre 2015, ce d'autant plus qu'ici non plus, on ne voit pas d'allégation de déni de justice. La conclusion n° 5 est donc irrecevable.

7.1.4  La recourante suggère par ailleurs que la décision du 22 juin 2016 n'aurait pas été rendue assez rapidement, au vu de l'indication de l'urgence de la situation dans le recours du 8 octobre 2015. En effet, les frais de stockage seraient très élevés, ce d'autant plus que la possibilité d'importer du tabac pour pipe à eau dans des emballages de 1000 g n'aurait existé que jusqu'au 31 décembre 2015, ce qui obligerait la recourante, après cette date, à reconditionner tous ces emballages. Dans une réserve émise "à titre liminaire", on voit que la recourante se plaint "des dommages subis" par elle. Toutefois, le Tribunal ne voit pas en quoi ces allégations supportent les conclusions du recours, qui ne font pas mention desdits dommages. Partant, le Tribunal ne se penchera pas plus avant sur ces aspects.

7.2   

7.2.1  Ce cadre posé, le Tribunal peut en venir au coeur du litige. Les parties ne s'accordent pas, en substance, sur la possibilité d'appliquer à raison du temps l'art. 2 al. 6 OITab à la présente affaire. Or, d'entrée de cause, le Tribunal souligne qu'il a déjà prononcé un arrêt relatif à l'art. 2 al. 6 OITab, jugeant ce dernier inapplicable pour non-conformité à la LTab (arrêt du TAF A-882/2016 du 6 avril 2017).

Il n'est certes pas allégué ici que l'art. 2 al. 6 OITab n'est pas conforme à la LTab. Cela dit, le Tribunal appliquant le droit d'office, il relève que dans son arrêt précité consid. 4.1, il a considéré, en substance, que l'art. 2 al. 6 OITab est une ordonnance dépendante de substitution. A ce titre, le Tribunal s'était concentré sur l'examen de la deuxième phase du contrôle préjudiciel de l'ordonnance, à savoir le contrôle de la conformité de l'ordonnance avec la délégation législative (consid. 4.4.3.3 ci-dessus), en déterminant d'abord le cadre légal posé par la LTab (arrêt du TAF A-882/2016 du 6 avril 2017 consid. 4.2 s.), puis le respect, par l'OITab, de ce cadre (ibid. consid. 4.4). C'est donc cette jurisprudence qui guidera l'examen de la présente affaire.

7.2.2  Compte tenu du principe de non-rétroactivité des lois (consid. 5.2 ci-dessus), le Tribunal examinera ci-dessous les règles telles qu'elles étaient en vigueur avant le 1er septembre 2017, étant donné qu'il n'est pas contesté que les faits litigieux se sont déroulés avant cette date. Dans son contrôle préjudiciel de l'art. 2 al. 6 OITab - une norme de substitution contenue dans une ordonnance dépendante (consid. 4.2 ci-dessus) - le Tribunal examinera le cadre légal de la LTab devant être respecté par le Conseil fédéral dans l'édiction de l'OITab (consid. 7.3), en déterminant les catégories légales de produits (consid. 7.3.1), de même que la définition de tabac à coupe fine (consid. 7.3.2). Enfin, on en viendra à la question de savoir si, sur le point litigieux, l'OITab est conforme à la LTab (consid. 7.4), avant d'en tirer la conclusion qui s'impose (consid. 7.5).

7.3   

7.3.1  D'abord, le Tribunal relève que la marge de manoeuvre conférée au Conseil fédéral par l'art. 1 al. 2 LTab pour définir les expressions "tabacs manufacturés et produits de substitution" est en réalité limitée aussi bien par l'art. 10 al. 1 LTab que par les quatre annexes à la LTab, auxquelles renvoie l'art. 11 al. 1 LTab. Il en résulte en effet les catégories suivantes:

-         cigarettes, cigares et cigarillos (art. 10 al. 1 let. a LTab; annexes I et II à la LTab);

-         tabac à coupe fine (art. 10 al. 1 let. b aLTab; ancienne annexe III à la LTab);

-         tabac à fumer autre que le tabac à coupe fine et les autres tabacs manufacturés, ainsi que le tabac à mâcher et à priser (art. 10 al. 1 let. c LTab; annexe IV à la LTab).

En l'absence, en l'occurrence, d'une norme de délégation autorisant le Conseil fédéral à se départir de ces catégories légales, l'OITab doit s'en tenir à ce cadre et aux distinctions existant entre les différentes catégories, sauf à violer le principe de la légalité, qui trouve à s'appliquer de manière stricte en droit fiscal (consid. 4.1 ci-dessus; arrêt du TAF A-882/2016 du 6 avril 2017 consid. 4.2.1 s. et 4.3.4).

7.3.2  Or, l'art. 2 al. 6 OITab établi une fiction selon laquelle est également réputé tabac à coupe fine le tabac pour pipe à eau. A ce propos, la notion de tabac à coupe fine doit se comprendre avant tout comme du tabac destiné la confection de cigarettes roulées à la main (arrêt du TAF A-882/2016 du 6 avril 2017 consid. 4.3.2; message du 21 décembre 2007 relatif à la modification de la loi fédérale sur l'imposition du tabac, FF 2008 447, 453 et 455). Par ailleurs, la révision de la LTab du 19 décembre 2008 avait pour but de simplifier la structure fiscale appliquée à tous les tabacs manufacturés autres que les cigarettes et incidemment à la rendre compatible avec le droit européen (arrêt du TAF A-882/2016 du 6 avril 2017 consid. 4.3.2). La forte augmentation de l'impôt grevant le tabac à coupe fine a un objectif de santé publique: on cherche à endiguer l'augmentation de la confection de cigarettes roulées à la main (message du 21 décembre 2007 relatif à la modification de la loi fédérale sur l'imposition du tabac, FF 2008 447, 453).

En outre, le tabac à coupe fine est compris dans la position tarifaire n° 2403 ("Autres tabacs et succédanés de tabac, fabriqués; tabacs 'homogénéisés' ou 'reconstitués'; extraits et sauces de tabac") comprenant le tabac à fumer, même contenant des succédanés de tabac en toute proportion, par exemple le tabac fabriqué utilisé pour la pipe ou pour la confection de cigarettes (voir les notes explicatives du tarif des douanes [Erläuterungen zum Zolltarif; www.tares.ch]). Le tabac pour pipe à eau a son numéro de tarif propre compris dans le n° 2403, à savoir le 2403.1100. Or, selon les notes du tarif des douanes (Anmerkungen zum Zolltarif), au sens de la positon tarifaire n° 2403.11, il faut entendre par "tabac pour pipe à eau" le tabac destiné à être fumé dans une pipe à eau et qui est constitué par un mélange de tabac et de glycérol, même contenant des huiles et des extraits aromatiques, des mélasses ou du sucre et même aromatisé aux fruits. Toutefois, les produits pour pipe à eau, ne contenant pas de tabac, sont exclus de ladite sous-position.

Il résulte de ce qui précède, et de la LTab en particulier, que le tabac à coupe fine et le tabac pour pipe à eau sont des produits différents (arrêt du TAF A-882/2016 du 6 avril 2017 consid. 4.3.3).

7.4  Le Tribunal en vient à présent à l'analyse de la conformité de l'OITab à la LTab. En tant que le tabac à coupe fine est défini comme du tabac à fumer pour lequel les particules de tabac présentent une largeur de coupe inférieure à 1,2 mm (art. 2 al. 2 OITab), cette définition est conforme à la loi et à son esprit (arrêt du TAF A-882/2016 du 6 avril 2017 consid. 4.4.1).

Cela précisé, le tabac pour pipe à eau ne saurait être compris dans cette définition. En effet, ce dernier se distingue du tabac à coupe fine fondamentalement aussi bien par sa texture que par son mode d'utilisation, comme le Tribunal l'a déjà exposé de manière détaillée (arrêt du TAF A-3123/2011 du 17 janvier 2012 consid. 6.2.1).

Le fait que la hausse de la charge fiscale engendrée par la modification de l'art. 2 al. 6 OITab au 1er mai 2015 serait supportable pour le consommateur final (donc que la modification serait conforme à l'intérêt public et au principe de proportionnalité, selon la DGD), ne change rien au fait que le cadre légal n'a pas été respecté. L'art. 2 al. 6 OITab ne pouvait donc être applicable qu'en présence d'une base légale formelle, pourtant absente à l'époque des faits.

Le Tribunal reconnaît, il est vrai, que l'art. 10 al. 1 let. b LTab contient, à ce jour, la notion de tabac pour pipe à eau, alors que tel n'était manifestement pas le cas lors du prononcé de l'arrêt A-882/2016 du 6 avril 2017, rendu avant l'entrée en vigueur de la modification législative du 1er septembre 2017. Cette circonstance ne permet pas pour autant de retenir que l'art. 2 al. 6 OITab était, au moment du déroulement des faits, applicable à ceux-ci. Le Tribunal doit en effet retenir les dispositions de droit matériel qui existaient au moment où s'est produit l'état de fait dont doivent découler des conséquences juridiques (consid. 7.2.2 ci-dessus et arrêt du TAF A-2997/2016 du 6 avril 2017 consid. 4.1.2). Or, au moment pertinent, l'art. 10 al. 1 let. b aLTab ne comprenait pas le tabac pour pipe à eau, mais uniquement le tabac à coupe fine, de sorte que le premier ne pouvait qu'être compris dans l'art. 10 al. 1 let. c LTab et l'annexe IV à la LTab, cette dernière catégorisation impliquant une imposition moins lourde pour la recourante que si le tabac pour pipe à eau était inclus dans l'art. 10 al. 1 let. b aLTab et l'annexe III à la LTab. En définitive, la modification de la LTab au 1er septembre 2017 (consid. 6.5.1 et 6.5.3 ci-dessus) démontre bien qu'une base légale était nécessaire pour fonder l'art. 2 al. 6 OITab, à savoir pour permettre l'imposition du tabac pour pipe à eau comme le tabac à coupe fine.

Au surplus, la DGD expose que la dette douanière est née le 19 août 2015, compte tenu de la règle selon laquelle la dette douanière naît au moment où le bureau de douane accepte la déclaration en douane (art. 9 al. 1 let. b LTab; art. 69 let. a LD). Or, d'une part, cet exposé ne change rien à la conclusion selon laquelle l'art. 2 al. 6 OITab est inapplicable au cas présent, faute de base légale formelle.

D'autre part, à propos du moment pertinent au regard de l'application du droit dans le temps, le Tribunal relève que les dépôts francs sous douane sont des parties du territoire douanier ou des locaux situés sur celui-ci qui sont séparés du reste du territoire douanier (art. 62 al. 1 let. b LD; voir AFD, Forum D., n° 2/2014, p. 20 s. sur le rôle de l'AFD dans les dépôts francs sous douane). Les marchandises entreposées ne sont soumises ni aux droits à l'importation ni aux mesures de politique commerciale (art. 62 al. 3 LD). Cela dit, pour le surplus, la législation douanière trouve application (Remo Arpagaus, in Koller/Müller/Tanquerel/Zimmerli [éd.], Zollrecht, Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht, 2e éd., 2007, n° 814 p. 452; Simeon L. Probst, in Kocher/Clavadetscher [éd.], Handkommentar Zollgesetz [ZG], 2009, n° 10 ad art. 62 LD). Le dépôt franc sous douane permet de différer ou d'éviter la procédure de taxation douanière, le dépôt en lui-même n'entraînant pas de dette douanière (Arpagaus, op. cit., n° 813 p. 452 et n° 488 p. 279; Beusch, in Kocher/Clavadetscher [éd.], op. cit., n° 14 ad art. 69). La dette douanière naît notamment si la déclaration en douane a été omise lors de la sortie du dépôt franc sous douane, au moment où les marchandises en sortent ou, si cette date ne peut être établie, au moment où l'omission est découverte (art. 69 let. d LD).

La recourante demande à ce qu'il soit constaté (conclusion n° 4) que l'impôt est calculé selon le taux en vigueur au 28 avril 2015. Or, il paraît plutôt conforme à la loi de retenir la date du 19 août 2015 comme moment pertinent pour l'application du droit dans le temps, pour autant qu'il s'agisse de la date d'acception de la déclaration en douane (consid. 6.4 ci-dessus), ce même si les dépôts francs sous douane sont des parties du territoire douanier. Cela dit, vu ce qui précède, l'intérêt de la recourante à ce qu'il soit donné une suite favorable à la conclusion n° 4 fait défaut, pour autant d'ailleurs que l'on tienne cette conclusion pour recevable (voir consid. 7.1.2 ci-dessus). Il n'y a donc pas besoin de trancher définitivement la question de savoir si cette date, plutôt que celle du 19 août 2015, est déterminante pour ce qui est du droit applicable, puisque ce dernier n'a de toute façon pas été amendé en ces dispositions ici discutées en 2015.

Il en résulte que l'art. 2 al. 6 OITab, en tant qu'il assimile au tabac à coupe fine le tabac pour pipe à eau, sort clairement du cadre légal et emporte violation des règles sur la délégation législative. Le principe de la légalité étant violé, le Tribunal n'appliquera pas ici l'art. 2 al. 6 OITab (arrêt du TAF A-882/2016 du 6 avril 2017 consid. 4.4.2 s.).

7.5   

7.5.1  Il convient donc d'appliquer la législation pertinente en 2015, à savoir l'art. 11 al. 1 LTab en relation avec l'annexe IV à la LTab. L'impôt se monte donc à 12 % du prix de vente au détail, comme le soutient d'ailleurs la recourante. Comme ledit prix ne résulte pas clairement du dossier, ce dernier doit être renvoyé à l'instance précédente pour nouvelle fixation de l'impôt (arrêt du TAF A-882/2016 du 6 avril 2017 consid. 5.1; voir aussi art. 61 al. 1 PA).

7.5.2  Au surplus, les impôts, les droits de douane et les autres taxes dus en dehors du territoire suisse et lors de l'importation devant être intégrés dans la base de calcul de l'impôt sur les importations (art. 54 al. 3 let. a de la loi fédérale du 12 juin 2009 régissant la taxe sur la valeur ajoutée [LTVA, RS 641.20]), une diminution de l'impôt dû en vertu de la LTab emporte également réduction de l'impôt sur les importations, étant d'ailleurs précisé que l'impôt perçu en trop ou par erreur donne droit à remboursement (art. 59 al. 1 LTVA). Cela dit, l'autorité inférieure devra également examiner l'art. 59 al. 2 LTVA, selon lequel l'impôt perçu en trop ou par erreur, ou l'impôt qui n'est plus dû, n'est pas remboursé si l'importateur est inscrit au registre des assujettis sur le territoire suisse et qu'il peut déduire au titre de l'impôt préalable, en vertu de l'art. 28 LTVA, l'impôt payé ou dû à l'AFD (arrêt du TAF A-882/2016 du 6 avril 2017 consid. 5.2).

7.5.3  Le recours est donc admis et la décision attaquée, annulée. La cause est renvoyée à l'autorité inférieure pour qu'elle prononce une décision dans le sens des considérants.

8.   

8.1   

8.1.1  Compte tenu de cette issue, le Tribunal clarifie encore les points suivants relatifs aux arguments de la recourante.

8.1.2  La recourante se plaint de la violation de son droit d'être entendue par l'autorité inférieure, qui n'aurait pas suffisamment motivé sa décision rejetant ses conclusions. Le Tribunal constate, en effet, que certains de ses arguments a priori pertinents et propres au cas particulier ont été traités de manière excessivement succincte, notamment la question de la violation du principe de non-rétroactivité des lois.

Par ailleurs, devant le Tribunal, la recourante pose la question de savoir si un fait tel qu'une commande, un paiement ou un envoi de tabac pour pipe à eau avant le 1er mai 2015 devrait avoir une quelconque portée dans le cadre du grief de violation du principe de non-rétroactivité (et du grief de violation du principe de la bonne foi, qui ne semble pas se voir accordé ici une autre portée), alors que l'art. 2 al. 6 OITab a été introduit par ordonnance du 29 avril 2015 entrée en vigueur au 1er mai 2015 (RO 2015 1249).

Cela dit, le Tribunal, qui au contraire de l'autorité inférieure, donne raison à la recourante, n'est pas tenu de traiter tous ses arguments, étant donné qu'elle obtient gain de cause (art. 30 al. 2 let. c PA). Dès lors, point n'est besoin de se pencher plus avant sur le principe de non-rétroactivité.

8.1.3  Pour la même raison, le Tribunal ne discutera pas plus l'allégation de violation de la loi fédérale du 18 juin 2004 sur les recueils du droit fédéral et la Feuille fédérale (loi sur les publications officielles, LPubl, RS 170.512), notamment son art. 8 al. 3, selon lequel si un acte est publié selon la procédure extraordinaire, la personne concernée est en droit de prouver qu'elle n'avait pas connaissance de l'acte considéré et qu'elle ne pouvait pas en avoir connaissance malgré le devoir de diligence qui lui incombait.

8.1.4  Enfin, il n'y a pas non plus lieu de discuter l'allégation - contestée - d'application non uniforme de l'art. 2 al. 6 OITab à compter du 1er mai 2015.

9.   

9.1  Les frais de procédure, qui comprennent l'émolument d'arrêté, les émoluments de chancellerie et les débours, sont, en règle générale, mis à la charge de la partie qui succombe (art. 63 al. 1 PA). Ces frais sont ici fixés à Fr. 600.-. En application de l'art. 63 al. 2 PA, les frais de procédure ne peuvent toutefois être mis à la charge des autorités inférieures déboutées, de sorte que l'autorité inférieure n'a pas de frais de procédure à payer. L'avance de frais de Fr. 600.- versée par la recourante lui sera restituée une fois le présent arrêt définitif et exécutoire.

L'art. 64 al. 1 PA prévoit que l'autorité de recours peut allouer, d'office ou sur requête, à la partie ayant entièrement ou partiellement obtenu gain de cause, une indemnité pour les frais indispensables et relativement élevés qui lui ont été occasionnés par le litige (art. 7 ss du règlement du 21 février 2008 concernant les frais, dépens et indemnités fixés par le Tribunal administratif fédéral [FITAF, RS 173.320.2]). Selon l'art. 14 al. 2 FITAF, le Tribunal doit fixer les dépens sur la base de l'éventuel décompte remis par la partie concernée. A défaut, l'indemnité est fixée sur la base du dossier. En l'occurrence, la recourante a droit à des dépens, à charge de l'autorité inférieure. En l'absence de note d'honoraires, ceux-ci seront fixés à Fr. 900.-, compte tenu de la nature de la cause et de son degré de complexité, de l'écriture de recours, ainsi que de l'ampleur des d'actes de procédure.

(Le dispositif de l'arrêt se trouve à la page suivante.)


Par ces motifs, le Tribunal administratif fédéral prononce :

1. 
Le recours est admis, pour autant que recevable.

2. 
La décision attaquée est annulée. La cause est renvoyée à l'autorité inférieure pour nouvelle décision au sens des considérants.

3. 
Les frais de procédure sont arrêtés à Fr. 600.- (six cents francs). La recourante ne supporte pas de frais de procédure. L'avance de frais de Fr. 600.- (six cents francs) qu'elle a versée lui sera restituée une fois le présent arrêt définitif et exécutoire.

4. 
L'autorité inférieure doit verser Fr. 900.- (neuf cents francs) à la recourante à titre de dépens.


5. 
Le présent arrêt est adressé :

-        à la recourante (Acte judiciaire)

-        à l'autorité inférieure (n° de réf. *** ; Acte judiciaire)

 

 

 

Le président du collège :

Le greffier :

 

 

Pascal Mollard

Lysandre Papadopoulos

 

La présente décision peut être attaquée devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par la voie du recours en matière de droit public, dans les trente jours qui suivent la notification (art. 82 ss, 90 ss et 100 LTF). Le mémoire doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, les motifs et les moyens de preuve, et être signé. La décision attaquée et les moyens de preuve doivent être joints au mémoire, pour autant qu'ils soient en mains du recourant (art. 42 LTF).

 

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